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65 ordonnances alimentaires

18 janvier 2021

Par Anne Claire Nonnotte

65 ordonnances alimentaires

65 ordonnances alimentaires

Nous vous proposons de découvrir un extrait de l'ouvrage 65 ordonnances alimentaires S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

65 ordonnances alimentaires

65 ordonnances alimentaires

Sommeil et alimentation, travail en horaires décalés

De plus en plus de personnes travaillent en horaires décalés : travail de nuit, travail matinal avec réveil précoce ou, au contraire, travail tardif en fin de journée. Un cinquième de la population active est concerné et l’adaptation alimentaire est difficile, d’autant que le déphasage de rythme est quasi permanent, notamment avec les temps légitimes de récupération. La prévalence de la surcharge pondérale est majorée selon différentes études par des dettes de sommeil. Le travail en horaires décalés représente donc une situation à risque de surpoids et d’obésité, mais aussi à risque cardiovasculaire (augmentation notamment du risque d’accident vasculaire cérébral). À partir des données scientifiques actuelles – encore parcellaires – et de notre expérience clinique, un certain nombre de recommandations peuvent être données. Celles-ci doivent bien sûr être adaptées individuellement en fonction du contexte.

Ordonnance alimentaire Travail de nuit

Professionnel de santé… Le… M., Mme…

Votre travail en horaires décalés perturbe vos rythmes biologiques naturels et influe sur votre appétitQuelques conseils vous aideront à mieux gérer la situation . Que ce soit les jours de travail ou de repos, essayer de maintenir deux repas principaux à heure à peu près fixe et deux collations légères sans sucre ajouté au cours de la journée. Prenez votre temps pour manger.

► Les jours de travail :

  • le matin, au retour du travail avant de vous endormir, alimentez-vous en fonction des envies mais suffisamment (type brunch) ;

  • collation au réveil au début de l’après-midi. Elle doit être légère : légumes crus, fruits, yaourt devraient suffi re. En fonction de ce qui a été consommé le matin avant de vous endormir, peut être ajouter un peu de pain, voire une demi-tranche de jambon ou du blanc de poulet par exemple ;

  • le soir, avant de partir, faire un repas suffisamment copieux; collation dans la nuit les jours de travail , essentiellement protéinée pour éviter une perte de vigilance : jambon ou blanc de poulet, fromage blanc ou yaourt nature sans sucre associé ;

  • collation dans la nuit les jours de travail, essentiellement protéinée pour éviter une perte de vigilance : jambon ou blanc de poulet, fromage blanc ou yaourt nature sans sucre associé ; un fruit en plus assure un meilleur équilibre nutritionnel

► Les jours de repos, maintenir le même aspect quantitatif et qualitatif des apports alimentaires avec des prises horaires un peu modifiées (collation de 13 heures et non de 15 heures, repas du soir un peu décalé).

Travail avec réveil précoce

Professionnel de santé… Le… M., Mme…

Lors des réveils précoces pour aller travailler, pour mieux contrôler votre appétit et votre poids, au cours de la journée, veillez à :

► matin :

  • ne prendre qu’une boisson chaude et un fruit au moment du réveil précoce, vers 5-6 heures du matin ;

  • s’assurer une pause et une collation aux alentours de 9 heures 30 avec du pain aux multicéréales + 1 à 2 cuillères rases de confiture (selon envie), boisson, yaourt.

► après-midi : prendre une collation vers 17 heures. Attention à bien gérer la fringale de fin de journée. Prendre une collation de votre choix, en privilégiant les produits laitiers (yaourt, fromage blanc, faisselle, etc.), fruits frais ou compote ;

► midi et soir : les repas pour la journée doivent être proches d’une alimentation normale, le dîner se situant vers 19 heures. Les jours de repos, le petit déjeuner peut être pris vers 8 heures. La collation de 17 heures est optionnelle ; elle peut être réduite.

Difficultés d’endormissement Professionnel de santé…

Le…

M., Mme…

Vous avez des difficultés à vous endormir.

Veillez au repas du soir à : ► ne pas prendre de produits épicés ou excitants (thé, café, etc.) après 17 heures ; ► ne pas prendre de produits alcoolisés ; ils perturbent l’architecture du sommeil ; ► limiter les produits gras ; ils ralentissent la digestion ; ► avoir une alimentation légère le soir mais éventuellement légèrement sucrée. Dessert à type de flan maison, mousse au chocolat, en plus d’un fruit ; féculents (riz, pâtes, pommes de terre, légumes secs) en quantité modérée (3 à 4 c. à soupe avec une sauce aux légumes à type de sauce tomate).

Ordonnance de plantes Professionnel de santé…

Le…

M., Mme…

Cas 1 Gélules de plantes facilitant le sommeil en de difficulté d’endormissement – extraits secs (ES) à faire préparer par votre pharmacien : ► eschscholtzia ( Eschscholtzia californica ) 0,3 g Qsp pour une gélule. 1 gélule 3/4 d’heure avant le coucher.

Cas 2 Gélules de plantes en cas de sommeil « agité » – ES à faire préparer par votre pharmacien : ► passiflore ( Passiflora incarnata ) 0,3 g Qsp pour une gélule. 1 gélule 3/4 d’heure avant le coucher.

Cas 3 Gélules de plantes en cas de troubles du sommeil dans un contexte de dépression légère ou d’anxiété – ES à faire préparer par votre pharmacien : ► valériane ( Valeriana officinalis ) 0,3 g Qsp pour une gélule. 1 gélule 3/4 d’heure avant le coucher.

Explications pratiques destinées aux patients

Plusieurs situations se présentent et nécessitent des conseils différents. Il faut avoir présent à l’esprit que toute dette de sommeil favorise la sécrétion de ghréline, hormone orexigène [4] stimulant les pulsions alimentaires. Le travail en horaires décalés désynchronise les rythmes biologiques, réduit les temps de sommeil et favorise le mal-être. En plus, on considère qu’en Occident la durée quotidienne de sommeil a baissé d’environ 1 heure 30 à 2 heures en un siècle, ce qui participe à expliquer certains troubles du comportement alimentaire à type de pulsions plus ou moins facilement contrôlables. Face à un surpoids ou une obésité, il faut toujours s’enquérir de la qualité du sommeil des patients. En cas d’obésité, sont fréquemment associées des apnées du sommeil, ce qui majore encore plus les troubles.

Travail de nuit

La difficulté vient de l’alternance des jours de travail avec ceux de repos bien légitimes, mais qui occasionnent une recherche permanente d’une nouvelle adaptation physiologique. Parallèlement au travail, il faut maintenir un niveau de vigilance optimal et on sait que toutes les grandes catastrophes industrielles de ces dernières décennies ont eu lieu la nuit à des périodes de moindre vigilance humaine : Tchernobyl, Bhopal, Amoco Cadiz, etc. Certaines personnes n’arrivent pas à s’adapter physiologiquement à un état de veille avec une bonne vigilance, notamment parce que la baisse naturelle de la température corporelle en fin de journée favorise le sommeil.

Sur le plan alimentaire, peuvent être préconisés selon notre expérience, comme indiqué dans l’ordonnance :

  • deux principaux repas par jour à des horaires à peu près fixes, qu’il s’agisse des jours de travail et de repos. Ils permettent d’assurer une certaine stabilité physiologique ;

  • deux collations par jour. Elles sont à moduler en fonction de la situation de repos ou de travail. L’apport en glucides (sucres ajoutés) doit être restreint le soir pour maintenir une vigilance optimale au travail. Les apports de nuit doivent être de type protéiné sans exclure la consommation d’un fruit qui assure un bon équilibre nutritionnel.

Travail avec réveil précoce

L’organisme n’est pas adapté à manger trop tôt ; le pic de cortisol sécrété vers 6 heures induit une tendance hyperglycémique ne stimulant pas l’appétit. Par ailleurs, selon notre expérience clinique, un petit déjeuner précoce induit une majoration des apports caloriques totaux pour l’ensemble de la journée avec, pour beaucoup de personnes, une fringale significative en milieu ou fin de matinée. C’est pourquoi nous préconisons de scinder en deux périodes le petit déjeuner, comme indiqué dans l’ordonnance. Lors des journées de travail, il est aussi utile d’apprendre à gérer la fatigue et les fringales de fin de journée par une collation vers 17 heures, essentiellement protéinée, à type de produits laitiers auxquels peuvent être ajoutés des fruits. La prise éventuelle, le midi, de féculents permet également de limiter le risque de fringale. Ceux-ci sont à consommer en quantité raisonnable compte tenu de leur charge calorique. La fatigue, la dysrégulation des rythmes, les « coups de pompe » ont tendance à engendrer la recherche de prise de sucré et l’orientation spontanée se fait souvent vers une alimentation industrielle facile à se procurer : biscuits, barres de céréales, chocolatées, etc., le plus souvent à index glycémique élevé, favorisant la prise de poids. Il faut conseiller de laisser ces produits de côté et de consommer des fruits bien mûrs ou des compotes (sans sucre ajouté et sans édulcorants) qui assouvissent l’appétence pour le sucré. Les produits avec édulcorants ont un intérêt non démontré ; ils leurrent le cerveau et sur le long terme favorisent le surpoids selon différentes études.

Difficultés d’endormissement

Les excitants à type d’épices fortes ne doivent pas être consommés le soir, comme tous les produits à base de caféine. Leur consommation ne doit pas se faire après 17 heures ; attention notamment aux divers sodas. L’alcool et les produits alcoolisés ne doivent pas être pris (ou avec parcimonie) car, s’ils ont un effet sédatif pouvant induire le sommeil, ils déstructurent son architecture et peuvent provoquer des microréveils fréquents et une fatigue exacerbée . Si les produits sucrés avec index glycémique élevé provoquent un pic d’insuline post-prandial susceptible d’aider à induire le sommeil, il ne faut pas sous-estimer son rôle lipogène qui favorise le surpoids. Un dessert modérément sucré est néanmoins autorisé, par exemple un flan fait maison avec un apport contrôlé en sucre, une mousse au chocolat, comme indiqué dans l’ordonnance (adapter selon les goûts). Doit être associé un fruit. Les difficultés d’endormissement peuvent ainsi s’estomper.

Éléments de physiopathologie

Chronobiologie

Les rythmes biologiques sont génétiquement déterminés selon les espèces. Alain Reinberg a été un des précurseurs de leur étude et a sensibilisé le corps scientifique sur leur importance [3] . Si développer l’aspect physiologique du sommeil et de ses troubles sort du cadre de cette fiche, il est nécessaire de souligner que « l’importance du rythme circadien pour la santé est mise en évidence par les troubles associés au travail posté ou de nuit », notamment sur le plan cardiovasculaire [2] .

L’homme, un être diurne qui mange lentement

L’horloge biologique interne est fondée sur l’alternance jour/nuit, et les hommes, contrairement à d’autres mammifères, sont des animaux diurnes. Le travail de nuit ou en horaires décalés n’est donc pas adapté ; de nombreux patients sont incapables d’ajuster par exemple leur régulation thermique et ne devraient pas occuper ces emplois. Manger lentement est indispensable pour limiter les risques de compulsions alimentaires, et également pour assurer une meilleure digestion et un mieux-être. L’homme a été programmé ainsi.

Les plantes réputées améliorer [1]

Il existe de nombreuses plantes qui peuvent être utilisées à visée sédative, notamment les suivantes : aubépine, mélisse, eschscholtzia ou pavot de Californie, valériane, passiflore, griffonia : à plus faible effet : tilleul, verveine. Elles ont chacune leurs spécificités, les deux premières étant plus à visée anxiolytique. On évite la prise de tisane le soir en cas de troubles du sommeil pour réduire les envies pressantes nocturnes, d’où l’intérêt des gélules de plantes. Les médecins ont le devoir de tout mettre en œuvre pour que l’organisation de la société soit en adéquation avec les possibilités physiologiques humaines. Or, le travail en horaires décalés va à l’encontre de la biologie et la physiologie de l’homme et est, de fait, source de multiples troubles ou pathologies largement sous-estimés, dont les prises de poids.

Références

[1] Chevallier L . Moins de médicaments, plus de plantes . Paris : Fayard ; 2015 . [2] Malenfant C . Alimentation et rythme biologique . In : Martin A , editor. Risques de déficiences ou d’excès selon les groupes de population. AFSSA, CNERNACNRS, Apports nutritionnels conseillés pour la population française . 3 e éd. Paris : Tec et Doc ; 2001 . p. 448 . [3] Reinberg A . Chronobiologie médicale, chronothérapie . Paris : Flammarion ; 2003 . [4] Tounian A , Laferrere B , Guy-Grand B . La ghréline : seule hormone orexigène connue . Cahiers de Nutrition et de Diététique 2005 ; 40 : 270 - 80 .

Laurent Chevallier est l’auteur de nombreuses publications et exerce son activité de médecin comme attaché des hôpitaux en médecine interne au centre hospitalier universitaire de Montpellier et en cliniques dirigeant les pôles nutrition.

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