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Ajustement de la réfraction pour le travail sur écran

20 avril 2022

Par Anne-Claire Nonnotte

Elsevier

Ajustement de la réfraction pour le travail sur écran

David Lassalle, orthoptiste, directeur pédagogique de l'École d'orthoptie de Nantes, CHU de Nantes

Introduction

En 2018, une étude de Nielsen, un groupe américain prestataire en marketing, avait établi que l'adulte moyen passerait onze heures par jour devant un écran, dont plus de quatre devant la télévision. Selon un sondage commandé par Vision Direct®, site Internet fondé par des opticiens, l'adulte moyen passerait l'équivalent de 34 ans de sa vie à regarder des écrans. Un questionnaire répondu par 2 000 personnes en Grande Bretagne a révélé qu'elles passeraient en moyenne plus de 4 866 heures par an à utiliser des objets numériques tels que le téléphone, l'ordinateur portable et la télévision. Cela équivaudrait à 301 733 heures sur la durée de vie moyenne d'un adulte, soit 62 ans. Selon les résultats du sondage rapportés par StudyFinds, un site Internet qui couvre les nouvelles sur les dernières études de recherche, au cours de sa vie, un adulte de 18 à 81 ans, passerait 13 heures par jour devant un écran selon les chercheurs de OnePoll, une société d'études marketing. Dans ces différents sondages, plus de la moitié des personnes interrogées ont admis que le temps passé devant l'écran leur avait fatigué les yeux. Mais malgré la fatigue, quatre personnes sur dix disent qu'elles s'arrêtent rarement pour se reposer la vue… Devant ces plaintes asthénopiques liées au temps passé devant un écran, quels ajustements réfractifs envisager? Quel mode de correction optique utiliser? Quid de l'ergonomie visuelle ?

Des écrans et non un écran

Nous l'avons vu en introduction, le temps passé devant un écran ne cesse de croître. Une des difficultés à laquelle le thérapeute va devoir faire face n'est pas tant le temps passé devant un écran mais la multiplicité des écrans utilisés… Si le travail sur écran a débuté son essor dans les années 1980, l'avènement des smartphones et autres tablettes est lui plus récent. Ainsi nous sommes passés d'une utilisation essentiellement professionnelle à une utilisation mixte (professionnelle et domestique) des écrans via des appareils dont la distance d'utilisation n'est pas identique. En effet, si la distance d'utilisation de l'ordinateur de bureau est d'environ 63 cm, celle d'une tablette est d'environ 39 cm et celle d'un smartphone de 33 cm… Dès lors, qui dit plusieurs écrans à différentes distances d'utilisation, dit obligatoirement plus de risques de plaintes asthénopiques.

Asthénopie

Également connue sous le nom de fatigue oculaire, l'asthénopie se manifeste par une série de symptômes non spécifiques tels que la fatigue, des douleurs oculaires ou périoculaires, une vision floue, des céphalées… Le plus souvent, les symptômes surviennent après un effort prolongé en vison de près, le travail sur écran ou d'autres activités impliquant des tâches visuelles intenses. Outre l'activité oculaire, l'asthénopie va également dépendre de l'état de santé général du patient, de ses activités professionnelles et personnelles, du moment de la journée, de son âge.

Notion de troubles musculosquelettiques (TMS)

Selon un rapport de l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité) de 2011, les TMS sont «l'ensemble des symptômes ou des lésions concernant tous les segments corporels qui permettent à l'homme de se mouvoir et de travailler. Ces troubles concernent les tendons, les nerfs et surtout les muscles. Les TMS sont des affections douloureuses qui atteignent donc surtout les tissus mous». Dans le cadre du travail sur écran, les TMS concernent essentiellement les membres supérieurs (cou, dos, poignet et mains, épaules…). Ils sont directement liés à la posture du travail sur écran (utilisation de la souris et du clavier, position du siège, position de l'écran). Les TMS imputables au travail sur écran seraient de l'ordre de 5 %.

Examen réfractif

Interrogatoire

Moment essentiel de tout examen médical, le temps accordé au patient est souvent trop court en raison de la charge de travail mais également des contraintes socioéconomiques actuelles. C'est pourtant pendant ce temps d'échange, et encore plus lors d'une première consultation, que la relation de confiance soignant-soigné pourra s'installer ou non. Ce temps d'écoute indispensable permettra via des questions ciblées de décrypter les plaintes visuelles et/ ou fonctionnelles du patient mais également de prendre connaissance de sa profession et d'essayer de quantifier avec lui son temps d'utilisation quotidien d'un ou des écrans

Contrôle de la réfraction

Toute amétropie non ou mal corrigée va entraîner des efforts accommodatifs compensateurs pour tenter de ramener l'image sur la rétine. Les causes de cette accommodation sont bien connues. Il s'agit essentiellement d'une myopie surcorrigée, d'une hypermétropie non ou sous-corrigée et d'astigmatisme non ou mal corrigé. Dans une étude française de Boissin et al. de 1991 portant sur 275 personnes travaillant sur écran, il avait été retrouvé 68 % d'emmétropes, 24 % de myopes et 8 % d'hypermétropes. Cette étude ne comportant pas de cycloplégie, le dernier chiffre concernant les hypermétropes était sans doute sous-estimé…

Réfraction objective

Réaliser un examen réfractif minutieux est fondamental. Il débute par les données objectives que sont les valeurs du réfractomètre automatique. Si ces dernières sont en général excellentes pour la puissance et l'axe du cylindre, elles donnent en revanche une idée relativement approximative de la sphère. Corrélées à l'acuité visuelle sans correction du patient s'il n'en porte pas ou avec correction si le patient en porte une, elles donnent malgré tout une idée de l'effort accommodatif du patient pour bien voir. Par exemple, si les données du réfractomètre montrent une tendance myopique chez un patient ne portant pas de correction, l'acuité brute retrouvée devrait normalement être sous-optimale. Si ce n'est pas le cas, il est fort probable que cette «pseudomyopie» soit en fait un spasme accommodatif. Ces considérations sont d'autant plus vraies que le patient est jeune.

Réfraction subjective

La réfraction subjective permet de prendre en compte le besoin visuel subjectif du patient. Elle consiste, via une réfraction monoculaire dans un premier temps, à déterminer la sphère donnant la meilleure acuité, l'axe du cylindre puis la puissance du cylindre pour ainsi déterminer la réfraction monoculaire globale. Cette réfraction monoculaire sera ensuite complétée par la balance bi-oculaire et enfin l'équilibre binoculaire. Enfin, chez le sujet presbyte, l'examen se terminera par la détermination de l'addition en vision de près. Cette partie de l'examen revêt une importance toute particulière dans le cas d'une personne travaillant sur écran. En effet, du fait d'une sous-compensation de l'hypermétropie ou d'une surcompensation de la myopie et/ou d'une distance d'examen trop courte (33 cm au lieu de 40 cm), l'addition prescrite est bien souvent trop forte avec comme conséquences pour le patient, une distance de lecture inadaptée, un non-respect de l'ergonomie visuelle, une sensation d'inconfort sur l'écran et au final un équipement optique mal adapté.

Cycloplégie

La cycloplégie reste le seul moyen de déterminer précisément l'amétropie sphérique. µElle s'impose devant toute discordance entre la réfraction subjective et le motif de consultation et ce jusqu'à 50 ans. Dans beaucoup de cas, elle permet de détecter une surcorrection myopique ou une sous-correction hypermétropique. Cependant, elle peut empêcher un certain nombre d'activités comme la lecture et la conduite automobile. De ce fait, il faut parfois surseoir à sa réalisation immédiate et reconvoquer le patient. Il convient de noter qu'il est tout à fait possible de réaliser une réfraction subjective sous cycloplégie. La cycloplégie, si elle n'est pas la solution ultime, ne s'oppose absolument pas aux méthodes subjectives mais présente l'énorme avantage de connaître l'état réfractif de base du patient. Au final, l'examen réfractif du patient travaillant sur écran ne diffère pas de celui du patient lambda. Après un interrogatoire attentif permettant de définir ses besoins visuels et/ou ses troubles fonctionnels, pour lui comme pour tout patient, notre attention se portera sur le fait d'éviter toute surcorrection myopique ou toute sous-correction hypermétropique. Devant tout décalage entre l'examen subjectif et les plaintes du patient, l'examen sous cycloplégique trouvera toute sa place. En cas de presbytie, nous veillerons à prescrire la juste addition et non une addition trop forte.

Quel mode de correction optique dans le cadre du travail sur écran ?

Tout comme l'interrogatoire, le choix du mode de correction nécessite un temps de discussion avec le patient. Si de premier abord, on pourrait se dire que cette partie intéresse surtout l'opticien, l'orthoptiste comme l'ophtalmologiste ont un rôle de conseil auprès du patient. Le choix du mode de correction va classiquement se faire en fonction de l'âge du patient. Ainsi on proposera plutôt un verre monofocal à un patient non presbyte alors que l'on proposera plutôt un verre multifocal (progressif) à un patient presbyte. Cependant, depuis l'avènement du travail sur écran le choix du mode de correction a évolué depuis quelques années et si la prescription d'un monofocal reste la règle chez le patient non presbyte, il est de plus en plus fréquent de prescrire un verre avec une légère addition (0,4 à 0,8 D) à un patient non presbyte, ceci permettant d'améliorer le champ de vision du porteur et lui procurer un bénéfice maximal pour ses activités sur écran. Chez le patient presbyte, même si le verre progressif reste le verre « tout terrain », il peut parfois présenter certains problèmes comme une faible profondeur de champ et un port de tête à adapter. Pour ces raisons, les verres dégressifs ont trouvé leur place dans l'arsenal du thérapeute car ils permettent de pallier les limites du verre progressif en offrant un large champ de vision intermédiaire ce qui fait de ce type de verre le complément idéal à des verres progressifs pour des activités prolongées sur écran.

Travail sur écran et ergonomie visuelle

Si l'utilisation prolongée des appareils numériques peut avoir une répercussion directe sur le système visuel, il peut comme nous l'avons vu plus haut également avoir des répercussions sur d'autres parties du corps. Toute personne qui utilise un écran pendant de longues périodes – que ce soit pour son travail et/ou ses loisirs – risque l'apparition de symptômes non ophtalmologiques à cause d'une mauvaise ergonomie visuelle

Qu'est-ce que l'ergonomie visuelle ?

L'ergonomie est la science de l'aménagement d'un emploi, de l'équipement et/ou d'un poste de travail pour les adapter aux besoins du travailleur. L'objectif est d'optimiser les « ajustements » entre chaque travailleur et son environnement de travail afin d'optimiser les performances et de réduire le risque de microtraumatismes répétés. L'ergonomie informatique étudie les façons d'optimiser le poste de travail de manière à réduire les risques particuliers associés à l'asthénopie visuelle, les douleurs cervicales et dorsales, le syndrome du canal carpien et d'autres troubles touchant les muscles, l'épine dorsale et les articulations.

Conseils pour améliorer l'ergonomie lors du travail sur écran

Voici onze conseils utiles en ergonomie informatique recommandés par le National Health Service (NHS)  :

  • soutenez votre dos ;

  • ajustez votre chaise ;

  • placez vos pieds sur le plancher ;

  • placez votre écran à la hauteur des yeux ;

  • positionnez votre clavier correctement ;

  • gardez votre souris à proximité ;

  • évitez les reflets sur l'écran ;

  • pensez à utiliser des lunettes pour ordinateur ;

  • gardez les objets accessibles ;

  • évitez la fatigue liée au téléphone ;

  • prenez des pauses régulièrement. De plus, il est possible d'accroître le confort et de réduire la tension physique en ajustant la hauteur de la chaise et du bureau pour que  :

  • les bras soient perpendiculaires au plancher, sans être étendus devant ou repliés vers l'arrière ;

  • les avant-bras, les poignets et les mains forment un angle de 90  degrés avec les bras ;

  • les cuisses soient parallèles au plancher et la partie inférieure des jambes soit perpendiculaire au plancher ;

  • les poignets et les paumes ne reposent pas sur des rebords pointus.

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