Approche ostéopathique du cerveau
France | 6 décembre 2021
Par Anne Claire Nonnotte
Nous vous proposons de découvrir un extrait de l'ouvrage Approche ostéopathique du cerveau S’ouvre dans une nouvelle fenêtre
Le goût
Séparer le goût de l’odorat est très théorique ; l’odorat contribue largement au goût. Les trois quarts de ce que le cerveau perçoit grâce au goût impliquent aussi l’odorat. Lorsqu’on parle du goût de la pomme et de la fraise, c’est grâce à la rétroolfaction qu’il est perçu. Il vaudrait mieux parler d’arômes et non de goût. La perception des goûts est une protection qui peut nous sauver la vie.
Rétro- et ortho-olfaction
La rétro-olfaction nous permet de recevoir, à partir du système olfactif, les flaveurs des aliments qui sont dans la bouche.
L’ortho-olfaction consiste à sentir directement l’odeur des aliments.
Langue
Les substances chimiques qui procurent le goût se mélangent à la salive pour stimuler les papilles gustatives de la langue.
Les différents goûts
En principe, on distingue le sucré, le salé, l’acide, l’amer et l’umami, qu’on ressent dans les poissons, les crustacés, les viandes fumées, les champignons, les tomates mûres, les épinards, les fromages, la sauce soja, etc. Finalement, c’est un mélange de sucré, de salé et d’acide. Il existe aussi le goût des acides gras, du métal, du piquant, du brûlant, du chocolat, etc. ; finalement, il est impossible d’en faire une liste complète.
Nerfs reliés au goût
Le goût dépendant de la langue, de la bouche et de l’odorat, il met en route de nombreux nerfs, à savoir : l’olfactif (I), le facial (VII), le glossopharyngien (IX) et le vague (X).
Nerfs sensitifs de la langue
Au niveau de la langue
D’arrière en avant, on trouve :
le vague (X), donnant la sensibilité de la partie postérieure de la langue, du pharynx et de l’épiglotte ;
le glossopharyngien (IX), pour le tiers postérieur de la langue ;
le mandibulaire (V 3), donnant les informations sur la consistance, la texture et la température des aliments ;
le facial (VII), pour les deux tiers antérieurs de la langue et du palais par la corde du tympan (filet nerveux végétatif et sensoriel, relié au nerf lingual, branche du trijumeau) ( figure 17.4 ).
En plus de la langue
Les sensations gustatives proviennent aussi du voile du palais et du pharynx. Chez le fœtus, les papilles gustatives commencent à être sensibles autour du 4e mois. Elles sont sensibles notamment aux odeurs du liquide amniotique provenant de l’alimentation de la mère (études de Luc Marlier et Benoît Schaal). Toutes les mères savent qu’en fonction de leur alimentation, leur bébé prend plus ou moins bien de plaisir à téter. On compte environ 10 000 cellules gustatives, dont les trois quarts résident sur la langue. Plus que leur quantité, c’est leur qualité gustative qui prime;
Nerfs moteurs de la langue
C’est surtout le nerf hypoglosse (XII) qui assure la motricité de la langue. Les palato- et styloglosses ont une innervation vagale (X) et parfois faciale (VII).
Voies du goût
Les neurones sensitifs procurant le goût donnent des informations en moins de 150 millisecondes à la moelle spinale, au tronc cérébral, au thalamus, au cortex gustatif relié à l’hypothalamus et au système limbique.
Centres du goût
Dans le bulbe, les neurones gustatifs se terminent dans le noyau gustatif inclus dans le noyau du tractus solitaire (ensemble de fibres végétatives du vague). Les neurones de ce noyau sont sensibles aux stimuli gustatifs thermiques et tactiles.
La stimulation du noyau du tractus solitaire peut entraîner des réflexes comme :
une sécrétion salivaire ;
un vomissement, pouvant nous protéger ;
une sécrétion gastrique.
Du bulbe, les informations gustatives se dirigent vers le thalamus, l’hypothalamus, l’aire gustative du lobe pariétal, le cortex préfrontal et orbitofrontal ( figure 17.5 ).
Thalamus, hypothalamus
Le thalamus intègre les informations gustatives et tactiles de la langue qu’il envoie à l’hypothalamus. Celui-ci les intègre aux émotions liées au goût.
Cortex insulaire
Il semblerait que le cortex insulaire joue aussi un grand rôle pour décoder le goût.
Cortex préfrontal et orbitofrontal
Ces cortex traitent à le fois les informations gustatives et olfactives pour comprendre leur signification et les associer à notre vécu.
D’autres centres
Avant de goûter un aliment, on le voit, on le sent. La langue et les dents analysent sa texture et sa consistance ; les papilles gustatives interprètent ses saveurs ; le thalamus nous permet de comprendre ce que nous mangeons ; l’aire gustative reconnaît le goût qui a été mémorisé. Selon notre éducation, notre culture, nos états d’âme, s’ajoutent les messages de plaisir, de dégoût et de l’analyse sémantique (vocabulaire pour décrire ce que l’on mange). L’hippocampe mémorise ou réveille ces informations. Nous savons tous combien le goût et l’odeur font partie de notre bagage émotionnel et culturel. Une bonne odeur de tarte qui cuit nous met dans un état de confort et de confiance.
Pathologies du goût
Étiologie
L’altération du goût peut être d’origine :
traumatique, associée alors à une anosmie ;
inflammatoire, suite à une rhinite ou une grippe par exemple ;
dégénérative – les personnes âgées perdent une partie de l’odorat et du goût ;
démyélinisante, comme dans la sclérose en plaques, les maladies de Parkinson et d’Alzheimer ;
émotionnelle.
Les différentes formes
On retrouve :
l’hypogueusie : diminution de la sensation de goût ;
la dysgueusie : perturbation et transformation du sens du goût incriminant l’alcool, le tabac, les médicaments, les drogues, la chimiothérapie, la radiothérapie, le diabète ;
la presbygueusie, liée à l’âge ;
la frontogueusie : goût amer dans la bouche en relation avec une affection du tympan, créant une irritation de la corde du tympan provenant du nerf facial (VII).
Modalités des dysgueusies
Ces modalités se font par défaut de transmission ou de réception, parfois les deux à la fois.
Goût et émotion
Comme son alter ego, l’odorat, le goût est intimement lié à notre enfance, notre éducation, aux coutumes du pays. Il existe des goûts qu’on adore, qu’on déteste ou qui sont neutres. Lors de nos traitements nous faisons évoquer aux patients certains goûts marquants pour noter leurs représentations émotionnelles topographiques.
Tests et techniques
Indications
Les indications sont les suivantes :
les traumatismes crâniens : les dysgueusies sont presque toujours accompagnées d’anosmie ; on associe donc les deux traitements ;
les maladies neurodégénératives : il est bien connu que l’odorat et le goût sont souvent les premiers signes de ces maladies. Nous le répétons, toute stimulation d’une partie du cerveau est toujours bénéfique à l’ensemble des fonctions cérébrales. Le travail du goût et de l’odorat est profitable aux patients ;
les infections glosso-rhinopharyngées ;
les dépressions : comme toutes les fonctions de l’organisme sont ralenties dans les états dépressifs, le patient a peu conscience de cette atteinte sensorielle. Celui-ci étant sous anxiolytiques ou antidépresseurs, le cerveau réagit parfois peu à nos traitements.
Tests
Au niveau sensitif
À l’aide d’un coton-tige, on détermine les zones d’hyposensibilité de la langue. On part d’arrière en avant et de latéral à médial ( figure 17.6 ). En position d’écoute crânienne, on demande au patient de stimuler par petites touches successives les zones hyposensibles de la langue à l’aide d’un coton-tige. Après avoir repéré les aires cérébrales qui les concernent, on emploie une technique d’intensification-stimulation à leurs niveaux. Quand les aires cérébrales sont localisées au niveau du tronc cérébral, on effectue des manipulations des nerfs crâniens, essentiellement les nerfs vague (X), glossopharyngien (IX) et hypoglosse (XII). Nous demandons au patient de stimuler ces zones d’hyposensibilité linguale deux fois par jour pendant une dizaine de jours.
Au niveau sensoriel
Goûter simplement
Toujours en écoute crânienne, vous demandez au patient les yeux fermés de mettre un peu de sucre ou de chocolat sur la langue. Vous évaluez la qualité de l’écoute crânienne de manière à détecter sa faiblesse ou la partie où elle est interrompue pour la travailler en intensification-stimulation. Pour augmenter la précision de l’intensification-stimulation, posez un tampon salivaire entre les molaires et demandez au patient de serrer les mâchoires pendant le traitement.
Goûter en ajoutant une rétro-olfaction
Cela permet, par l’écoute crânienne, de déterminer si l’odorat domine le goût ou inversement.
Au niveau émotionnel
On demande au patient d’évoquer un goût ou un aliment qu’il aime bien ou qui lui rappelle une période de bonheur. Le cerveau intègre cette évocation au niveau du circuit limbique ; cela nous permet de stimuler cette zone. On lui demande ensuite d’imaginer une odeur ou un goût qu’il déteste ou qui lui rappelle de mauvais souvenirs. Dans ces cas, on applique une dissipation-inhibition sur la zone cérébrale activée. À titre d’exemple, un patient, à l’âge de 5 ans, avait été contraint et forcé de manger du poisson par son père qui le menaçait verbalement avec violence. Plus tard, à chaque fois qu’il était contredit ou forcé de faire quelque chose, le goût du poisson revenait. Il a suivi une psychothérapie qui l’a aidé, car ce goût devenait trop fréquent et vraiment obsessionnel, mais il persistait lors de certains conflits. Notre traitement a contribué obnubilant.
Jean-Pierre Barral Ostéopathe DO, diplômé de l’European School of Osteopathy (Maidstone, Royaume-Uni) et de la faculté de médecine Paris-Nord (département ostéopathie et médecine manuelle)
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