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Comment explorer un trouble de l'olfaction

2 septembre 2023

Par Anne Claire Nonnotte

Comment explorer un trouble de l'olfaction

Comment explorer un trouble de l'olfaction

Nous vous proposons de découvrir un extrait de l'ouvrage Imagerie cervico-faciale S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

Imagerie cervico-faciale

Imagerie cervico-faciale

Comment explorer un trouble de l'olfaction

Jean-Claude Ferrié, Xavier Dufour

Les troubles de l'olfaction (dysosmies) post-rhinitiques, post-traumatiques ou liés à une PNS, sont les plus fréquents [1]. Une dysosmie peut aussi être en rapport avec une pathologie neurologique (tumeur cérébrale ou maladie neurodégénérative) ou avoir une cause toxique (exposition chimique aiguë ou radiothérapie). Une hyposmie peut être associée à certaines maladies systématiques (syndrome de Goujerot-Sjögren, diabète, hypothyroïdie, cirrhose éthylique ou encore insuffisance rénale). Plus rarement, l'anosmie peut être congénitale, isolée ou associée à un syndrome CHARGE (coloboma, heart defect, atresia choanae, retarded growth and development, genital hypoplasia, ear anomalies/ deafness) ou à un syndrome de Kallmann de Morsier. On distingue des dysosmies quantitatives (essentiellement des hyposmies ou des anosmies) et des dysosmies qualitatives [2]. L'analyse d'une dysosmie qualitative donne une orientation sur le niveau de l'atteinte du système olfactif. La perception d'une mauvaise odeur réelle (cacosmie) oriente sur un foyer infectieux dentaire ou sinusien. La perception désagréable d'une odeur agréable (parosmie) fera rechercher une atteinte neurosensorielle et la perception d'une odeur inexistante (hallucination olfactive), une tumeur cérébrale ou une origine psychiatrique. L'évaluation clinique précise la dysosmie, les antécédents du patient, les circonstances de survenue et la répercussion sur la qualité de vie. Elle recherche d'autres signes rhinosinusiens, mais aussi des signes visuels et neurologiques. L'examen endoscopique apprécie la morphologie et la liberté des cavités nasales et des fentes olfactives. Il permet aussi l'analyse de la muqueuse et du mucus la recouvrant. La réalisation de tests cognitifs, à l'aide de substances odorantes, détermine des seuils de détection et d'identification et précise les facultés olfactives du patient ; elle nécessite toutefois sa coopération [3]. Les potentiels évoqués olfactifs permettent une évaluation objective de la fonction olfactive. Les situations cliniques les plus fréquentes sont l'hypo ou l'anosmie et la cacosmie. Elles peuvent être contemporaines d'un épisode rhinosinusien aigu et être transitoires. Leur survenue en l'absence de pathologie rhinosinusienne connue, la découverte d'une tumeur endonasale ou la persistance d'une dysosmie postrhinitique ou traumatique peuvent conduire à la réalisation d'une imagerie des voies olfactives [1].

Les voies olfactives

Le flux aérien nasal transporte les particules odorantes aux fentes olfactives de part et d'autre de la lame perpendiculaire de l'ethmoïde. Elles viennent au contact de la muqueuse olfactive qui tapisse la face inférieure de la lame criblée de l'ethmoïde, la partie haute du septum et la face médiale des cornets moyens (fig. 7.1a). Les cellules neuroépithéliales olfactives, à l'origine de l'émission d'une information nerveuse, présentent à leur extrémité distale des cils étalés à la surface de la muqueuse. À l'autre extrémité, les prolongements axonaux se regroupent pour former les filets olfactifs qui transmettent l'information nerveuse aux bulbes olfactifs. Ces filets olfactifs traversent les foramens de la lame criblée de l'ethmoïde, gagnent l'espace antérieur du crâne et pénètrent à la face antérieure des bulbes olfactifs. Ils entrent alors en contact synaptique avec des cellules mitrales dont les prolongements axonaux cheminent dans le pédoncule olfactif et forment, après regroupement, le tractus olfactif. Les tractus olfactifs sont situés sur la face inférieure ou orbitaire du lobe frontal, en regard des sillons olfactifs, entre les gyri droits et orbitaires (fig. 7.1b–f). Chaque tractus est constitué, de l'avant vers l'arrière, par le bulbe et le pédoncule. Le bulbe olfactif est une masse de substance grise située entre la lame criblée de l'ethmoïde et la face orbitaire du lobe frontal, au sein de la logette olfactive. Le pédoncule olfactif repose sur le sillon olfactif à la face inférieure du lobe frontal. Il s'élargit en arrière, en regard de l'espace perforé antérieur et se divise à ce niveau en stries olfactives. Les centres corticaux comprennent des aires sensorielles, des aires d'association et des centres réflexes. Au niveau temporal, les aires primaires sont représentées par le cortex piriforme, l'amygdale et le cortex entorhinal où les axones des cellules mitrales se terminent. Les aires secondaires sont constituées par l'hypothalamus et l'hippocampe, et reçoivent des projections issues des aires primaires. Des connexions avec le thalamus permettent le transfert de l'information vers le cortex orbitofrontal. L'ensemble de ces connexions permet la perception consciente d'une odeur, son intégration affective et sa mémorisation.

Fig7.1

Fig7.1

L'imagerie

La tomodensitométrie

L'exploration TDM S’ouvre dans une nouvelle fenêtre des cavités naso sinusiennes complète l'enquête clinique et endoscopique lorsqu'un foyer infectieux sinusien, une dysosmie obstructive ou une origine traumatique sont évoqués  [1]. L'acquisition est réalisée comme lors de l'exploration d'un dysfonctionnement rhinosinusien chronique, en contraste spontané, avec des reconstructions multiplanaires frontales, transverses et sagittales. Cet examen permet l'analyse des cavités nasales, des fentes olfactives et de la lame criblée bien exposée sur les reconstructions frontales; il explore la totalité des sinus et de l'infrastructure maxillaire. Il ne permet pas la visualisation directe du tractus olfactif. Les opacités ethmoïdales bilatérales associées à des formations polypoïdes au niveau des cavités nasales, des méats et des fentes olfactives sont évocatrices d'une PNS. La PNS est la cause la plus fréquente de dysosmie obstructive et la dysosmie en est un signe majeur. Des polypes bilatéraux et isolés des fentes olfactives doivent faire suspecter un hamartome épithélial respiratoire adénomatoïde (fig. 7.2). En l'absence de polype, la présence d'opacités panethmoïdales peut traduire un état prépolypoïde (ethmoïdite œdémateuse).

Fig7.2

Fig7.2

La recherche d'un foyer infectieux chronique sinusien (comblement plus ou moins complet monosinusien associé à une ostéosclérose pariétale), d'une mycose sinusienne (hétérogénéité du comblement sinusien) et d'un potentiel foyer infectieux dentaire périapical seront systématiques, en particulier en cas de cacosmie. Le caractère unilatéral d'une formation polypoïde nasale ou de la fente olfactive et l'association à des remaniements osseux de la lame criblée et des parois ethmoïdales orientent vers l'existence d'un processus tumoral. Une exploration encéphalique et sinusienne par IRM avec injection de gadolinium complète le bilan TDM nasosinusien lorsqu'un processus tumoral développé en regard de la lame criblée est suspecté (fig. 7.3).

Dans un contexte post-traumatique, l'analyse de l'étage antérieur de la base du crâne et de la lame criblée sur les reconstructions frontales et sagittales sera minutieuse (fig. 7.4).

Fig7.4

Fig7.4

L'imagerie par résonance magnétique

L'IRM S’ouvre dans une nouvelle fenêtre permet une analyse du contenu nasosinusien et du parenchyme cérébral, et l'identification des tractus olfactifs. Elle est préférable si une pathologie tumorale nasosinusienne est suspectée, si l'anosmie est associée à des troubles neurologiques ou visuels ou si l'endoscopie est normale et qu'une origine neurosensorielle est évoquée. La visualisation directe des bulbes et des pédoncules olfactifs en IRM nécessite la réalisation de séquences fast spin écho frontales T2 en coupes fines (2 mm) centrées sur l'étage antérieur de la base. Ces coupes T2 permettent l'évaluation du volume des bulbes olfactifs et de la profondeur des sillons olfactifs. Elles peuvent être complétées par des séquences volumiques à haute résolution et à forte pondération T2 et T1 S’ouvre dans une nouvelle fenêtre localisées sur le tractus olfactif, avec possibilité de reconstructions multiplanaires (fig. 7.1b–f) [4–6]. La compression d'origine tumorale du tractus olfactif siège le plus souvent en regard des filets olfactifs (tumeur ethmoïdale ou sphénoïdale) ou du tractus olfactif intracrânien extracérébral (tumeur méningée ou de la placode olfactive); seule une atteinte bilatérale des voies olfactives peut générer une anosmie. L'étude est multi-plans et multiparamétrique, une analyse du rehaussement lésionnel après injection d'un chélate de gadolinium est nécessaire ; le champ de vue et l'épaisseur des coupes seront adaptés à la localisation tumorale nasosinusienne ou encéphalique. Dans les tumeurs nasosinusiennes, une séquence avec gadolinium explorant l'ensemble de l'encéphale est nécessaire, même si l'extension tumorale semble localisée à la fente olfactive, afin d'éliminer une diffusion tumorale méningée à distance. Pour les tumeurs développées au niveau de l'étage antérieur ou de part et d'autre de la lame criblée, le rehaussement lésionnel, les raccordements méningés et les remodelages osseux peuvent constituer des éléments d'orientation en faveur d'une tumeur méningée bénigne (méningiome olfactif) ou d'une tumeur maligne de la plaque olfactive. Cette distinction peut toutefois être difficile en cas de tumeur volumineuse. Selon leur localisation, des tumeurs gliales cérébrales peuvent être associées à des troubles de l'olfaction, à type d'hyposmie pour les tumeurs développées au niveau de la base du lobe frontal, et d'hallucinations olfactives pour les lésions temporales. L'IRM permet, dans les anosmies congénitales isolées ou syndromiques, la recherche d'une aplasie ou d'une hypoplasie des bulbes et du tractus olfactif ainsi que d'une dysmorphie des sillons olfactifs (fig. 7.5).

Fig7.5

Fig7.5

En pathologie traumatique, en l'absence de lésion osseuse de la lame criblée, une hypoplasie des bulbes olfactifs peut témoigner de lésions des filets olfactifs (phénomène de cisaillement) et être associée à des remaniements postcontusionnels olfactifs et parenchymateux frontaux et temporaux (fig. 7.6).

Vous venez de découvrir un extrait de l'ouvrage Imagerie cervico-faciale  S’ouvre dans une nouvelle fenêtreMassif facial – Sinus Voies aérodigestives supérieures Pathologies cervicales Espaces profonds de la face

© 2022, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Les auteurs

Jean-Claude Ferrié : praticien hospitalier, service d'imagerie médicale, CHU de Poitiers

Xavier Dufour : professeur des universités, chef du service d'ORL et de chirurgie cervico-maxillo-faciale, service d'ORL et de chirurgie cervico-maxillo-faciale, CHU de Poitiers

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Références

[1] Higgins TS, Lane AP. What is the best imaging modality to investigate olfactory dysfunction in the setting of normal endoscopy? Laryngoscope 2014 ; 124:4–5. [2] Bonfils P. Olfaction: from nose to cortex. Bull Acad Natl Med 2014 ; 198:1109–20. [3] Nguyen DT, Rumeau C, Gallet P, Jankowski R. Olfactory exploration: State of the art. Eur Ann Otorhinolaryngol Head Neck Dis 2016; 133:113–8. [4] Leboucq N, Menjot de Champfleur N, Menjot de Champfleur S, Bonafé A. The olfactory system. Diagn Interv Imaging 2013 ; 94:985–91. [5] Duprez TP, Rombaux P. Imaging the olfactory tract (cranial nerve #1). Eur J Radiol 2010 ; 74:288–98. [6] Abolmaali ND, Gudziol V, Hummel T. Pathology of the olfactory nerve. Neuroimaging Clin N Am 2008 ; 18:233–42.