Je réussis le DEAES le TOUT-EN-UN nouveau référentiel 2021
10 août 2022
Par Monique Remillieux
Le manuel de référence pour vos études d'AES (Accompagnant Educatif et Social)
Nous vous invitons à découvrir un extrait de la première partie DF1 : Accompagnement de la personne dans les actes essentiels de la vie quotidienne
UF5 : LA PERSONNE ET SON RAPPORT AU CORPS
plan de l'extrait
A L’intimité
B L’hygiène corporelle et le soin du corps
C Le sens du toucher
A L’intimité
L’intimité est toujours un enjeu dans la relation d’aide : l’AES accompagne dans la proximité, dans les temps clés du quotidien, parfois dans le domicile de la personne, il peut aussi être amené à l’accompagner dans sa toilette… Mais il faut d’abord s’entendre sur ce qu’on appelle l’intimité :
il y a une part de moi que je partage avec les autres, c’est le « moi public » : mes opinions, mes goûts, mon rôle social, etc. ;
il y a une part de moi qui m’est personnelle et que je ne partage qu’avec les personnes que j’autorise à entrer dans cette sphère personnelle : il s’agit de ma nudité, mes sentiments, mes désirs, mes secrets, mes blessures, etc. C’est cette part de moi qu’on nomme « intimité ».
L’accompagnement de l’AES doit permettre aux personnes de constituer des espaces d’intimité et de les préserver.
Le tableau 1.17 montre les différents espaces d’intimité à créer et les moyens à mettre en œuvre ou les questions à se poser pour les préserver.
Tableau 1.17 Le rôle de l’AES pour préserver l’intimité des personnes.
Espaces d’intimité | Rôle de l’AES |
---|---|
La nudité | – Fermer la porte des toilettes – Protéger du regard des autres pendant la douche |
La chambre | – Frapper à la porte – Attendre si possible la réponse – Favoriser la liberté de la personne d’aller et venir dans sa chambre tout en la protégeant de l’intrusion d’autres résidents – Personnaliser la chambre sans imposer de décoration (parce que la maman a donné un poster, on le met dans la chambre suffisamment haut pour qu’il ne l’arrache pas, mais au fond est-ce juste que la famille décide pour l’enfant des décorations de son lieu d’intimité ?) |
Les soins | Se mettre à l’écart pour donner un soin, même anodin (pansement, gouttes dans les yeux) – Ne pas parler devant tous les autres résidents des soins, pathologies et traitements de la personne |
Les relations | – Ne pas infantiliser les relations affectives (« Ils sont mignons tous les deux ! ») – Laisser à la personne la liberté de décider qui elle apprécie et qui elle n’apprécie pas |
B L’hygiène corporelle et le soin du corps
L’hygiène corporelle assure le bien-être et le confort de la personne. L’AES veillera à ce qu’elle soit assurée chaque jour avec le plus grand respect de la personne, et en particulier le respect de sa pudeur. L’AES peut utiliser les actes de soins à la personne comme un support de relation, et la relation comme une aide à la réalisation de ces actes de soins. Enfin, nous soulignerons le rôle important que peut jouer l’AES auprès de la personne lors des soins, pour lui redonner confiance en elle, pour valoriser son image. Nous vous présentons les techniques d’hygiène et de confort sous forme de tableaux afin que vous visualisiez à la fois les différentes étapes des soins et leur globalité.
1 La toilette au lit
La toilette au lit est un accompagnement particulièrement complexe, non pas d’un point de vue technique, mais d’un point de vue humain. En ce qui concerne la technique, le tableau 1.18 montre les différentes étapes à réaliser. Ce qui rend cet accompagnement complexe du point de vue humain, c’est que la marge de participation de la personne à sa toilette est extrêmement réduite et elle peut avoir le sentiment qu’on la lave comme un garagiste laverait une voiture, elle peut avoir le sentiment de n’être plus qu’un « objet de soins ».
Tableau 1.18 La toilette au lit.
Matériel | Précédure |
---|---|
* Matériel d’hygiène : – cuvette ; – eau tiède ; – deux gants de toilette : un pour le haut du corps et un pour le bas (les jambes, pieds et toilette intime) ; – savon liquide de préférence ; – deux serviettes de toilette personnelles ; – crèmes, lotion de toilette. * Matériel en cas de souillure du siège : – papier WC. * Matériel pour le change (si besoin) : – protection ; – vêtements pour l’habillage après la toilette (vêtements choisis par le patient, ou chemise ou pyjama). * Matériel pour les soins annexés à la toilette. * Matériel pour la réfection du lit : – drap ; – alèse ; – taie d’oreiller ; – protection imperméable. * Matériel pour évacuer le linge sale : panier ou sac. * Matériel pour le nettoyage de l’environnement après le soin | 1. Au préalable L’AES doit : se laver les mains avant de commencer le soin ; informer et expliquer le soin à la personne ; s’informer des goûts et habitudes de la personne. 2. La préparation du matériel : installer une chaise au pied du lit (pour recevoir la literie supérieure) ; prévoir une table roulante ou adaptable pour poser le matériel ; préparer le matériel d’hygiène ; faire apprécier, si possible, la température de l’eau à la personne en lui faisant tremper le bout de ses doigts dans la cuvette ; enlever les lunettes, la montre, les prothèses dentaires et auditives (à mettre en sécurité sur la table de nuit). 3. Le déroulement du soin : – poser les couvertures et le drap de dessus sur la chaise au pied du lit ; – déshabiller la personne et la recouvrir d’une serviette pour éviter – le refroidissement ; – glisser une serviette de toilette sous la partie qui va être lavée ; – rassurer la personne (lui rappeler le déroulement du soin). 1er temps : le haut du corps : – laver le corps (avec le gant) en allant du haut vers le bas du corps, en ne découvrant que la partie concernée, dans l’ordre suivant : * les mains et les bras, * le cou, la poitrine, * l’abdomen ; – stimuler l’autonomie (selon les capacités de la personne) ; – rincer et sécher soigneusement pour éviter les irritations, les macérations, les mauvaises odeurs ; – essorer correctement le gant pour qu’il ne coule pas ; – porter un soin particulier au niveau du nombril, des aisselles, sous les seins, pli de l’aine : séchage par tamponnement ; – changer l’eau. 2e temps : le dos et le bas du corps : – tourner la personne sur le côté ; – placer la serviette de toilette contre le dos, laver dans l’ordre : le dos, les jambes, les pieds ; – soutenir la jambe au niveau de la cheville avec la paume de la main ; – bien sécher entre les orteils, car l’humidité favorise les mycoses ; – proposer, après avoir lavé le dos, une friction. 3e temps : la toilette intime Si la personne est souillée de selles, commencer la toilette corporelle par la toilette du siège (utiliser du papier WC et un gant réservé à cet usage). Pour respecter la pudeur de la personne, il faut toujours lui proposer de faire elle-même sa toilette intime. Utiliser le gant du bas. Si elle en est incapable, l’AES y pourvoit. 4e temps : les soins annexés (voir tableau 1.20). 5e temps : la réfection du lit : – avant de refaire le lit, deux cas se présentent : * si la personne est valide : l’asseoir dans un fauteuil, faire le lit, * si la personne est invalide : faire le lit avec l’aide de quelqu’un et réinstaller confortablement la personne ; – respecter le tri du linge sale (sac spécifique). 6e temps : après le soin, communication et transmissions : – solliciter la personne sur son ressenti, être à l’écoute ; – valoriser son image ; – noter vos observations de la peau et toute anomalie éventuelle (rougeur, irritation, coupure) ; – noter aussi le degré d’autonomie (les progrès de la personne) ; – noter le comportement (paroles et attitudes) ; – noter les incidents éventuels et les informations apprises pendant la relation, etc. |
Comme nous l’avons dit précédemment, le rôle de l’AES ne se limite pas à un entretien de l’hygiène de la personne, il prend en compte dans son accompagnement la dimension affective, éducative, sociale et culturelle de la personne. Pour humaniser son accompagnement lors de la toilette au lit d’une personne, l’AES veillera à :
Donner un objectif autre qu’hygiénique à la toilette et à l’habillage. Exemples : – « Madame Bernard, vous allez vous préparer pour accueillir votre fils qui vient vous voir aujourd’hui ? » – « Bruno, tu veux bien te laver et t’habiller pour être élégant pour le repas de ce midi ? » Il y a toujours une raison dans la journée qui peut donner envie de se préparer le matin. Rechercher la raison du jour, c’est prendre en compte la dimension sociale de la personne et de son accompagnement.
Non seulement informer la personne de chaque mobilisation (quand on lui lève le bras, quand on la tourne sur le côté, etc.), mais surtout solliciter son accord et sa participation. Exemples : – « Madame Bernard, je vais vous demander de lever le bras », – « S’il te plaît Bruno, tu peux basculer sur le côté pour nettoyer le dos ? ». Quand bien même c’est vous qui faites le geste, parce que la personne n’en a pas la capacité physique, il faut solliciter sa participation. D’une part, c’est une façon de lui laisser son rôle d’acteur de ce moment de la toilette ; d’autre part, cela permet souvent de réduire la résistance au mouvement qui est automatique si la personne est en position de « subir » le soin.
Être attentif à toute manifestation de douleur ou de mal-être lors de la toilette, mais aussi de contentement. Ces manifestations peuvent être verbales, se voir aux mimiques du visage, ou encore se ressentir dans le tonus (la personne peut se décontracter ou être tendue). Quand l’AES perçoit un signal de cet ordre, il ne doit pas faire « comme si de rien n’était », il est important de poser des mots dessus, c’est ce que l’on appelle « verbaliser ». Exemples : – « Madame Bernard, vous êtes tendue quand je vous déshabille, est-ce que je vous fais mal ? Ou peut-être êtes-vous mal à l’aise qu’un homme vous déshabille ? Si vous voulez, je vais faire attention à ne pas trop vous bouger si ça vous fait mal, et je pose une serviette pour vous couvrir pour que vous soyez plus à l’aise avec moi… » – « Alors Bruno, tu as l’air de bien aimer quand je frotte ton dos ? Ça fait du bien ! »
Préserver au maximum les habitudes de la personne : si elle met du parfum, un collier, une crème hydratante, si le dimanche elle avait l’habitude de s’habiller plus élégamment que les autres jours, si elle met du vernis à ongles, etc. Parfois, la personne n’est plus en mesure de nous parler de ce qu’étaient ses habitudes, le dialogue avec la famille ou avec les collègues qui la connaissent depuis plus longtemps est alors essentiel.
2 L’aide à la douche (tableau 1.19)
Accompagner une personne à la douche en respectant à la fois son intimité, sa dignité, son hygiène et sa sécurité nécessite de l’anticipation et une procédure à la fois rigoureuse et capable de s’adapter à chacun. Le tableau 1.19 récapitule l’ensemble du matériel, des procédures et des points d’attention à avoir lors de cet accompagnement au quotidien.
Matériel | Préocédure |
---|---|
*Matériel d’hygiène : – gant de toilette ; – savon (liquide de préférence) ; – serviette de bain ou peignoir de bain ; – lotion de toilette (personnelle) ; – shampoing (si besoin). * Vêtements pour l’habillage après la toilette : – vêtements choisis par la personne (le matin) ; – pyjama ou chemise (le soir). * Matériel pour les soins annexés (voir tableau 1.20) * Matériel pour le linge sale : – sac ou panier ; – produit de nettoyage. * Matériel de sécurité : tapis de douche antidérapant. | 1. Au préalable L’AES veillera à : – se laver les mains, fermer portes et fenêtres, vérifier la température de la pièce ; – informer et expliquer le soin à la personne ; – s’informer de ses goûts et de ses habitudes. 2. La préparation du matériel : – installer une chaise près de la douche (pour poser le peignoir ou la serviette de bain et/ou les vêtements propres) ; – veiller à la présence du savon et du shampoing à proximité de la main. 3. La préparation de la personne : – faire enlever les lunettes, la montre à la personne ; – l’aider à se déshabiller ; – l’aider à déposer les vêtements sales dans le panier (ou le sac) adapté ; – disposer les vêtements propres à proximité : soit sur la chaise, soit sur une patère ; – faire apprécier à la personne la température de l’eau et le débit de la douche et respecter son avis. 4. La douche : – aider la personne à entrer dans la cabine ; – l’aider (ou l’assister) au cours du soin ; – la stimuler à se laver seule (selon ses capacités et son désir) ; – lui conseiller de se laver en deux temps : * 1ertemps : le haut du corps, * 2etemps : le dos et le bas du corps ; – lui conseiller de bien nettoyer dans les plis et veiller à ce que le rinçage soit efficace (prévention des irritations) ; – proposer le peignoir (ou la serviette de bain) à la personne ; – l’aider à se sécher (si besoin) ; – lui proposer une friction ; – solliciter son appréciation sur le déroulement du soin, écouter ses remarques et ses souhaits (température de l’eau, de la pièce, matériel utilisé, etc.) ; – observer l’état cutané de la personne (rougeur, irritations ?) 5. La fin du soin : – l’aider aux « soins annexés à la toilette » (voir tableau 1.20 : toilette du visage, lavage des dents, etc.) ; – l’aider à s’habiller (voir chapitre 1, UF5, B, 4. L’habillage). 6. Après le soin : – veiller à raccompagner la personne ; – nettoyer et ranger le matériel ; – aérer la salle de bains ; – évacuer le linge sale ; – se laver les mains ; – faire les transmissions. |
3 Les soins annexés à la toilette corporelle
Les soins annexés à la toilette corporelle complètent celle-ci et apportent bien-être et confort à la personne. Ces soins englobent la toilette du visage, l’entretien des ongles, le maquillage, le rasage, les soins des dents, etc. Nous sélectionnons ci-après quatre soins (tableau 1.20).
Tableau 1.20 Les soins annexés à la toilette corporelle.
Matériel | Procédure |
---|---|
– Serviette – Compresse – Lait de toilette ou savon | 1. La toilette du visage : – se laver les mains ; – placer une serviette sous la tête de la personne ; – nettoyer à l’eau claire les yeux, souvent avec une compresse humide (dans le sens propre-sale) ; – nettoyer les ailes du nez, les coins de la bouche. |
– Serviette de protection – Mouchoirs en papier – Brosse à dents, dentifrice – Gobelet d’eau tiède – Récipient pour cracher | 2. Le lavage des dents : – installer la personne en position assise ; – mettre la serviette autour du cou ; – mettre le matériel à la disposition de la personne (respecter ses habitudes) et l’assister si nécessaire ; – ou réaliser le soin de la façon suivante : *pour les dents de devant: brosser de la gencive vers la dent, *pour les dents sur le côté: effectuer des mouvements circulaires ; – faire rincer la bouche à l’eau claire ; – maintenir le récipient sous le menton pour qu’elle puisse cracher ; – essuyer le pourtour de la bouche ; – réinstaller confortablement la personne ; – laver et ranger le matériel ; – se laver les mains ; – observer l’état bucco-dentaire de la personne, l’état des gencives (douloureuses ?) et le signaler. |
– Brosse à dents – Produit nettoyant pour appareil dentaire + bol – Serviette de toilette, mouchoirs en papier – Solution dentifrice – Crachoir | 3. L’entretien des appareils dentaires Les appareils dentaires doivent être entretenus biquotidiennement, comme les dents, car ils peuvent être un support bactérien. Attention, ils sont très fragiles : ne pas les faire tomber et veiller à les mettre dans un récipient propre, identifié. |
– Ciseaux ou coupe-ongles – Limes – Brosse et savon – Serviettes ou torchon – Cuvette d’eau chaude | 4. L’entretien des ongles : – couper les ongles des doigts en amande et ceux des orteils au carré ; – faire tremper les ongles quinze minutes dans l’eau chaude s’ils sont très durs ; – brosser les ongles à l’eau savonneuse ; – limer les ongles, si nécessaire ; – éduquer la personne aux soins d’hygiène, lui en expliquer l’intérêt ; – laver et ranger le matériel, si nécessaire. |
Cahier de transmissions | 5. Les transmissions Signaler tout problème éventuel (ongles incarnés ou trop durs) à la (au) responsable ou à la famille qui éventuellement demandera l’intervention d’un(e) pédicure. |
Mme D. (84 ans)
Madeleine (stagiaire AES en EHPAD) aide le personnel à assurer les soins d’hygiène corporelle de Mme D. (personne alitée de 84 ans). Elle constate que Mme D. attend avec impatience ce moment de la journée. C’est pour elle un rare moment d’échange dont elle a particulièrement besoin. Madeleine s’informe de la santé et du ressenti de la personne et sait s’adapter à ses envies en lui proposant un petit massage et une friction à l’eau de Cologne qui font dire à Mme D. : « Je me sens beaucoup mieux. » Madeleine l’aide également à choisir ses vêtements en valorisant son image. Mme D., qui est une personne très coquette, y est très sensible.
Remarque
Cette situation illustre les nombreux intérêts de la toilette corporelle pour les personnes âgées. Celle-ci est bien plus qu’un soin d’hygiène et de confort. C’est l’occasion pour la personne d’échanger avec le personnel de soins.
Ici, on voit les qualités relationnelles de la stagiaire. Elle répond non seulement au besoin d’hygiène et au besoin relationnel, mais elle sait aussi adapter son action au besoin individuel de la personne. À travers des attentions spécifiques, elle sait valoriser l’image de la personne. Cette démarche est particulièrement importante lorsqu’on accompagne les personnes âgées ou présentant un handicap.
4 L’habillage
Pour tout individu, pouvoir « choisir ses vêtements et s’habiller » est un acte d’affirmation de soi. Il est à encourager pour toutes les personnes aidées (tableau 1.21). L’habillage (comme la toilette) vient convoquer deux notions importantes à connaître et à distinguer pour l’AES : le schéma corporel et l’image de soi (ou « image du corps »). Le schéma corporel est la représentation interne de mon corps. Il comprend plusieurs composantes :
la place qu’occupe mon corps dans l’espace. Un schéma corporel mal développé peut provoquer de la maladresse : estimant mal la hauteur de son corps ou sa largeur, l’individu se cogne facilement aux meubles et aux portes ; estimant de manière approximative la longueur de son bras, il peut faire tomber son verre en essayant de le poser sur la table ou renverser un objet qui était sur cette même table, etc. ;
la place de chacune des parties de mon corps. Cette composante est essentielle pour identifier l’origine d’une douleur, par exemple ;
la perception de mon corps comme un tout unifié. Des personnes atteintes de psychoses peuvent percevoir leur corps de manière éclatée dans l’espace, certaines personnes peuvent également ressentir certaines parties de leur corps comme « étrangères » et menaçantes (on appelle cela de la dysmorphophobie). Ce que l’on appelle la souffrance du membre fantôme8 chez les personnes ayant subi une amputation est également une difficulté de l’organisme à reconfigurer son schéma corporel pour intégrer la disparition du membre amputé.
8. Le syndrome du membre fantôme est le fait de continuer à avoir mal ou à ressentir des démangeaisons dans la partie du corps qui a été amputée.
Tableau 1.21 L’aide à l’habillage.
Matériel | Procédure |
---|---|
– Vêtements propres, adaptés : * à la température ambiante ; * aux activités ; * aux goûts de la personne. – Peigne ou brosse. – Miroir. | 1. Au préalable L’AES veillera à : – solliciter la personne pour le choix des vêtements ; – convenir avec elle de l’heure ou du moment de l’habillage (après la toilette généralement) et préparer les vêtements ; – contrôler la température de la chambre et se laver les mains. 2. Au cours du soin, le protocole et les précautions : – faire asseoir la personne, l’observer, écouter ses remarques ; – respecter sa pudeur, la découvrir le moins possible ; – aider la personne à se déshabiller ; – faire passer la tête puis les bras l’un après l’autre ; – agir en douceur, parler avec la personne au cours du soin ; – l’aider à se recoiffer ; – en cas de handicap particulier : * si le bras est handicapé, commencer par déshabiller le bras valide puis rhabiller le bras handicapé en premier, * si la personne est inconsciente (ou ne peut pas s’asseoir), la tourner sur le côté, dégager le dos et l’habiller en évitant de laisser des plis. 3. Après le soin a. L’ordre : – mettre de l’ordre dans la chambre de la personne et dans le placard à vêtements ; – toujours l’associer verbalement à son action. b. Le relationnel : – stimuler sa capacité à organiser sa garde-robe ; – vérifier l’état des vêtements afin de réajuster avec la famille (si besoin) ; – valoriser l’image de la personne en lui proposant un miroir, en la complimentant sur sa tenue (que vous appréciez et que d’autres personnes sauront également apprécier…) ; – parler avec elle du choix des vêtements, de l’intérêt des vêtements faciles à enfiler, etc. |
Cahier ou classeur des transmissions | c. Les transmissions Prendre en compte ses remarques, ses demandes et transmettre si nécessaire à la famille ou à l’équipe. |
Ce schéma corporel se construit tout au long du développement de l’enfant. Le test du dessin du bonhomme permet de vérifier l’évolution de cette construction (figure 1.18). Quand un enfant a subi un traumatisme ou un autre événement qui entrave son développement, il peut arriver que son dessin du bonhomme soit altéré ; on peut alors voir que la perception du corps n’est pas unifiée, les membres et la tête ne sont pas reliés au tronc.
Fig. 1.18 L’évolution du bonhomme selon Philippe Greig. © Greig P. L’enfant et son dessin : naissance de l’art et de l’écriture. Toulouse : Érès ; 2003. p. 11.
L’image de soi (ou image du corps) désigne la représentation qu’on a de soi, d’un point de vie affectif : se trouve-t-on beau, laid, gros, mince, grand, petit ? Cette image détermine également les parties de notre corps qui vont nous complexer.
Cette représentation évolue tout au long de notre vie, contrairement au schéma corporel qui a du mal à s’adapter aux changements de notre corps ; tout changement a un impact fort sur l’image de soi. Ainsi, une personne ayant subi une amputation de la main continuera à ressentir sa main par défaut d’adaptation de son schéma corporel, mais elle se sentira diminuée par cette amputation et aura des difficultés à accepter le regard des autres parce que son image de soi aura été perturbée. Sans aller jusqu’à ces cas extrêmes, un changement de coiffure, une séance de maquillage peuvent également avoir un impact sur notre image de soi, positif cette fois-ci.
C Le sens du toucher
L’AES est souvent amené à pratiquer un accompagnement où le toucher, en complément de la parole, est un outil de communication de première importance. Notamment quand il accompagne des personnes très déficitaires, avec un Alzheimer avancé ou polyhandicapées, le toucher devient la principale modalité d’entrée en relation avec la personne.
1 Le moi-peau
Toucher et être touché sont indispensables au développement de l’être humain dès la naissance (des chercheurs ont même montré que les bisous et câlins facilitaient le développement du cerveau de l’enfant). La peau est la première interface avec le monde, elle fournit des informations sur notre personnalité et notre santé. Le psychanalyste Didier Anzieu9 affirme ainsi que la peau est un élément constitutif du moi, la peau porte quelque chose de « qui je suis ».
9. Anzieu D. Le Moi-peau, Paris: Dunod; 1995.
À ce titre, il attribue huit fonctions à ce « moi-peau » :
la fonction de maintenance du psychisme. Cette fonction est liée à ce que Winnicott a nommé le holding (voir chapitre 1, DF 1 : Accompagnement de la personne dans les actes essentiels de la vie quotidienne), la façon dont la mère porte l’enfant, la façon dont elle soutient le corps du bébé. La fonction psychique de maintenance se développe en intériorisant cette façon de porter. Tout comme la peau soutient le squelette et les muscles de l’individu, à un niveau symbolique, elle soutient son psychisme, elle lui permet de se « tenir droit », de « ne pas s’effondrer ». Quand cette fonction est défaillante, alors la personne a besoin de renforcer la maintenance de son psychisme par des moyens psychiques (le surinvestissement des règles, des principes, etc.) ou physiques (accumuler les couches de vêtements, par exemple) ;
la fonction de contenance. Cette fonction est principalement liée à ce que Winnicott a nommé le handling (voir chapitre 1, DF 1 : Accompagnement de la personne dans les actes essentiels de la vie quotidienne), c’est-à-dire la façon dont le bébé a été touché. Ce handling des premiers mois permet au bébé de développer la sensation que sa peau est comme un « sac » qui enveloppe et contient le moi psychique. Quand cette fonction est défaillante, alors le vêtement peut devenir une seconde peau et le fait de devoir se changer provoque alors des angoisses intenses ;
la fonction de pare-excitation, de protection. D’un point de vue physique, la peau protège la couche sensible de l’épiderme ; d’un point de vue psychique, le moi-peau assure cette même fonction de protéger le moi psychique des agressions extérieures. Si cette fonction est trop faiblement assurée par le moi-peau, l’expression populaire « avoir les nerfs à fleur de peau » rend bien compte de ce qui se produit pour la personne : toute agression extérieure, même minime, l’affecte. En revanche, un moi-peau qui protège trop ne laisse passer ni les agressions ni les gratifications (ce qui est bon pour lui). On parle alors de personnes qui se sont construit « une carapace » ;
la fonction d’ individuation du soi. La surface de la peau sépare le corps du monde extérieur. De même, le moi-peau crée une frontière stable entre ce qui est moi et ce qui n’est pas moi. C’est ce qui va permettre le sentiment d’être unique et de ne pas me mélanger à l’autre. Une défaillance de cette fonction se traduira par la fusion relationnelle (ne faire qu’un avec l’autre) ou au contraire par une impossibilité d’entrer en contact avec l’autre parce que la personne remplace la frontière par une zone tampon qui le sépare du monde extérieur ;
la fonction d’ intersensorialité. La peau permet de relier entre eux les différents organes des sens. Le moi-peau permet aussi de relier les sensations de différentes natures et de faire un lien entre elles. Ce fond commun permet de donner un sens partagé à toutes les sensations réunies (ex. : quand on me pose la main sur l’épaule, je vais ressentir une émotion agréable si mes autres sens me permettent d’identifier qui me touche et que je l’accepte, alors que si je n’ai aucune idée de qui pose cette main sur mon épaule, c’est un sentiment plus angoissant qui va m’envahir). Si cette fonction fait défaut, c’est l’angoisse de morcellement, avec le fantasme que chaque organe peut fonctionner pour lui-même, de façon anarchique ;
la fonction de soutien de l’excitation sexuelle. Le moi-peau est une enveloppe d’excitation sexuelle globale. Dans le cas d’un développement normal, sur cette surface, vont se distinguer des zones clés, les zones érogènes qui seront localisées ;
la fonction de recharge libidinale du fonctionnement psychique. Quand elle reçoit des émotions positives (plaisir) ou négatives (angoisse, colère), la personne reçoit une énergie interne (positive ou négative, encore une fois). Le moi-peau assure la répartition de cette énergie dans les différents systèmes psychiques : le moi (ce dont j’ai conscience et que je peux nommer), le ça (mes réactions instinctuelles et inconscientes) et le surmoi (mes obligations et interdits que je respecte sans forcément y prêter attention). Cette répartition doit permettre le maintien de la tension énergétique interne. Les angoisses produites en cas de raté sont la peur, l’explosion psychique en cas de surcharge (type épilepsie) ou l’angoisse du nirvana, de me dissoudre dans un grand tout (plus de désirs ni de tensions) ;
la fonction d’ inscription psychique des traces sensorielles (figure 1.19). La peau permet d’avoir des informations sur le monde extérieur par le sens du toucher, d’en garder mémoire (on se souvient de la sensation de toucher une matière, même en dehors de cette sensation) et parfois d’en garder trace (rougeur, brûlure, plaie, cicatrice, etc.). Le moi-peau remplit aussi une fonction d’inscription de ces traces, des sensations vers le psychisme. Quand cette fonction est défaillante, le rapport s’inverse et la peau devient le lieu d’inscription physique des traces psychiques. Ainsi se crée une perméabilité entre les mondes psychique et physique, involontaire (ex. : le stress peut se manifester par de l’eczéma ou du psoriasis) ou volontaire (ex. : des scarifications, tatouages ou piercings), comme pour mieux conserver et/ou montrer des cicatrices, des traces de vie, des ébauches de signification, des appartenances culturelles ou raciales.
Fig. 1.19 La fonction d’inscription des traces psychiques dans le physique.
Rôle de l’AES
Le moi-peau se construit dans les premières années de la vie, mais il n’est jamais figé. Des blessures, parce qu’elles marquent durablement la peau, vont avoir un impact sur l’une ou l’autre des fonctions du moi-peau. De même, le vieillissement de la peau va avoir des conséquences sur l’évolution du moi-peau. En effet, la peau perdant de sa souplesse, le sens du toucher est affecté et toutes les fonctions du moi-peau s’en retrouvent fragilisées. De ce fait, les soins de peau de type crèmes hydratantes ne sont pas seulement un luxe ou un confort, mais représentent des soins essentiels pour le bien-être psychique des personnes que l’AES accompagne.
De ce fait, l’AES doit : ◗ ne pas oublier d’appliquer des crèmes après la toilette si la personne en a l’habitude, et de réapprovisionner ses réserves de toilette en crème quand le pot se termine ; ◗ observer l’état de la peau du visage, des pieds et des mains et toujours proposer de mettre de la crème hydratante si la peau paraît sèche ; ◗ proposer de manière systématique de la crème sur le visage quand les températures sont basses ; ◗ protéger la peau du soleil à l’aide de crème solaire en été.
2 Le toucher relationnel10
10. Pour plus d’informations sur ce sujet, on peut lire avec intérêt le livre de Carine Blanchon, Le Toucher relationnel au cœur des soins S’ouvre dans une nouvelle fenêtre. Issy-les-Moulineaux: Elsevier Masson; 2014.
Dans le métier d’AES, la compétence professionnelle est nécessaire, mais tout autant que la présence, les gestes chaleureux, les marques d’attention, la disponibilité et les gestes de tendresse. Cette dernière sera, dans bien des cas, non pas un luxe mais ce qui apportera à la personne accompagnée l’énergie nécessaire pour mieux lutter contre ses angoisses, sa maladie et sa souffrance. Pour commencer, il est également important que l’AES développe sa capacité d’empathie, c’est-à-dire sa capacité à comprendre ce que l’autre est en train de vivre, afin d’être capable de prendre du recul par rapport à ses préoccupations personnelles et laisser de côté son cadre de référence habituel pour intégrer celui de l’autre afin de trouver la bonne place dans la relation.
Pour initier le toucher, il faut d’abord prendre contact par les yeux et/ou la parole. Nous avons évoqué précédemment que le toucher avait besoin d’être mis en relation avec les autres sens pour ne pas être angoissant. Ensuite, le toucher relationnel peut passer par le contact de la main et le massage de cette main, doucement, sans appuyer trop fort et sans rompre ce contact. Il faut ressentir ce qui se passe en nous tout en étant à l’écoute de ce qui se passe chez la personne que nous massons. Il faut également s’adapter à chaque personne, à la pression qu’elle semble apprécier (celle qui lui permet de détendre les muscles de sa main progressivement). N’oublions pas que chaque personne est unique et que son ressenti sera donc lui aussi unique. Ce toucher relationnel peut également avoir lieu au cours du soin, lors de la toilette par exemple. Il s’agit alors de prendre une minute ou deux supplémentaires (pas plus) pour laver le dos, la tête ou les pieds avec nos mains (le toucher au travers d’un gant n’est pas relationnel) en se laissant guider par ce que la personne accompagnée nous montre de son ressenti (détente musculaire, crispation, etc.) et en n’ayant à l’esprit que l’intention de détendre, d’apporter une sensation agréable. Le toucher relationnel est un échange ; il faut rester réceptif, ne pas chercher à imposer quoi que ce soit. Le contact doit être doux et respectueux. On masse avec toute la main, le corps accompagnant chaque mouvement, chaque geste. Les deux ou trois minutes supplémentaires que nous aura demandées ce toucher ne seront pas du temps perdu. Bien au contraire, car la détente et le calme que le massage aura procurés à la personne ne feront qu’améliorer la relation et la communication qui s’ensuivront dans la prise en charge quotidienne. Il existe des formations au toucher relationnel qui permettent de mieux maîtriser cette approche, mais il est néanmoins possible à chacun de s’approprier la philosophie générale de ce soin : proposer un contact doux par le toucher, de peau à peau, pour procurer de l’apaisement et prendre ainsi soin de notre relation mutuelle.
Situation
Mme Bouchard est une personne accueillie en EHPAD atteinte de la maladie d’Alzheimer. Au moment de la toilette, que celle-ci se fasse au lavabo ou à la douche, Mme Bouchard devient agressive, elle insulte, frappe celui qui l’accompagne et se débat violemment. Son accompagnement du matin est très long et pénible, à la fois pour elle et pour les soignants. Gustave, AES travaillant dans la structure, revient d’une formation au toucher sensoriel. Il décide d’expérimenter ce qu’il a appris avec Mme Bouchard. Il vient la voir dans sa chambre, celle-ci commence à s’agiter pour s’opposer à aller se laver. Gustave prend d’abord le temps de croiser son regard pour pouvoir lui dire bonjour. Méfiante, elle répond à son bonjour mais reste sur le qui-vive. Gustave s’assoit au bord du lit après lui avoir demandé la permission et lui tend la main. La dame accepte de prendre sa main. Doucement, Gustave lui masse la main. La main de Mme Bouchard est crispée, mais elle se détend peu à peu. L’AES lui propose alors de mettre de la crème sur sa main, car sa peau est sèche. Mme Bouchard ne parle plus, mais elle ne retire pas sa main, ce que Gustave interprète comme un accord. Elle semble apprécier ce soin. Ensuite, il lui propose de faire de même avec ses pieds. Elle continue d’accepter et de se détendre. Il lui demande enfin si elle veut s’approcher du lavabo pour faire sa toilette, Mme Bouchard se laisse faire. Et la toilette (comme l’habillage) se passe dans le calme. Cependant, les collègues de Gustave lui reprochent d’avoir pris encore plus de temps que d’habitude avec Mme Bouchard. Le lendemain matin, Gustave revient. Mme Bouchard est à nouveau sur la défensive, il reprend donc le même rituel : saluer, s’asseoir sur le lit, lui prendre la main et la masser. Mme Bouchard se détend immédiatement et accepte la toilette au lavabo. De ce fait, la toilette est devenue un moment de plaisir pour cette femme. De plus, son accompagnement prend finalement moins de temps qu’auparavantquand il fallait lutter avec elle pour y parvenir
Je réussis le DEAES – Diplôme d’État Accompagnant Éducatif et Social – 2021-2022 © 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Auteurs :
Guillaume Demont, Karolina Mrozik-Demont, Vincent Chaudet, Jacqueline Gassier
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Sous la direction de : Guillaume DEMONT Maître de conférences en sciences de l’éducation, chargé de formation à L’Arche en France, à Paris En collaboration avec : Karolina MROZIK-DEMONT Éducatrice spécialisée, docteure en sciences de l’éducation, formatrice dans un centre de formation aux métiers de l’éducation spécialisée Vincent CHAUDET Éducateur spécialisé, maître de conférences en sciences de l’éducation et de la formation, chercheur coordinateur du service recherche de l’ARIFTS (Association régionale pour l’institut de formation en travail social Pays de la Loire), chargé de formation à l’UCO Avec la participation de : Nicole GALASSO-CHAUDET Professeur des écoles, docteure en sciences de l’éducation, enseignante spécialisée retaitée de l’enseignement primaire au Mans, chargée de formation à l’UCO et à l’ARIFTS Jacqueline GASSIER Puéricultrice DE, professeur de sciences et techniques médico-sociales
Je réussis le DEAES - Diplôme d'État Accompagnant Éducatif et Social DF 1 à DF 5 Le tout-en-un - Nouveau référentiel 2021 Guillaume Demont, Karolina Mrozik-Demont, Vincent Chaudet, Jacqueline Gassier ISBN 9782294779442 4e édition, 2022
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