Fiches ORL, Les fiches ECNi des Collèges
14 novembre 2018
Par Anne-Claire Nonnotte
Nous vous proposons de découvrir la Fiche 8 sur le Vertige des Fiches ORL, S’ouvre dans une nouvelle fenêtrede la nouvelle collection Les fiches ECNi des Collèges
Cette nouvelle collection, en parfaite cohérence avec le programme de DFASM et les ECNi, rassemble l’essentiel des connaissances pour chacune des spécialités, sous forme de fiches synthétiques qui suivent le déroulé des Référentiels des Collèges
Objectifs pédagogiques
Nationaux – Chez un sujet se plaignant de vertige, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents. – Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi des patients.
Collège français des enseignants d'ORL – Savoir rechercher les signes cliniques d'une atteinte vestibulaire. – Connaître les caractéristiques des vertiges périphériques. – Connaître les symptômes de la maladie de Menière, du vertige positionnel paroxystique bénin lors des crises. – Connaître les étiologies des vertiges aigus. – Connaître les examens paracliniques et l'intérêt de l'imagerie en cas de vertige.
1. Physiopathologie
Le vertige se définit comme une illusion de mouvement.
Pour l'équilibre, au repos et en mouvement, il existe trois capteurs : – récepteurs vestibulaires de l'oreille interne (accélérations) ; – récepteurs visuels ; – récepteurs somesthésiques (position du corps et vecteur de gravité).
2. Interrogatoire
L'interrogatoire recherche les éléments suivants :
caractéristiques du vertige : – rotatoire le plus souvent, ou linéaire, ou oscillopsies ; – éliminer les diagnostics différentiels : lipothymies, malaise vagal, hypotension orthostatique, flou visuel, trouble du rythme cardiaque, épilepsie, phobies ; – en cas de perte de connaissance, l'origine n'est pas vestibulaire.
durée : moins de 2 minutes, 15 minutes à 5 heures, plus de 5 heures ;
circonstances d'apparition : – spontané au repos ; – déclenché ou aggravé par le mouvement (changement de position : VPPB, rotation de la tête (canalaire), par un bruit (Tullio) : fistule labyrinthique) ; – déclenché par mouchage, un effort à glotte fermée : fistule labyrinthique ; – déclenché par un freinage, virages : syndrome otolithique.
évolution : – grande crise unique. – plusieurs crises (durée, fréquence) ; – vertige permanent.
symptômes associés : – signes cochléaires (acouphènes, hypoacousie) ; – troubles neurovégétatifs ; – céphalées, cervicalgies ; – sonophobie, photophobie, fourmis au visage (migraine ?) ; – troubles sensitivomoteurs, diplopie, trouble de l'acuité visuelle (SEP ?) ; – impact sur la vie quotidienne, la profession.
antécédents : otologiques (chirurgie, VPPB), vasculaires, traumatiques, neurologiques, médicamenteux, infectieux.
3. Examen clinique
3.1. Examen des yeux
Recherche de nystagmus spontané
Déviation lente puis phase rapide de rappel : sens = phase de rappel rapide.
À rechercher entre 0 et 30° chez sujet éveillé + lunettes de Frentzel (empêche la fixation oculaire).
Quand périphérique : horizonto-rotatoire, unidirectionnel, inhibé par la fixation oculaire, battement du côté sain.
Quand central : change de direction et de sens en fonction de la position des yeux, n'est pas horizonto-rotatoire mais a une direction pure.
Recherche de nystagmus provoqué
Manoeuvre de Dix et Hallpike pour VPPB.
Signe de la fistule : vertige + nystagmus déclenchés par la mise en pression du CAE = fistule labyrinthique.
Test d'Halmagyi : mouvement impulsionnel de la tête du patient alors qu'il fixe un point précis. Sujet sain : l'oeil ne quitte pas la cible et il n'y a pas de secousse oculaire. Lésion d'un CSC : l'oeil perd sa cible et il existe une secousse de rattrapage.
Head shaking test : secouage oscillatoire de la tête dans le plan horizontal ; si nystagmus à l'arrêt du mouvement, atteinte vestibulaire.
Nystagmus dans le regard excentré avec fixation (
gaze nystagmus
) : atteinte centrale.
Étude de la position et des mouvements oculaires
Étude de l'oculomotricité en faisant suivre un objet des yeux.
Recherche d'une dysmétrie, d'une hypermétrie cérébelleuse.
Poursuites saccadiques (syndrome cérébelleux, déficit oculomoteur).
Skew
deviation : désalignement vertical des yeux (lésion supranucléaire : Wallenberg).
3.2. Étude de la motricité (yeux ouverts et fermés)
Étude station debout : possible ? Stabilité ? (Romberg)
Étude de la marche : déviation ? (Marche en étoile)
Déviations segmentaires (épreuve des index, test de Fukuda).
3.3. Complément d'examen
Otoscopie, examen neurologique, examen cardiovasculaire +++.
3.4. Syndrome vestibulaire périphérique (figure 8.1)
Toutes les déviations segmentaires (index, Romberg, marche en étoile, Fukuda) sont dans le même sens et le nystagmus est de sens opposé = syndrome vestibulaire « harmonieux ».
Signes neurovégétatifs importants (nausées et vomissements).
Nystagmus freiné par la fixation oculaire.
4. Examens complémentaires
Ils sont systématiques dans un bilan de vertige (sauf pour le VPPB et la névrite vestibulaire typiques).
4.1. Audiométrie
Tonale et vocale, tympanométrie et recherche des réflexes stapédiens.
4.2. Vestibulométrie
Vidéonystagmographie (VNG) : enregistrement des nystagmus
Épreuves caloriques – testent séparément la réflectivité des CSC latéraux à basse fréquence : – stimulation (eau chaude) et inhibition (eau froide) dans le CAE des vestibules ; – examen bilatéral et comparatif des réponses des deux CSC latéraux sous la forme de nystagmus (diagramme de Freyss).
Épreuves rotatoires – testent en même temps les deux CSC latéraux : – rotation sur fauteuil de 180° en 9 secondes dans les deux sens ; – sujet normal : nystagmus pendant la rotation, qui s'arrête à l'arrêt du fauteuil ; – vestibule atteint : diminution du nystagmus pendant la rotation, et nystagmus à l'arrêt de la rotation.
Étude de l'oculomotricité : poursuite de cibles du regard.
Video head impulse test (VHIT)
Analyse des mouvements oculaires pendant la manoeuvre d'Halmagyi.
Teste les 6 canaux à haute fréquence.
Verticale visuelle subjective (VVS) et potentiels évoqués otolithiques (PEO) – fonction otolithique
VVS : placer le patient devant une barre lumineuse en position verticale. Mesure la déviation par rapport à la verticale réelle (normale < 2,5°).
PEO : mesure l'activité du muscle sternocléidomastoïdien en réponse à une stimulation sonore stimulant le saccule (voie vestibulospinale).
4.3. Imagerie
IRM cérébrale, des rochers et des CAI avec et sans injection de produit de contraste.
Recherche : schwannome vestibulaire, méningiome de l'angle pontocérébelleux, névrite vestibulaire ou lésion des voies longues ou du cervelet.
Tout vertige doit faire réaliser une IRM en dehors de la crise typique de VPPB ou d'une crise unique de névrite vestibulaire.
TDM des rochers : étudie surtout l'oreille interne (fistule labyrinthique, traumatisme du rocher).
5. Orientation diagnostique
VPPB : – canalo- ou cupulo-lithiases (débris otoconies) dans les CSC stimulant l'utricule lors des mouvements (surtout CSC postérieurs) – jamais de signe auditif ou neurologique associé ; – vertiges rotatoires intenses, brefs et répétés au changement de position ou lors des mouvements de la tête ; – diagnostic : manoeuvre de Dix et Hallpike ; – pas d'examen complémentaire si typique ; – traitement : manoeuvre libératoire de Sémont ou d'Epley, ou manoeuvres d'habituation ; – récidives fréquentes.
Maladie de Menière : – hydrops endolymphatique uni- ou bilatéral (avec l'évolution) ; – triade : vertiges rotatoires, hypoacousie, acouphènes plus ou moins plénitude d'oreille. En cas de chute type drop attack : crise de Tumarkin ; – évolution par crises (permet de porter le diagnostic), avec au début une récupération auditive entre les crises puis surdité évolutive ; – bilan : audiométrie, tympanométrie et réflexes stapédiens, VNG, PEO, IRM injectée ; – traitement de fond : limiter sel, excitants, alcool ; prise en charge de l'anxiété ; bétahistine ; diurétiques ; traitement osmotique (glycérol). En cas d'échec et en fonction de l'audition : injection de gentamycine, décompression du sac endolymphatique, neuro_ tomie vestibulaire, destruction labyrinthique.
Névrite vestibulaire : – atteinte virale du nerf vestibulaire ; – grand syndrome vestibulaire périphérique, crise unique sans signes auditifs ; – pas d'examen complémentaire si typique ; – pas de traitement spécifique : traitement de la crise, mobilisation précoce, rééducation vestibulaire (compensation).
Migraine vestibulaire : – vertiges plusieurs heures, plus ou moins sonophobie, photophobie, céphalées + prodromes ; – antécédents de migraines.
Fistule labyrinthique (post-traumatique, post-chirurgicale).
Neurinome de l'acoustique (schwannome vestibulaire).
Labyrinthite (post-otite moyenne aiguë).
Cause non ORL : SEP, syndrome de Wallenberg, etc.
6. Traitement symptomatique de la crise non spécifique
Hospitalisation en cas de station debout impossible et vomissements.
Repos au lit sans stimulations visuelles pendant la crise, puis mobilisation dès que possible.
Anti-vertigineux IV : acétyl-leucine (Tanganil®).
Anti-émétiques IV.
7. Rééducation vestibulaire
Objectif : compensation par un autre système vestibulaire et d'autres afférences (visuelles et proprioceptives).
La rééducation doit être précoce, réalisée par un kinésithérapeute après un bilan.
En l'absence de vestibuloplégique.
Se référer également aux items 118, 147, 330.
Questions isolées
QI 1 Quels sont parmi les éléments suivants ceux qui codent pour les mouvements rotatoires de la tête ?
A - Canal semi-circulaire latéral B - Canal semi-circulaire postérieur C - Canal semi-circulaire supérieur D - Utricule E - Saccule
QI 2 À propos du système vestibulaire, quelles sont les propositions exactes ?
A - Le système d'équilibre repose sur trois capteurs périphériques : visuel, vestibulaire et proprioceptif B - Le poids des informations visuelles, proprioceptives et vestibulaires est identique C - En cas de déficit vestibulaire unilatéral, c'est la discordance avec informations fournies par les autres capteurs de l'équilibre qui crée la sensation de vertige D - Le système de l'équilibre est doué de compensation E - Dans un syndrome vestibulaire, le nystagmus est lié à la perturbation du réflexe vestibulospinal
QI 3 Dans un syndrome vestibulaire harmonieux déficitaire droit, quelles réponses sont exactes ?
A - Des déviations (index, Fukuda, marche en étoile) qui se font dans le même sens que le nystagmus B - Des déviations segmentaires qui se font vers la droite C - Un nystagmus droit D - Un nystagmus gauche E - Un nystagmus droit sur l'oeil droit et gauche sur l'oeil gauche
QI 4 À propos du nystagmus dans le bilan d'un vertige, quelles sont les propositions exactes ?
A - Il peut être provoqué par une manoeuvre de Dix et Hallpike B - Il se recherche toujours en demandant au patient de fixer un point fixe C - S'il est déclenché par la mise en pression du conduit auditif, il faut évoquer une fistule labyrinthique D - Dans le cas d'un vertige périphérique, il bat vers la droite dans le regard vers la droite et vers la gauche dans le regard vers la gauche E - Il doit être recherché dans le regard entre 0 et 30°
QI 5 À propos des vertiges paroxystiques positionnels bénins :
A - Ils concernent le plus souvent le canal semicirculaire latéral B - Ils s'associent volontiers à une hypoacousie modérée et transitoire du côté du canal atteint C - Ils imposent la réalisation précoce d'une IRM D - Ils peuvent être traités par une manoeuvre libératoire de Semont en fonction du canal atteint E - Ils entraînent des vertiges brefs déclenchés par les changements de position ou les mouvements de la tête
QI 6 Chez un patient qui a présenté une névrite vestibulaire droite, avec aréflexie vestibulaire droite complète, quels sont les facteurs qui vont favoriser la compensation centrale et la disparition des troubles de l'équilibre ?
A - La réalisation précoce d'une kinésithérapie vestibulaire B - Le lever précoce et un retour à la marche rapide C - Le repos au lit dans le noir pendant quelques jours D - La prise de Tanganil® (vestibuloplégique central) E - Le fait qu'il s'agisse d'un sujet jeune et sportif
QI 7 Dans une maladie de Menière, quelles réponses sont exactes ?
A - Le diagnostic est orienté par la présence d'une triade symptomatique associant surdité, vertiges et acouphènes B - La réalisation d'une IRM est obligatoire même si la symptomatologie est typique afin d'éliminer d'autres diagnostics C - La physiopathologie de cette maladie fait intervenir essentiellement un processus auto-immun parfaitement connu D - Les crises de vertiges peuvent se répéter mais durent en général moins de 10 minutes E - En cas de crises violentes avec chute que l'on rapproche des drop attacks, on parle de maladie de Menière de type Tumarkin.
QI 8 Quels diagnostics peuvent être remis en cause devant un vertige s'il existe une surdité associée ?
A - Vertige paroxystique positionnel bénin (VPPB) B - Maladie de Menière C - Névrite vestibulaire D - Neurinome de l'acoustique E - Labyrinthite infectieuse
QI 9 Un patient se présente aux urgences pour un épisode de vertiges rotatoires apparus le matin même. La crise dure depuis plusieurs heures ; elle s'accompagne d'acouphènes à type de sifflement du côté gauche. Le patient se plaint d'une baisse d'audition légère apparue en même temps que les vertiges. L'otoscopie est normale des deux côtés. Il dit avoir déjà présenté deux autres crises identiques il y a 2 ans. Devant ce tableau clinique et les antécédents, quels diagnostics pouvez-vous éliminer ?
A - Neurinome de l'acoustique gauche B - Cholestéatome acquis C - Vertige paroxystique positionnel bénin D - Névrite vestibulaire gauche E - Maladie de Menière gauche
QI 10 Dans la Maladie de Menière, parmi les signes suivants, lesquels sont caractéristiques de cette affection ?
A - Acouphènes du côté de la surdité B - Vertige d'origine centrale C - Nystagmus horizonto-rotatoire D - Surdité de transmission E - Plénitude d'oreille
Voir les réponses
QI 1 A B C – L'utricule et le saccule renseignent sur les translations horizontales et verticales.
QI 2 A C D – Le poids des différents capteurs visuel, prioprioceptif et vestibulaire varie d'un sujet à l'autre. Dans un syndrome vestibulaire, le nystagmus est lié à une perturbation du réflexe vestibulo-oculaire. La perturbation du système vestibulospinal entraîne les déviations segmentaires.
QI 3 B D – Dans un syndrome vestibulaire harmonieux périphérique, toutes les déviations se font dans le même sens, et la phase rapide du nystagmus (sens du nystagmus) bat du côté opposé quels que soient l'oeil examiné et la direction du regard.
QI 4 A C E – Il ne faut pas rechercher de nystagmus en faisant fixer un point si on suspecte un syndrome vestibulaire périphérique car, dans ce cas, la fixation oculaire abolit le nystagmus. Dans un syndrome vestibulaire périphérique, le nystagmus bat toujours dans le même sens quelle que soit la position du regard. Si on le recherche au-delà de 30°, on risque de recueillir un nystagmus physiologique du regard excentré.
QI 5 D E – Ils touchent le plus souvent le canal postérieur et n'entraînent jamais d'atteinte auditive. Leur durée est brève. Dans une forme typique, l'IRM n'est pas réalisée au premier épisode.
QI 6 A B E – Les vestibuloplégiques limitent la compensation centrale.
QI 7 A B E – (Réponses exactes.) La principale hypothèse diagnostique est celle d'un hydrops endolymphatique. Les crises vertigineuses sont longues (plusieurs heures). Des vertiges de moins de 10 minutes remettent en cause le diagnostic de maladie de Menière.
QI 8 A C – Pas de difficultés particulières pour cette question.
QI 9 B C D – Le cholestéatome acquis est éliminé par l'otoscopie normale (seule situation de cholestéatome à tympan normal : cholestéatome congénital). Le VPPB donne des vertiges plus brefs sans signes auditifs. La névrite vestibulaire donne aussi un grand syndrome vestibulaire durant plusieurs heures mais sans signes auditifs. Seuls le schwannome vestibulaire et la maladie de Menière associent fréquemment des crises de vertiges et une surdité de perception.
QI 10 A C E – La maladie de Menière associe une surdité de perception pendant la crise et juste au décours de celle-ci, mais qui peut régresser. Elle s'aggrave avec la fréquence des crises et devient une séquelle. Il existe souvent des acouphènes et une sensation de plénitude de l'oreille. Le nystagmus peut être dépisté au cours ou juste au décours de la crise ; il est de type périphérique horizonto-rotatoire.
© 2018, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Vous venez de lire un extrait de l'ouvrage Fiches ORL S’ouvre dans une nouvelle fenêtre de la toute nouvelle collection Les Fiches ECNi des Collèges
Je découvre le livre S’ouvre dans une nouvelle fenêtre
Dans la même collection Les Fiches ECNi des Collèges à paraître en janvier 2019
Fiches Gynécologie-Obstétrique, par le CNGOF (Collège national des gynécologues et obstétriciens français) Fiches Hépato-gastroentérologie-Chirurgie digestive, par la Collégiale des universitaires en hépato-gastro- entérologie (CDU-HGE)