L'infirmier(e) et les soins palliatifs
29 décembre 2020
Par Monique Remillieux
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Plan de l'ouvrage
PARTIE I CONCEPT DES SOINS PALLIATIFS ET SPÉCIFICITÉ INFIRMIÈREPARTIE II APPROCHE CLINIQUE INFIRMIÈRE
liste des chapitres
PARTIE I CONCEPT DES SOINS PALLIATIFS ET SPÉCIFICITÉ INFIRMIÈRE
Chapitre 1 Soins palliatifs : de quoi parle-t-on ?
Chapitre 2 Nature du soin infirmier
Chapitre 3 Face à la mort
Chapitre 4 Ressources infirmières
PARTIE II APPROCHE CLINIQUE INFIRMIÈRE
Chapitre 5 Prendre soin et s’organiser
Chapitre 6 Soigner : objectif confort
Chapitre 7 Structures et dispositifs de proximité
Nous vous invitons à lire un extrait du chapitre 6
Plan du chapitre 6 Soigner : objectif confort
Démarche d’évaluation
Symptômes à évaluer et outils
Le toucher au coeur des soins
Hygiène et bien-être corporel
Déroulement du soin
Alimentation, hydratation (Hérisson et Romejko, 2017b)
Élimination
Sommeil
Respiration
Approches complémentaires des soins
Techniques particulières
Voici la section Alimentation/hydratation
Alimentation/hydratation (Hérisson et Romejko, 2017b)
Introduction
Chez l’être humain, l’absorption de nourriture et d’eau est sous-tendue par une quadruple finalité : nutritionnelle, psychologique, sociale et symbolique. Toutes quatre intriquées, elles doivent rester inséparables dans notre démarche infirmière.
En effet, manger et boire sont des actes élémentaires de la vie quotidienne. Ils répondent à un besoin physiologique. Ils sont actes de plaisir. Ils sont la manifestation universelle et culturelle de l’intimité partagée. Ils symbolisent le lien de la personne à un groupe social donné. Le pain et l’eau ont de tout temps fait l’objet de représentations symboliques.
En fin de vie, l’alimentation doit être investie comme un sujet d’actualité dans nos soins, car elle rappelle à celui que nous soignons qu’il reste bien vivant. Différentes pratiques nutritionnelles se sont succédé au cours des siècles. Dans la tradition hippocratique, une place importante est accordée à l’alimentation : « De tes aliments, tu feras une médecine21. »
Les conceptions médiévales accordent à l’alimentation abondante un rôle protecteur face à la maladie, fortifiant et défendant le corps en le consolidant. Plus tard on recommandera, au contraire, la diète pour ne pas alimenter la maladie, ce qui fera écrire à Balzac : « La répugnance des malades pour aller à l’hôpital vient de ce que le peuple croit qu’on y tue des gens en ne leur donnant pas à manger. » Longtemps « nourrir la personne le malade » sera considéré comme un acte de charité. Au XIXe siècle, l’aliment devient « combustible », « énergie ». On accède à une vision « thermodynamique » de l’homme. Il faut attendre 1904, pour voir des régimes adaptés aux pathologies des patients.
Il est intéressant de citer le journal de l’exposition qui dit :
Les problèmes posés par les malades ne pouvant plus ou refusant de s’alimenter ont suscité au cours du temps des réponses diverses, mais toutes fondées sur un même principe : le malade doit manger. Selon les époques et en fonction des savoirs comme des techniques disponibles, il faudra l’encourager, le persuader ou le forcer.
Nous allons voir comment la démarche palliative fait face à ces comportements encore vivaces.
Se nourrir
Représentations et intentionnalité
Le rapport de nos parents à la nourriture va, dès la naissance, déterminer nos propres représentations et nos comportements futurs. Est-ce un plaisir, une nécessité, une denrée rare (et donc précieuse), une abondance ? Que nous reste-t-il d’une cuisine faite avec amour et mangée avec bonheur en famille, ou à l’inverse, de repas pris en silence, ou seul ? Manger, dans notre société, relève du plaisir et de la convivialité. À l’hôpital, manger relève parfois de la contrainte.
Quelle attention mettons-nous en oeuvre pour tenir compte des différentes dimensions de l’alimentation, et permettre au patient de reconnaître la sensation de plaisir ?
En fin de vie, la nutrition et l’hydratation sont souvent sources de difficultés. Quels signes doivent nous alerter ? Quelles questions pouvons-nous nous poser ? Que veut nous dire le patient par son refus de manger : sa douleur, sa volonté de maîtriser encore un peu la situation, son désir de mourir ? Gardons-nous de conclure trop vite. Restons à son écoute (et/ou à celle de ses proches) : quels sont ses goûts, ses dégoûts, ses habitudes alimentaires, ses désirs, ses angoisses ? Quelle perception a-t-il de son image corporelle ? Mais aussi, quel est pour nous, infirmières, notre rapport à la nourriture ?
Objectifs poursuivis
Le patient présente souvent d’autres symptômes associés : inappétence, anorexie, nausées, vomissements, problèmes de transit, anxiété, goût modifié (par la chimiothérapie et les médicaments), goût amer majoré, mauvais état buccal, etc. L’infirmière évalue l’ensemble de ces symptômes pénibles ainsi que les douleurs, et s’assure de leur soulagement. Une bouche douloureuse et en mauvais état est, en particulier, un obstacle à toute tentative d’alimentation.
Ces différents éléments pris en compte, que pouvons-nous faire face à toute modification du comportement alimentaire ?
La stratégie alimentaire dépend de la stratégie thérapeutique globale. L’état clinique du patient détermine les objectifs : peut-on améliorer le pronostic, éviter les complications, ou s’agit-il seulement d’assurer le confort et le plaisir ? Une réflexion interdisciplinaire est nécessaire pour faire le choix le plus pertinent, à partir des observations, examens cliniques, biologiques, et avant tout, quand cela reste possible, des désirs du patient.
L’aide-soignante et l’infirmière ont un rôle prépondérant dans cette réflexion, étant au plus près des capacités ou difficultés du patient dans la satisfaction de ses envies.
Moyens mis en oeuvre : de l’utopie à l’assiette !
Les proches, lorsqu’ils sont présents, sont d’emblée associés à la démarche. La diététicienne est consultée pour avis, conseils et collaboration. Si ces métiers paramédicaux sont disponibles sur la structure, l’aide de l’orthophoniste et celle de l’ergothérapeute peuvent être appréciables pour compléter l’évaluation des capacités (déglutition, installation, positionnement, textures, matériels favorisants, etc.). Le repas servi à l’hôpital est forcément différent de celui confectionné à la maison.
Imagination et créativité sont nécessaires pour que repas rime avec plaisir et convivialité. Peut-être avons-nous aussi à retrouver du plaisir à faire manger un patient, à partager avec lui un moment important d’échange, voire de simple humanité.
Pour stimuler l’appétit et retrouver le plaisir perdu, l’alimentation est adaptée en quantité et qualité. On peut avoir recours à des préparations froides (si nausées), peu sapides, avec une texture adaptée, normale le plus longtemps possible. Les préparations mixées, moulinées, liquides, semi-liquides ont leur intérêt, sans être systématisées (diminution de certaines saveurs, aggravation de l’état buccal puisqu’il n’y a plus de mastication et donc peu de salivation).
Les régimes stricts ne sont plus de règle. On soigne particulièrement la présentation des repas. On peut oser les couleurs, utiliser une vaisselle agréable à l’oeil, des fines herbes et aromates pour décorer les mets. Ne dit-on pas « que l’on mange d’abord avec les yeux » ?
L’apéritif alcoolisé ou non peut stimuler l’appétit, ainsi qu’un peu de vin au cours des repas. Au besoin, les repas sont fractionnés et complétés par des collations à la demande. Des compléments alimentaires, hyperprotéinés ou hypercaloriques peuvent enrichir l’apport journalier, en regard des objectifs poursuivis. La fréquence de ces apports peut se multiplier dans la journée.
Sortons des horaires habituels pour rythmer les repas en fonction des moments les plus favorables pour le patient, tout en tenant compte des contraintes du service. Sachons utiliser judicieusement les petits réfrigérateurs, les fours à micro-ondes, pour répondre au plus près au désir du patient qui, en pleine journée, émet l’envie de « prendre quelque chose ».
Vécu et rôle de l’entourage
Le moment du repas reste le moment privilégié de la relation, de la continuité du lien, du partage (présence des soignants, des bénévoles, de la famille).
Quelle représentation, quelle implication pour la famille d’assister au repas, d’encourager, ou même de donner à manger à son proche malade ? Quelle inquiétude aussi de s’assurer qu’une alimentation est toujours en cours, comme si se nourrir était l’ultime lien à la vie ! Les proches ont beaucoup de mal à se détacher de cette préoccupation qu’est la nourriture, et leurs interrogations ne manquent pas : « Est-ce qu’il a mangé ? », « Qu’est-ce qu’il a mangé ? », « On ne lui donne plus à manger ? ».
Beaucoup aiment confectionner les plats préférés du patient, et lui permettre ainsi de retrouver une sensation gustative, une émotion oubliée : « Je ne me souvenais pas que c’était si bon ! » Les proches ont alors le sentiment d’être utiles, de faire encore quelque chose qui a du sens.
Lorsque la perte d’appétit puis le refus de manger surviennent, ils sont sources de questionnement et d’angoisse. Il reste difficile d’accepter (et cela vaut aussi pour les soignants) qu’une personne ne s’alimente plus. Une forme d’acharnement à vouloir à tout prix que le patient mange peut s’installer. Le décalage se creuse entre celui pour qui le simple fait de parler, de manger devient une hantise et provoque du dégoût, et ces proches qui, en s’évertuant à le « gaver », fuient la réalité de la mort qui s’impose progressivement à eux, comme cette femme revenue le lendemain du décès de son mari, disant : « Pourtant, il avait mangé sa soupe hier soir. »
Nous avons à soutenir et à accompagner ces familles dans cette perte à vivre autour de la fonction d’alimentation, en accueillant leurs craintes, leurs peurs, leurs questionnements, en étant disponibles pour les écouter, les informer, et leur permettre de rester le plus longtemps possible proches de celui qui meurt.
Dimension éthique
L’alimentation par la bouche est privilégiée autant que faire se peut. Quand le patient ne peut plus s’alimenter normalement, la question du « comment le nourrir » se pose. Que peut-on proposer à cette personne, qui continue à affirmer que « tout va bien », alors que chaque bouchée entraîne une toux insupportable ? Ou bien à celui qui, souffrant de troubles de la déglutition, cherche à être seul pour tenter d’avaler quelque chose ? Enfin, à cet autre qui « s’arrange » pour dormir et éviter ainsi les sollicitations de sa famille qui veut le nourrir ?
L’écoute, l’attention, le dialogue, permettent de mieux comprendre les difficultés, de déculpabiliser le patient, de l’aider à faire face à cette nouvelle situation. La charte de la personne hospitalisée22 précise que l’information donnée doit être accessible et loyale, et que le patient participe aux choix thérapeutiques qui le concernent. C’est donc avant tout avec lui que les choix en matière d’alimentation sont décidés, en lien avec les proches. Chaque décision sera réévaluée dans le temps, en tenant compte de l’état du patient et de son confort, en pesant à chaque fois les inconvénients et les possibles avantages. C’est une question d’alliance thérapeutique (ou contrat) avec le patient. Quel est son souhait ? Qui a pris la décision ? Sait-on ce que le patient en pense ? A-t-il eu l’occasion de s’exprimer ? Où en est-il de la connaissance de son diagnostic et de son devenir ? Quelle influence sur son appétit ?
Dans le processus décisionnel, certains critères sont à prendre en compte : la pathologie, le stade de la maladie, l’état nutritionnel, le taux d’albumine et le PINI ( prognostic inflammatory and nutrional index , indice pronostic nutritionnel) (Reuben et al., 1988 ; Bruera et al., 1992 ). Les stratégies d’alimentation sont nombreuses mais elles doivent toujours être choisies dans un souci de confort du patient et non pas pour alléger la charge de travail d’une équipe ou répondre à la pression d’une famille.
Autres approches nutritionnelles
Alimentation par sonde nasogastrique
Une telle alimentation est envisageable comme une étape, limitée dans le temps, si l’état du patient permet d’espérer une amélioration plus ou moins rapide (avec des objectifs cliniques et biologiques précis), ou si le but est de corriger une carence alimentaire provisoire. La pose de la sonde est négociée avec le patient. Il est notre interlocuteur. Jusqu’au bout, il doit rester « sujet ». L’infirmière peut être le porte-parole du patient s’il a du mal à se faire entendre. Par sa sollicitude, elle peut restituer à celui qui est objet de ses soins, la possibilité d’être sujet parlant. La proportionnalité de ce soin doit être interrogée : intérêts pour le patient, inconvénients subis. Une attention particulière doit être portée aux risques de fausse route existant antérieurement (risque majoré par la permanence de la sonde) et aux possibilités physiques du patient à rester en position assise. La réévaluation de son indication doit être programmée après quelques jours.
Le patient peut continuer à s’alimenter le jour, l’alimentation complémentaire par sonde nasogastrique peut être passée la nuit. Si les objectifs ne sont pas atteints, la sonde est enlevée pour respecter avant tout le confort de la personne soignée.
L’alimentation utilisée est conditionnée en pharmacie. Elle peut être variée avec d’autres liquides : café au lait, boisson au coca, jus de fruits, champagne, etc. Une petite quantité de liquide introduite dans la bouche, et éventuellement recrachée, peut être un vrai plaisir gustatif apprécié par le patient. Ce dernier pourra même faire connaître ses préférences.
Les sondes trop fines se bouchent facilement (surtout avec le passage des médicaments) ; les changer entraîne souffrance et angoisse. La gêne et la douleur locales liées à la sonde deviennent parfois intolérables. Il faut rincer correctement la sonde après chaque utilisation, et la maintenir en place, en protégeant l’aile du nez pour éviter toute escarre.
Si le patient arrache sa sonde, doit-on ou non la reposer ? Que signifie ce geste ? Au cas par cas, les réponses sont envisagées. La contention est une solution difficilement acceptable et pose des problèmes éthiques.
La pose d’une sonde nasogastrique est un geste réfléchi, peu utilisé cependant en fin de vie, les indications restant rares.
Alimentation par gastrostomie
La gastrostomie est une solution intéressante chez les patients atteints d’une maladie évolutive de la sphère digestive haute (cancer ORL ou œsophagien) ( Filbet, 1992 ). Le processus décisionnel est engagé en amont, et non dans l’urgence d’une fin de vie. Les patients qui acceptent un tel geste sont bien informés de leur maladie, et de ce qu’est la gastrostomie. Ils sont entourés et gardent des projets de vie. Il leur faut cependant du temps pour s’exprimer, poser des questions, réfléchir à leur décision. La proposition d’une gastrostomie va être faite, alors que l’équipe soignante a, de son côté, réfléchi à l’utilité de ce geste et aux bénéfices que peut en tirer le patient.
La sonde, dissimulée sous les vêtements permet une grande liberté de mouvements, l’autonomie est préservée, les patients peuvent s’habiller normalement, sortir acheter le journal, ne pas se sentir « différents » au regard des autres. Ils peuvent être éduqués à la manipulation de la sonde, de même que leur entourage.
Voici un exemple de décision de gastrostomie réussie.
Mme P., âgée de 68 ans, entre dans le service pour prise en charge palliative, après récidive d’un carcinome épidermoïde du pharynx. L’évolution tumorale locale empêche toute alimentation orale. Une sonde nasogastrique a été mise en place avant son arrivée. C’est une femme énergique, volontaire, autonome, au courant de son diagnostic. Après des débuts difficiles, elle ne sait plus pourquoi se battre. Elle s’approprie l’espace, investit les lieux et cherche à se créer un environnement familier, ayant besoin de repères, de recréer du connu pour mieux affronter l’inconnu. Mais le moral n’y est pas, elle supporte mal sa sonde et son image corporelle semble en être perturbée. Femme soucieuse de son apparence, elle se néglige et dit en parlant de sa sonde : « C’est pire que la trompe d’un éléphant. » Devant la proposition d’une gastrostomie, elle va manifester une ferme adhésion, et attend avec impatience le jour de l’intervention.
Ce jour arrive, et c’est une nouvelle Mme P. qui revient dans le service. De nouveau soucieuse de son apparence, de son physique, elle joue avec nous un jeu de séduction et se met à rayonner dans tout l’espace de l’USP. À sa demande, elle sort régulièrement les après-midi, et retourne dans son appartement « faire le ménage, arroser les fleurs, faire le tri ». Elle en revient, apportant dans sa chambre mille souvenirs et trésors de sa vie d’avant, et nous fait participer à tout ce qui l’animait. Ainsi, par petites touches successives, Mme P. va réinventer son espace intérieur, et son espace réel, tout en se séparant en douceur de son univers familier. Tous les jours à la même heure, on la trouve installée devant son émission préférée à la télé, La cuisine des mousquetaires . Tant qu’elle le pourra, elle utilisera seule sa sonde de gastrostomie, se préparant des mélanges les plus originaux qui soient. Jusqu’au bout, elle nous aura rendus témoins de sa vie. La gastrostomie a été un élément déterminant pour permettre à Mme P. de réinvestir sa vie, son corps, son « être-sujet ». Une telle décision a donné aux jours qui lui restaient une vraie coloration de vie.
Hydratation en fin de vie
L’hydratation en fin de vie reste sujette à controverse.
« Mourir de soif » est un fantasme très présent chez les soignants comme chez les familles (SFAP/SFGG, 2012). La tendance dans les hôpitaux est trop souvent l’utilisation abusive de l’hydratation. Une bouche sèche ne veut pas forcément dire que le patient est déshydraté. Si la soif est souvent observée comme symptôme gênant en fin de vie, elle peut être soulagée quand la muqueuse buccale est humectée, les soins de bouche minutieux et fréquents, les aérosols et humidificateurs utilisés (voir « Soins de bouche », Chapitre 6 , Soigner : objectif confort, Hygiène et bien-être corporel, Soins de bouche ).
Un patient peut vivre longtemps, plusieurs jours, voire plusieurs semaines, en n’absorbant qu’une quantité de liquide de 500 à 600 mL par jour, cela est suffi sant pour que les reins continuent à fonctionner. L’hydratation per os est donc privilégiée. On utilise les boissons préférées du patient, des glaces, des sorbets, ou de l’eau gélifiée quand il existe des troubles de la déglutition.Les petites cuillères, les tasses à bec ou à découpe nasale, les pailles courtes sont autant de moyens qui facilitent l’absorption.
Comme pour l’alimentation, la stratégie d’hydratation doit tenir compte des objectifs, en fonction de l’évolution de la maladie (voir Chapitre 6 , Soigner : objectif confort, Alimentation, Hydratation, Se nourrir. ). L’observation clinique doit être quotidienne. On apprécie l’état des muqueuses, l’apparence de la peau (son élasticité, sa texture, sa température et sa couleur), la tension des globes oculaires (yeux cernés, globes rentrés dans les orbites), la pression artérielle et le pouls. L’état de conscience est évalué, le type de respiration également, la surveillance urinaire est effectuée.
Le recours aux méthodes d’hydratation parentérale est envisagé lorsque la déshydratation est secondaire à une cause éventuellement modifiable (ex. : excès de diurétiques ou de sédatifs, vomissements répétés, diarrhées ou hypercalcémie). Même en phase terminale, l’hydratation peut être un confort et éviter des complications : surdosage morphinique, syndrome confusionnel, etc.
Si une voie veineuse centrale est déjà posée (chambre implantable, Picc-Line), la voie intraveineuse peut être utilisée mais la voie sous-cutanée reste la plus souvent utilisée (voir Chapitre 6 , Soigner : objectif confort, Techniques particulières, Voie sous-cutanée ).
Quand le pronostic ne peut être amélioré, et les complications évitées, confort et plaisir restent les seuls objectifs.
Selon certains auteurs (Delavois et al., 2008), la sensation de soif diminue à l’approche de la mort. Des données (National Council for Hospice and Specialist Palliative Care Services) suggèrent que le recours aux méthodes d’hydratation n’influence ni la survie, ni le soulagement des symptômes. Un tel recours peut être considéré comme une agression inutile.
Quelles que soient les décisions prises, elles sont le fruit d’une réflexion interdisciplinaire où le patient reste maître, où l’entourage est accompagné, et où, pour tous, la question fondamentale demeure : qu’est-ce qui est le plus important aujourd’hui, pour ce patient, là où il en est, en termes de confort et de qualité de vie ?
Les principes éthiques de proportionnalité et de futilité s’appliquent avec justesse.
Notes
voir les notes
21. Journal de l’exposition « L’appétit vient en mangeant » du 7 novembre 1997 au 26 avril 1998 à l’hôtel Miramion, Paris. Musée de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
22 . Charte de la personne hospitalisée. Ministère des Solidarités et de la Santé, 28/02/2019 (actualisation de la charte du patient hospitalisé de 1995, annexe à la circulaire ministérielle n˚ 9522 du 6 mai 1995).
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L'infirmier(e) et les soins palliatifs © 2021 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Cet ouvrage, rédigé sous l’égide de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), a été coordonné par Chantal Jouteau-Neves et Evelyne Malaquin-Pavan, cadres supérieurs de santé, infirmières spécialistes cliniques, toutes deux impliquées depuis 40 ans dans le développement de l’expertise clinique infirmière et des soins palliatifs. Préface de Cicely Saunders, présidente et fondatrice de l’établissement St. Christopher’s hospital
L'infirmier(e) et les soins palliatifs Prendre soin : éthique et pratiques SFAP, C.Jouteau-Neves, É.Malaquin-Pavan ISBN 9782294771613 6e edition, 2021
Dans la même collection savoir & pratique infirmière
Soins infirmiers et douleurs A.Muller, C.Metzger, M.Schwetta, C.Walter ISBN 9782294769191 5e édition, 2020