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Introduction à la chirurgie plastique

16 décembre 2019

Par Monique Remillieux

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Principes de la chirurgie plastique

V. Duquennoy-Martinot, C. Depoortère

Résumé

La chirurgie plastique n'est pas une discipline d'organe mais une spécialité centrée sur des principes et des moyens. Parmi ces concepts généraux communs, plusieurs nous semblent fondateurs : l'art de tricher, l'art de boucher les trous, le respect de la vascularisation tissulaire, l'art de reconstruire, le souci du détail, le goût pour le beau (qui n'est pas méprisable), la hantise des séquelles, le fonctionnement alternant entre algorithme et créativité. Ces concepts sont détaillés et illustrés par des exemples.

Plan

  • Introduction

  • L'art de tricher

  • L'art de boucher les trous

  • Le respect de la vascularisation tissulaire

  • L'art de reconstruire

  • Le souci du détail

  • Le beau n'est pas méprisable

  • La hantise des séquelles

  • Entre algorithme et créativité

  • Conclusion

Introduction

La chirurgie plastique rassemble la chirurgie esthétique et la chirurgie reconstructrice (CPRE). Le plasticien dispose d'un arsenal thérapeutique exploité à des fins différentes : restaurer une forme/un aspect dit « normal » dans la première et parfaire une forme/un aspect d'emblée « normal » dans la seconde. Pour mieux appréhender cette spécialité, il est nécessaire d'intégrer les limites floues de sa définition. Alors que d'autres spécialités sont définies par l'organe (le cœur, les poumons, etc.) ou la fonction qu'elles soignent (la locomotion, l'audition, etc.), la chirurgie plastique esthétique et reconstructrice n'a pas de limite d'organe ou de fonction. Certains la qualifient de « spécialité des tissus mous non viscéraux » pour faire référence à la peau et aux parties molles dont nous sommes les spécialistes chirurgicaux au même titre que les dermatologues qui en sont les équivalents médicaux. Cependant, cette définition méconnaît la compétence des plasticiens en matière de chirurgie osseuse lors de la couverture des membres ou encore de rhinoplastie ou de tout geste osseux facial. De plus, les frontières avec d'autres spécialités sont minces pour ne pas dire inexistantes. C'est ainsi le cas pour la chirurgie mammaire qui est réalisée tantôt par des gynécologues et/ou sénologues, tantôt par des plasticiens. Ces derniers s'intéressent le plus souvent à la forme, à la plastique au sens commun du terme, alors que les sénologues se préoccupent davantage de la glande et de ses maladies. Cette répartition est bien sûr artificielle et le franchissement de la frontière du territoire de « l'autre » est monnaie courante, et nous vaut quelques querelles entre spécialités.

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Le champ d'action des plasticiens est donc large, il ne se limite pas à un organe, intéresse tous les patients du nourrisson au vieillard, les hommes, les femmes et les genres alternatifs, et concerne la chirurgie programmée et de véritables urgences vitales. À vrai dire, c'est davantage par le choix des méthodes utilisées pour assurer nos soins que nous nous définissons. Notre rôle est très souvent indissociable de la pluridisciplinarité car nous apportons à nos confrères spécialistes d'organes une approche différente, alternative. En effet, en tant que chirurgiens plasticiens, notre objectif est d'utiliser intelligemment un arsenal thérapeutique en perpétuelle évolution à des fins de recouvrement, de comblement ou de reconstruction. Notre compétence réside en nos capacités d'adaptation et notre aptitude à percevoir une situation clinique dans sa globalité ; le but étant de choisir la technique, de la plus simple à la plus complexe, nous permettant d'obtenir le meilleur bénéfice final pour le patient. Cette particularité peut donner à certains l'illusion qu'il suffit d'apprendre les gestes techniques pour devenir plasticien alors qu'il n'en est rien. La technique doit certes être apprise et maîtrisée, mais elle ne peut se suffire à elle-même. Seule l'approche plurifactorielle du terrain du patient, de ses attentes, de l'objectif du traitement et du contexte dans lequel le chirurgien travaille pourront qualifier le plasticien et définir les contours protéiformes de la spécialité. Le mode de pensée « multientrées » du praticien n'est pas le propre de notre spécialité mais il est exacerbé dans notre domaine. Appliquer les méthodes sans ces données multiples serait comparable à l'application de la recette de cuisine sans les bons ingrédients. Enfin, la chirurgie plastique est un assemblage de nombreuses sous-spécialités qui se sont développées au fil de temps. Malgré tout, il existe une réelle cohérence qui émane d'une communauté de pensée fondée sur des principes propres aux plasticiens. Nous proposons de décrire quelques-uns de ces principes.

L'art de tricher

Tricher, dans le sens noble du terme bien sûr, en adaptant les procédés, les tissus, et les moyens disponibles chez un patient donné. Les illustrations de ce principe sont nombreuses et en voici quelques exemples :

  • la plastie en « Z » permet de traiter une bride rectiligne grâce à un dessin astucieux qui transpose les tissus et assure ainsi une répartition différente des forces en présence et, de fait, la disparition de la bride ;

  • les lambeaux permettent de déplacer des tissus soit pour couvrir, soit pour reconstruire une partie mutilée du corps. Depuis les lambeaux migrateurs de la Première Guerre mondiale, la microchirurgie avec les lambeaux libres puis les lambeaux perforants ont permis des avancées notables dans la couverture des pertes de substance ;

  • l'utilisation de matériaux organiques (la graisse) ou synthétique (les implants) permet de modifier les contours d'un corps à embellir ou à reconstruire ;

  • masquer les effets du vieillissement par un lifting facial ou réaliser une cure de ptose mammaire sont des démonstrations simples de cet art de la tricherie ;

  • les cicatrices de nos voies d'abord sont dans la mesure du possible cachées ou au moins placées là où elles sont discrètes, en respectant les lignes de tension et les plis naturels de la peau. Cette notion est particulièrement mise en œuvre en chirurgie esthétique (pose d'implant mammaire par voie sous-mammaire ou axillaire, lifting cervicofacial avec incision contournant l'oreille, etc.) mais aussi en chirurgie réparatrice (fermeture d'une fente labiale avec une cicatrice sur la crête philtrale, prélèvement d'une greffe de peau sur le cuir chevelu, brachioplastie avec cicatrice à la face interne du bras, etc.). Cette notion donne parfois à nos patients l'illusion que nous travaillons sans cicatrice. De l'art de tricher avec élégance.

L'art de boucher les trous

Corollaire du concept précédent, les plasticiens excellent dans l'art de déplacer les tissus afin de couvrir ou de reconstruire une autre partie du corps. Toutes les greffes tissulaires (peau, graisse, os et cartilage) en témoignent. Déjà la cicatrisation dirigée, à son niveau modeste mais utile et loin d'être aussi simple qu'elle en a l'air, permet d'obtenir la guérison de nombreuses plaies sans geste chirurgical pourvu que l'analyse du terrain soit pertinente. Cependant, c'est évidemment la chirurgie des lambeaux au sens large qui exprime le mieux ce concept. Ce sont d'ailleurs ces lambeaux qui séduisent le plus souvent les jeunes étudiants attirés par la spécialité. La beauté du geste.

Le respect de la vascularisation tissulaire

La préoccupation de la vascularisation des tissus anime tous les plasticiens, qu'il s'agisse de cicatrisation dirigée, de dissection de lambeau dont on connaît les vaisseaux ou de repérage de ces mêmes vaisseaux pour un lambeau perforant. De même, le traitement des brûlures repose sur l'identification des zones vascularisées ou au contraire nécrosées, celles qui seront excisées. Enfin, la gestuelle du plasticien est souvent très respectueuse des tissus, manipulés avec délicatesse afin d'en préserver la vascularisation. La microchirurgie est bien sûr au cœur de cette préoccupation car elle permet de restaurer le flux sanguin tissulaire. La replantation digitale ou la reconstruction mammaire par lambeau de DIEP (deep inferiror epigastric perforator flap ) en sont des illustrations. Enfin, cette connaissance de l'importance de la vascularisation est également au cœur de l'appréciation du terrain du patient, par exemple pour mieux comprendre les mécanismes de cicatrisation spontanée. Ainsi, le sevrage tabagique est une requête constante aujourd'hui pour éviter les nécroses cutanées ou tissulaires postopératoires.

L'art de reconstruire

Réparer les parties manquantes du corps, comme le sein ou le nez, réparer le corps abîmé par un amaigrissement massif, restaurer la peau traumatisée par une morsure animale, une brûlure grave ou un accident de la voie publique sont autant d'illustrations de cet objectif central du plasticien.

Plus implicitement, la reconstruction a aussi une teneur psychologique dont l'importance est volontiers sous-estimée par nos détracteurs qui voient une certaine futilité à nos gestes, en particulier lorsqu'il s'agit de chirurgie esthétique. Ces personnes se trompent lourdement et méconnaissent l'impact de ces gestes qui permettent aux patients d'être littéralement mieux dans leur peau.

Le souci du détail

Les plasticiens sont souvent maniaques du détail, du surjet bien fait, du pansement adapté, du tracé précis. Cette méticulosité est mise au service de la microchirurgie qui permet de revasculariser des tissus déplacés par exemple lors d'une replantation digitale ou de membre, ailleurs pour une couverture après mutilation imposée par une chirurgie carcinologique dermatologique. Ce souci du détail se retrouve évidemment au cœur de la chirurgie esthétique, méprisée à tort. L'analyse fine des anomalies d'un nez jugé disgracieux est un bel exemple de ce sens exacerbé du détail.

Le beau n'est pas méprisable

Dans l'esprit du grand public, on oppose volontiers le chirurgien réparateur qui serait le « noble » et le chirurgien esthétique qui serait « le trivial et futile ». C'est méconnaître l'impact de la beauté chez l'humain. Depuis les travaux scientifiques montrant que « le  beau est bon », il est clairement admis que la vie sourit davantage aux personnes qualifiées de « belles » ou au moins d'harmonieuses, même si la définition de ce concept reste assez floue. Le poids de la culture et de nos sociétés consuméristes a bien sûr accentué cette évolution. De plus, le plasticien a une conscience aiguë d'un principe simple : la bonne fonction contribue pleinement à la beauté. Prenons l'exemple de la paralysie faciale qui induit une asymétrie du visage au repos et à la mimique. La restitution de l'équilibre de ce visage contribue à la restauration du visage harmonieux et donc de la beauté. Ainsi, les plasticiens au sens large ont un goût aiguisé pour le beau et ce goût s'exprime dans leur pratique chirurgicale, qu'il s'agisse de chirurgie esthétique ou réparatrice. Bien sûr, certaines situations, comme la brûlure grave, rendent cet objectif plus difficile à atteindre, parfois même impossible, touchant alors aux limites de la prétendue toute puissance médicale.

La hantise des séquelles

Nombreux sont les gestes de chirurgie plastique imposant un prélèvement tissulaire sur une autre partie du corps. Ce prélèvement se fait au prix de séquelles, au minimum une cicatrice supplémentaire, au pire un délabrement visible. Or, le plasticien va par principe chercher la « moins mauvaise » solution, celle qui laissera le moins de séquelles. Ainsi, pour la réalisation d'une greffe de peau mince chez un enfant, le prélèvement sur le cuir chevelu est préféré à celui sur la cuisse car la repousse des cheveux masque la cicatrice du site donneur. De même, lors d'un prélèvement de lambeau de grand dorsal, la cicatrice du site donneur est placée tantôt dans le soutien-gorge tantôt sur la face latérale du thorax. Enfin, quand deux options chirurgicales se présentent, le plasticien choisit plus volontiers celle dont les séquelles induites sont les moins lourdes. Ainsi le lambeau de TRAM (transverse restus abdominis muscle flap ) a été remplacé par le DIEP pour la reconstruction mammaire autologue car les séquelles de la paroi abdominale sont bien plus légères, sans risque d'éventration.

Entre algorithme et créativité

Si le plus souvent le plasticien réfléchit en utilisant l'algorithme « du plus simple au plus compliqué » pour ses choix thérapeutiques, il tend volontiers à imaginer d'autres solutions différentes et créatives. La routine ne sied pas nécessairement à cette spécialité et à ceux qui l'exercent et qui cherchent constamment à évoluer, avancer et inventer. C'est dans cette volonté de se renouveler que cette spécialité trouve tout son charme et sa raison d'être.

Conclusion

La chirurgie plastique esthétique et reconstructrice est une chirurgie multiple et protéiforme qui par essence s'exerce dans de nombreux domaines, d'où des prises en charge volontiers pluridisciplinaires, et à tous les âges de la vie de nos patients. Elle est à ce titre volontiers considérée comme la dernière chirurgie générale.

Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts en relation avec cet article.

© 2018  Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Toute référence à cet article doit porter la mention : V. Duquennoy-Martinot, C. Depoortère. Principes de la chirurgie plastique. EMC - Techniques chirurgicales - Chirurgie plastique reconstructrice et esthétique 2018;14(1):1-3 [Article 45-005].

Auteurs

V.Duquennoy-Martinot.

C.Depoortère.

Service de chirurgie plastique, Hôpital Salengro, 59037 Lille cedex, France.

Vous veneze de lire un extrait de l'EMC TECHNIQUES CHIRURGICALES - CHIRURGIE PLASTIQUE RECONSTRUCTRICE ET ESTHÉTIQUE.

Techniques chirurgicales Chirurgie plastique reconstructrice et esthetique