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Le cancer du sein de la femme âgée

12 octobre 2023

Par Monique Remillieux

Nous vous invitons à découvrir un article du dossier Le cancer du sein chez la personne âgée de la revue SOINS Gérontologie S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

Cancer du sein Épidémiologie, diagnostic et bilan d’extension

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquemment rencontré chez la femme z Les personnes âgées, dont le nombre augmente, constituent une population à part entière, du fait des nombreuses comorbidités que l’on retrouve chez elles z L’épidémiologie du cancer du sein, notamment chez les femmes âgées, est relatée ici, ainsi que le diagnostic et le bilan d’extension, qui ne diffèrent pas du reste de la population.

Mots clés : bilan d’extension, cancer du sein, diagnostic, épidémiologie, femme âgée

Breast cancer is the most common cancer in women. The elderly, whose numbers have been increasing, constitute a population in their own right, because of the many co-morbidities they suffer from. The epidemiology of breast cancer, particularly in elderly women, is described here, as well as the diagnosis and the assessment of extension, which do not differ from the rest of the population.

Keywords : extension assessment, breast cancer, diagnosis, epidemiology, elderly women

Mathieu Jamelota,b,c Oncologue a Service d’oncologie médicale, hôpital Tenon, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 4  rue de la Chine, 75020 Paris, France Sorbonne Université, 21 rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France Institut universitaire de cancérologie, Paris, France

Plan

Épidémiologie Dépistage Diagnostic Bilan d’extension Conclusion Déclaration de liens d’intérêts

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme, et c’est vrai également chez la femme âgée. La définition d’une personne âgée diffère selon les sociétés savantes ; nous considérerons dans cet article une patiente âgée lorsqu’elle a plus de 75 ans. Il s’agit d’une population qui augmente depuis quelques années, et les problématiques liées à la prise en charge du cancer du sein chez ces malades ne sont pas standardisées du fait d’un manque d’études les incluant.

Épidémiologie

En 2018, le cancer du sein était le deuxième cancer le plus fréquemment rencontré au niveau mondial toutes populations confondues (après le cancer broncho-pulmonaire) avec près de 2 088 849 cas, et le quatrième en termes de mortalité, avec plus de 600 000 décès (derrière les cancers broncho-pulmonaire, gastrique et hépatique) [1]. Chez les femmes, il s’agissait du premier cancer en termes d’incidence comme de mortalité.

En Europe, c’est le premier cancer en termes d’incidence, avec près de 522 000 cas, et il se classe troisième si l’on considère la mortalité induite (après les cancers broncho-pulmonaire et colorectal) avec près de 137 000 cas [2, 3]. Il représente ainsi 16,2 % des décès liés au cancer en Europe [3].

En France, chez la femme, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers (58 500 cas en 2018), devant le cancer colorectal (20 100 cas) et celui du poumon (15 100 cas) [4]. Chez la femme toujours, le cancer du sein est la première cause de décès par cancer (12 100 décès en 2018), devant ceux du poumon (10 300 décès) et colorectal (7 900 décès).

La survie nette standardisée à cinq ans était estimée à 87 % pour une période de diagnostic s’étalant de 2005 à 2010, et celle à dix ans était estimée à 78 % pour un diagnostic établi entre 1999 et 2004 [5]. Avec l’amélioration des thérapeutiques et l’essor des thérapies ciblées, les taux de survie sont aujourd’hui plus importants qu’au début des années 2000. Enfin, la survie nette standardisée à cinq ans est de 90 % pour la classe d’âge 15-44 ans, de 92 % pour les 45-74 ans, et de 76 % pour ceux de 75 ans et plus [5]. Ainsi, la tranche d’âge des plus de 75 ans est celle pour laquelle la survie nette standardisée est la plus faible.

L’âge médian du diagnostic du cancer du sein est de 61 ans [6] (diagnostics entre 2013-2016). La particularité des cancers du sein chez les patientes âgées est qu’ils ont tendance, lors du diagnostic, à être de meilleur pronostic par rapport à ceux identifiés dans une population plus jeune. Il a été observé chez les malades âgées des tumeurs plus petites, avec moins d’atteintes ganglionnaires, plus de tumeurs luminales (exprimant les récepteurs hormonaux), de plus bas grade, et moins de tumeurs triples négatives ou surexprimant human epidermal growth factor receptor-2 (HER-2) [7]. Les tumeurs triples négatives sont rencontrées à un âge médian de 54 ans, contre 60 ans pour les autres sous-types histologiques.

Le risque de développer un cancer du sein triple négatif est 1,53 fois plus important chez les moins de 40 ans que chez les plus de 60 ans, et seules 15 à 18 % des patientes de plus de 70 ans ont un diagnostic de cancer du sein triple négatif [8]. Plus de 66 % des cancers du sein diagnostiqués chez les plus de 70 ans sont des carcinomes canalaires infiltrants, près de 81 % surexpriment les récepteurs aux œstrogènes (RE) et 59 % les récepteurs à la progestérone (RP). Seules 13 % des patientes surexpriment HER-2 [9].

Les facteurs de risque du cancer du sein sont nombreux et bien identifiés [10] : le sexe féminin, l’exposition aux hormones sexuelles féminines (œstrogène et progestérone), la puberté précoce, la ménopause tardive, la nulliparité, l’âge tardif de la première grossesse, peu ou pas de grossesses, et les traitements hormonaux contraceptifs. L’histoire familiale et les mutations de gènes sont également des facteurs de risque, notamment avec les gènes BRCA1 et BRCA2 , TP53 , CDH1 , PTEN , ATM ou PALB2, pour les principaux.

D’autres facteurs de risque dits modifiables ont été retrouvés, tels que l’obésité, le tabac, la consommation d’alcool, le manque d’activité physique, le manque de supplémentation vitaminique et l’exposition à des produits chimiques.

Enfin, l’âge élevé est un facteur de risque de développer un cancer du sein, risque qui augmente tout au long de la vie, avec une probabilité de 1,5 % de développer un cancer du sein à l’âge de 40 ans, de 3 % à l’âge de 50 ans et de plus de 4 % à 70 ans [11].

En France chez la femme, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers, devant le cancer colorectal et celui du poumon.

Diagnostic

Le bilan diagnostique est identique chez les patientes âgées [7, 17] et ne diffère pas de la population plus jeune.

Le diagnostic du cancer du sein repose sur l’examen clinique et sa combinaison avec l’imagerie. L’examen clinique comprend la palpation bimanuelle des seins et des ganglions lymphatiques régionaux et l’évaluation de métastases à distance (os, foie et poumons) ; un examen neurologique n’est requis qu’en présence de symptômes [18].

Le bilan comporte une mammographie bilatérale avec les incidences de face et oblique externe, et l’incidence de profil. Une échographie mammaire doit être effectuée en complément, avec l’exploration des aires ganglionnaires, notamment au niveau axillaire. Il est habituel de réaliser une imagerie par résonance magnétique (IRM) mammaire, qui permet de caractériser de manière plus précise la lésion suspecte avec un rendu des résultats selon la classification breast imaging-reporting and data syste m [12].

Une classification ≥ ACR 4 doit amener à pratiquer une biopsie mammaire, soit par microbiopsie avec un calibre 18 à 14 G pour les masses, soit par macrobiopsie sous aspiration de calibre 10 à 7 G sous repérage stéréotaxique pour les microcalcifications ou en seconde intention si la microbiopsie n’est pas contributive. Une cytoponction à l’aiguille fine peut être préconisée pour l’analyse ganglionnaire axillaire.

L’histologie est indispensable pour connaître le statut des RE, des RP, et le statut HER-2. La prise en charge thérapeutique diffère selon qu’il s’agisse d’un cancer hormonodépendant, HER-2+++ ou triple négatif. L’évaluation pathologique comprend l’histologie de la tumeur primaire et cytologie-histologie des ganglions axillaires (si une atteinte est suspectée). Le rapport pathologique doit également inclure le type histologique, le grade, certaines formes de marqueurs de prolifération (par exemple, Ki67 pour le cancer invasif). Il faut également proposer une consultation d’oncogénétique en cas d’histoire familiale ou de mutation BRCA1/BRCA2 retrouvée en somatique ou constitutionnel [18].

L’ensemble de ces examens permet de stadifier la maladie sur la taille tumorale (T) et le statut ganglionnaire (N). Si la tumeur est localement avancée ou s’il existe des signes cliniques d’appel, un bilan d’extension à distance sera proposé.

Des bilans biologique,nutritionnel et phosphocalcique doivent être réalisés

Bilan d’extension

Le stade de la maladie doit être évalué selon la huitième édition du système de stadification American Joint Committee on Cancer (AJCC) tumor-node-metastasis (TNM) (voir Annexe A S’ouvre dans une nouvelle fenêtre). En dehors de la présence de signes cliniques d’appel, il existe un consensus pour ne pas proposer de bilan d’extension systématique avant la prise en charge chirurgicale conservatrice d’une lésion T1 ou T2 sans atteintes ganglionnaires axillaire clinique ou radiologique.Un bilan biologique doit être réalisé dans tous les cas pour rechercher des anomalies sur la lignée myéloïde, le bilan rénal et le bilan hépatique. Un bilan nutritionnel est indispensable chez ces patientes âgées, avec notamment le dosage de l’albumine et de la préalbumine. Il est nécessaire également d’effectuer un bilan phosphocalcique.Les indications pour réaliser un bilan d’extension sont les suivantes [18] :

  • des ganglions axillaires cliniquement positifs ;

  • des grosses tumeurs (par exemple, de 5 cm) ;

  • une biologie retrouvant des anomalies laissant suggérer l’existence de métastases ;

  • des signes cliniques, des symptômes suggérant la présence de métastases.

Les examens pouvant être réalisés sont :

  • une tomodensitométrie (TDM) du thorax, de l’abdomen et du pelvis ;

  • une imagerie, telle que le TDM, ou une IRM couplée à une scintigraphie osseuse sont envisageables ;

  • une tomographie par émission de positrons (TEP) au fluorodésoxyglucose peut être utile ;

  • la TEP-TDM remplace éventuellement l’imagerie traditionnelle pour la stadification chez les patients à haut risque, bien qu’en cas de cancers lobulaires et de tumeurs de bas grade, il est susceptible d’être moins sensible.

L’ensemble de ces examens permet de stadifier le statut métastatique (M) de la tumeur (Annexe A S’ouvre dans une nouvelle fenêtre).

À ceux-ci, il ne faut pas oublier d’ajouter une évaluation cardiaque chez ces patientes âgées à risque d’insuffisance cardiaque, en particulier avant un traitement par chimiothérapie utilisant des anthracyclines ou avant des thérapies anti-HER-2.

Conclusion

Concernant le cancer du sein chez les patientes âgées, le sous-type histologique diffère de la population plus jeune car les cancers de type luminal A (RE+ et RP+) sont plus représentés que dans le reste de la population, tout comme ces malades âgées sont moins exposées aux cancers du sein triple négatif.Le diagnostic et le bilan d’extension ne diffèrent pas du reste de la population pour les femmes âgées, mais il faut tenir compte de manière plus étroite de leurs comorbidités, notamment cardiaques et nutritionnelles, avant toute décision thérapeutique. Le changement de stratégie chez les patientes âgées va être principalement rencontré dans le choix thérapeutique. Il est nécessaire que les études incluent cette population pour mieux identifier les facteurs pronostiques ainsi que les stratégies de dépistage et thérapeutique.

Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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Soins Gérontologie Volume 27, numéro 157 pages 10-12 (septembre 2022)

Doi : 10.1016/j.sger.2022.09.003© 2022  Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Vous venez de découvrir un des articles du dossier thématique Le cancer du sein chez la personne âgée de Soins Gérontologie S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

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