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Le point sur les régimes intermittents

3 août 2022

Par Anne Claire Nonnotte

Le point sur les régimes intermittents

Le point sur les régimes intermittents

Update on intermittent diets

Jean-Michel Lecerf : Chef du service Nutrition et activité physique Institut Pasteur de Lille, 1 rue du Professeur-Calmette, 59000 Lille, France

Résumé

Les jeûnes intermittents regroupent différents régimes basés sur une alternance entre une forte restriction alimentaire et une prise normale ou modérément réduite sur la semaine ou la journée. Les plus répandus sont les régimes 5:2 et 8:16. Ils visent à alléger les contraintes relatives à l’alimentation. La plupart des études ne montrent pas de supériorité sur le poids et des résultats variables sur la perte de masse maigre, l’équilibre et le comportement alimentaires. En l’absence d’infériorité notable, cette option semble toutefois pouvoir être proposée.

Update on intermittent diets Intermittent fasting is a group of different diets based on alternating heavy restriction and normal or moderately reduced food intake over the week or day. The most common are the 5:2 and 8:16 diets. They aim to reduce dietary constraints. Most studies show no superiority on weight and variable results on lean body mass loss, balance and eating behaviour. In the absence of significant inferiority, however, this option seems to be feasible.

Mots clés : jeûne, obésité S’ouvre dans une nouvelle fenêtre, régime, régime intermittent, surpoids

Keywords : fasting, intermittent diet, obesity, overweight, regimenLe dernier régime à la mode a tout pour plaire : il est récent, il véhicule une promesse d’intermittence et il est promu par les médias. Mais avant de se prononcer, il serait bon d’analyser ses performances, ses avantages et ses inconvénients en fonction de ses indications. Peut-être pourra-t-il sauver le soldat R, pour régime, du naufrage ? Est-ce pour cela qu’il est souvent baptisé “jeûne intermittent”, tant le jeûne a bonne presse, au moins en théorie ? Il faut d’abord savoir de quoi on parle lorsqu’il est question de jeûne ou de régime intermittent.

Plan

Jeûne et régime intermittent, définitions Impact sur le poids (+) Impact sur d’autres critères (+) Conclusion Déclaration de liens d’intérêts

Jeûne et régime intermittent, définitions

Derrière le vocable de jeûne ou de régime intermittent se cachent des pratiques multiples. L’objectif de cette démarche est d’éviter les contraintes de la restriction continue, dite permanente. Le bénéfice repose en théorie sur une sorte de soupape. Mais cette pratique n’entraîne-t-elle pas une réduction des apports énergétiques (si l’on mange moins souvent) ou, à l’inverse, une augmentation compensatoire lorsque manger est autorisé ? Ses défenseurs mettent aussi en avant des effets passant par d’autres mécanismes liés à la chronobiologie. Une des difficultés est l’extrême hétérogénéité des modalités de l’intermittence et plus encore des protocoles, quand il ne s’agit pas de leur complexité.La modalité la plus courante est le jeûne intermittent basé sur le jeûne alterné, en majorité deux jours (non consécutifs) de restriction sévère, le plus souvent à 500 kcal (femmes [F]) ou 600 kcal (hommes [H]), soit environ 25 % des besoins, et cinq jours libres ou de restriction modérée (75 % des besoins). Certains pratiquent des régimes intermittents une semaine sur deux ou un jour sur deux. Dans les bons protocoles, la comparaison se réalise avec la diète restrictive en continu, habituellement à 80 % des besoins, de sorte que le déficit est à peu près équivalent sous régime intermittent et sous régime continu. Bien sûr, il n’y a pas de double aveugle, mais parfois aussi pas de randomisation ni même de groupe contrôle. C’est dire que beaucoup de publications, voire de méta-analyses, sont de qualité médiocre et ne méritent pas d’être retenues.L’autre modalité, beaucoup moins étudiée mais très populaire, est le jeûne intermittent sur la journée, qui prévoit huit heures de prise alimentaire et seize heures de jeûne complet. Elle est appelée time-restricted feeding (TRF). Le Ramadan, qui est parfois considéré comme un jeûne intermittent, doit plutôt être considéré sous l’angle de l’inversion des rythmes alimentaires.Chez la souris, le régime intermittent entraîne des effets plus puissants sur la glycémie, l’insulinémie, l’insulin-like growth factor 1 (IGF-1), la leptine et l’adiponectine que la restriction continue, malgré un déficit énergétique similaire, ce qui est très encourageant et justifie que l’on s’y intéresse. De nombreuses études sont aujourd’hui disponibles, portant en priorité sur la gestion du poids. Mais des travaux au sujet d’autres domaines de santé émergent.

Impact sur le poids

Un certain nombre d’études ont cherché à mesurer l’impact des différents régimes intermittents sur le poids S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.

Régime intermittent 5:2

Une étude complexe menée auprès de 332 sujets ayant un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 27 kg/m2 a comparé la restriction continue (1 000 kcal [F] ou 1 200 kcal [H]), la restriction alternée une semaine sur deux (une semaine de restriction continue et une semaine sous régime habituel) et la restriction intermittente classique 5:2 (cinq jours libres et deux jours à 500 ou 600 kcal [F ou H]) [1]. L’adhésion s’est avérée moyenne puisque 146 personnes ont mis fin au suivi au bout de 12 mois et 109 après 24 mois. L’analyse se fait le plus souvent, comme ici, en per protocole (à partir de ceux qui ont terminé) alors qu’elle devrait être réalisée en intention de traiter. À 12 mois, chez les 146 sujets (124 F et 22 H), la perte de poids était très proche dans les trois groupes (6,6, 5,1 et 5 kilos) [1], sans qu’un effet sur la glycémie et le cholestérol low density lipoprotein (LDL) soit observé ; les changements étaient également similaires en ce qui concerne la masse grasse, le cholestérol high density lipoprotein (HDL) (+ 7 %) et les triglycérides.Dans une seconde publication, les auteurs ont montré que, chez 109 personnes ayant un IMC moyen de 33 kg/m2 soumises à une restriction de 30 % et suivies 24 mois, la perte de poids maximale est survenue à 28 semaines chez ceux qui ont terminé l’étude, quel que soit le régime [2]. Elle était alors respectivement, pour les trois groupes, de 8,2, 6,9 et 6,2 kilos, sans différence significative ; la perte de masse grasse était également proche (3,6, 2,8 et 3,2 kilos) et il n’a pas non plus été relevé de différence concernant les paramètres métaboliques. Au bout de 104 semaines (deux ans), la perte de poids n’était plus respectivement que de 4,8, 2,8 et 3,5 kilos. Les sujets recevaient 50 dollars s’ils allaient au bout du protocole, ce qui a probablement augmenté la compliance, pourtant médiocre. Ainsi, la perte de poids, même si elle a été quelque peu meilleure avec le régime continu, n’a pas été statistiquement significative.

Une autre étude a enrôlé 150 individus (50 % F, 50 % H) de 35-65 ans ayant un IMC compris entre 25 et 40 kg/m2 (moyenne 31,5 kg/m2), qui ont été randomisés de la façon suivante : un groupe 5:2 (cinq jours libres et deux jours en restriction à 75 %) ; un groupe en restriction continue à 20 % (de sorte que dans les deux groupes, le  déficit moyen était de 20 %) ; un groupe témoin sans restriction, ce qui est original [3]. L’étude a duré un an (12 semaines d’intervention, 12 semaines de “maintien” et 26 semaines de suivi). À 12 semaines, la perte de poids était respectivement de 7,1, 5,2 et 3,3 %. La différence était à la limite de la significativité entre le groupe restriction intermittente et restriction continue (p  = 0,053). À un an, il n’y avait plus d’écart notable (- 5,2 %, -4,9 %), si ce n’est avec le groupe témoin (- 1,7 %). Aucune différence n’a été relevée en ce qui concerne le tissu adipeux viscéral et le tissu adipeux sous-cutané ou les paramètres métaboliques.

La perte de poids mais aussi les changements d’apports nutritionnels et le comportement ont été étudiés par des auteurs norvégiens [4]. Dans ce protocole, 112 sujets présentant une obésité (IMC 30-45 kg/m2) abdominale et au moins un critère caractéristique du syndrome métabolique ont été randomisés en deux groupes : restriction intermittente 5:2 avec deux jours non consécutifs à 400 (F) et 600 kcal (H) ou restriction continue avec un déficit moyen de 26 % par rapport au besoin calculé dans les deux groupes. Les apports en folates, en magnésium et en potassium ont davantage diminué dans le groupe jeûne intermittent ; ceux en fibres, en fruits, en légumes et en vitamine C étaient plus élevés et ceux en sucre plus bas dans le groupe régime continu. Les deux régimes ont amélioré les scores de comportement alimentaire, mais le score de restriction cognitive a davantage augmenté dans le groupe régime continu. Une évolution moins favorable sur le plan nutritionnel, mais plus du point de vue de la restriction cognitive, a donc été rapportée avec le régime intermittent. Dans une seconde publication, les auteurs ont relevé une absence de différence sur le plan des paramètres métaboliques et de la pression artérielle, une reprise de poids comparable à un an mais des scores de faim plus élevés dans le groupe intermittent [5]. Ils ont ensuite analysé l’effet du jeûne intermittent sur le système des sirtuines [6]. La sirtuine 1 est un régulateur de l’homéostasie énergétique en réponse à la disponibilité des nutriments, qui est activée par la restriction énergétique. Dans cette étude, ce régime augmente davantage la sirtuine 1, surtout chez les hommes.

L’impact de la restriction intermittente les jours nourris et les jours jeûnés a été au cœur d’une étude incluant 46 femmes de 35 ± 10 ayant un IMC moyen de 29,1 ±2,3, randomisées en deux groupes : restriction intermittente 5:2 (25 % des besoins les deux jours restreints et cinq jours libres) ; restriction continue à 75 % des besoins [7]. L’analyse des résultats a été réalisée jusqu’à ce qu’une perte de poids supérieure ou égale à 5 % soit atteinte ou à 12 semaines. Aucune différence en termes de perte de poids n’a été relevée entre les deux groupes ; en revanche, le régime intermittent augmentait la faim et était associé à une moindre amélioration du contrôle des pulsions alimentaires. Dans le groupe restriction intermittente, les apports énergétiques les jours nourris étaient identiques à ceux observés en base ; la sensation quotidienne de faim était plus forte et l’activité physique légère plus faible les jours jeûnés ; il n’y avait pas de différence en ce qui concerne les compulsions alimentaires entre les jours jeûnés et les jours nourris. Il apparaît donc que le confort était moins bon les jours restreints, avec une forme d’adaptation compensatoire (moins d’activité physique).

L’évolution pondérale et métabolique à la suite d’un régime non pas imposé (randomisation), mais choisi a fait l’objet d’une étude originale [8]. Trois types de “régimes” étaient proposés à 250 personnes ayant un IMC supérieur à 27 kg/m2 : la diète méditerranéenne, le jeûne intermittent et le régime paléolithique, choisis respectivement par 27,2, 54,4 et 18,4 % des sujets. À 12 mois, le pourcentage d’individus suivant encore le régime qu’ils avaient sélectionné était respectivement de 57, 54 et 35 %, ce qui confirme une adhésion moyenne ou faible au long cours. La perte de poids était respectivement de 2,8, 4 et 1,8 kilos, sans écart significatif entre les trois groupes. L’adhésion augmentait respectivement de 1,8, 1,1 et 0,3 kilo la perte de poids. Il n’y avait pas de différence entre les groupes en ce qui concerne la pression artérielle et l’hémoglobine glyquée (HbA1c) malgré l’absence d’amélioration avec le régime paléolithique.

Parmi les méta-analyses, dont plusieurs sont de qualité médiocre, deux seulement méritent d’être commentées. La première a inclus neuf études comparant soit un régime continu, soit un régime intermittent intensifié (avec réduction calorique les cinq jours libres) [9]. La comparaison n’a pas montré de différence en termes de perte de poids ni sur la masse grasse. En revanche, la masse maigre était plus basse (p  = 0,03) avec le jeûne intermittent, ce qui n’est pas favorable. Ces résultats sont en accord avec une revue de la littérature plus ancienne qui ne montrait pas de bénéfice de cette stratégie sur la composition corporelle [10]. Le risque de passage vers une very low calorie diet a été souligné par les auteurs. La seconde méta-analyse, qui a retenu 18 études, est plus récente [11]. Quatre ont rapporté une perte de poids supérieure avec le régime intermittent et une diminution supérieure du tour de taille ; treize n’ont retrouvé aucune supériorité concernant le poids ou le tour de taille1 . Cinq travaux sur treize ont observé une réduction plus importante de la masse grasse avec le régime intermittent, tandis que les résultats sur la masse maigre étaient semblables ou dépendaient du stade de l’étude et de l’importance de la perte de poids. Seules trois études ont rapporté des effets sur les lipides, dont deux avec le régime continu. Malgré ces résultats très mitigés, les auteurs ont affirmé que le régime intermittent est supérieur alors qu’il est juste parfois un peu meilleur, d’autant que, contrairement à ce qu’indique le titre de la publication, il ne s’agit pas d’une méta-analyse.

Régime intermittent une semaine sur deux

L’étude Minimising Adaptive Thermogenesis and Deactivating Obesity Rebound reposait sur un protocole extrêmement complexe [12]. Elle a inclus 51 hommes de 25-54 ans ayant un IMC compris entre 30 et 45 kg/m2, randomisés en deux groupes : restriction continue de 16 semaines versus restriction intermittente particulière, avec huit fois deux semaines de restriction, intercalées par sept fois 2 semaines d’équilibre énergétique, soit 30 semaines au total. La restriction moyenne était de 33 %, soit un apport énergétique maintenu à 67 % des besoins dans les deux groupes. Dix-neuf personnes sont allées au bout du suivi dans le groupe régime continu et 17 dans le groupe régime intermittent. À 16 semaines, une perte supérieure de poids (14,1 vs 9,1 kilos ; p  < 0,001) et de masse grasse (12,3 vs 8 kilos) a été observée parmi les sujets qui opéraient une restriction intermittente, tandis que la perte de masse maigre était identique. Les pertes de poids étaient négligeables pendant les périodes d’équilibre énergétique du régime intermittent. Après ajustement sur le changement de composition corporelle, la diminution des dépenses énergétiques de repos était plus importante en cas de restriction intermittente. Les auteurs ont suggéré que la suppression de semaines sans restriction pourrait réduire l’adaptation métabolique compensatoire et, de ce fait, accroître l’efficacité de la perte de poids.

Régime intermittent un jour sur deux, dit alterné

Une étude publiée en 2017 regroupant 100 sujets (86 % F) ayant un IMC compris entre 25 et 40 kg/m2 a comparé trois bras : jeûne alterné (1:1), restriction calorique quotidienne et contrôle sans intervention [13]. Par rapport au groupe régime continu, la perte de poids était identique, mais l’abandon était plus fréquent (38 vs 26 %) et les valeurs de cholestérol (total, LDL et HDL) étaient plus élevées dans le groupe régime alterné. Les personnes qui suivaient ce régime mangeaient moins que prescrit les jours de jeûne et plus les autres jours.

Une méta-analyse de sept études randomisées totalisant 269 participants a montré que la perte de poids était plus importante avec le régime intermittent 1:1 qu’avec la restriction continue pour les 136 sujets des quatre études pour lesquelles les données pondérales étaient disponibles, ce qui pose question [14]. La masse grasse et la masse maigre (p  = 0,002) ont davantage diminué dans le groupe régime alterné, dans lequel a aussi été observée une plus forte réduction des apports énergétiques, des paramètres lipidiques (cholestérol total, triglycérides, LDL) et de la pression artérielle, mais pas des paramètres du métabolisme glucidique. La baisse importante de la masse maigre n’est pas un élément favorable. De surcroît, sur ces sept études, cinq ont été évaluées entre 4 et 12 semaines, ce qui a très peu de valeur.

Une étude en ouvert sans groupe contrôle n’a pas montré de différence entre les sexes ni entre les statuts vis-à-vis de la ménopause chez les femmes [15]. La perte de poids semblait plus importante dans la tranche d’âge 50-59 ans [16].

Une autre étude conduite pendant trois semaines qui comparait le régime alterné et la restriction chronique n’a pas montré de supériorité en termes de poids, ce qui pourrait être lié à la réduction de l’activité physique les jours de jeûne [17], phénomène qui avait été rapporté dans une publication ancienne [18].

Régime intermittent 16 heures sur 24

Le régime intermittent correspond à un jeûne durant seize heures sur vingt-quatre, avec une pause alimentaire de huit heures sur vingt-quatre, c’est pourquoi il est parfois appelé TRF .Une étude en ouvert conduite chez 50 sujets ayant un IMC supérieur à 28 kg/m2 pendant 12 semaines a démontré une faible adhésion car seuls 58 % des participants ont poursuivi le programme cinq ou six jours par semaine [19]. La perte de poids était modeste (plus de 5 % dans uniquement 26 % des cas), avec une moyenne de - 2,6 kilos, mais plus importante chez les personnes ayant une bonne adhésion. La sensation de faim a été rapportée comme faible et diminuait avec le temps. Il n’y avait pas d’effet sur la pression artérielle ni sur les lipides. Une autre étude en ouvert a confirmé des résultats modestes (3 % de perte de poids corporel à 12 semaines) [20].

Dans la revue Cell Metabolism , le TRF a été testé en ouvert chez dix-neuf personnes [21]. Malgré une faible réduction du poids (3 %), les auteurs ont relevé une amélioration des paramètres métaboliques, qui ne semble pas liée uniquement à la perte de poids et au score de graisse viscérale, mais également à une amélioration des rythmes, avec un avancement de l’heure du dîner, un recul de celle du petit déjeuner et une régularité des repas.

Impact sur d’autres critères

Au-delà du poids, d’autres indications des régimes intermittents ont fait l’objet de travaux.

Appétit

L’appétit a été au centre d’une étude bien faite et intéressante [22]. Seize sujets ont été randomisés pendant deux semaines en deux groupes, l’un suivant le régime 5:2 (deuxjours à 70 % en dessous et cinq jours au niveau des besoins), l’autre soumis à une restriction continue de 20 %. La perte de poids était semblable (respectivement 2,5 et 2,3 kilos). Le métabolisme et les marqueurs de l’appétit ont été mesurés avant et après l’intervention, avant et trois heures après un petit déjeuner liquide suivi par un repas ad libitum . Aucune différence entre les groupes n’a été notée concernant l’aire sous la courbe d’insuline, la glycémie et les scores subjectifs d’appétit en postprandial. En revanche, à jeun, la glycémie s’est avérée plus basse avec le régime intermittent tout comme un score composite d’appétit. Les participants avaient un poids normal, les résultats ne sont donc pas extrapolables aux individus en surpoids S’ouvre dans une nouvelle fenêtre et ne concernent que le très court terme.

Stress

Le régime TRF (jeûne seize heures par jour) a été envisagé en tant que mode alimentaire alternatif chez les sujets en situation de stress ou de surmenage professionnel, sur la base d’études chez les rongeurs, dont les résultats étaient positifs, et d’hypothèses relatives à la chronobiologie chez les travailleurs postés. Alors que leurs conclusions étaient plutôt enthousiastes, les auteurs ont souligné que les études d’intervention réalisées chez des êtres humains sont très limitées [23]. Ils ont suggéré avec bon sens de manger pendant les heures de veille et de réduire les prises alimentaires vespérales et nocturnes, bref de retrouver un bon rythme.

Stéatose hépatique

Le régime intermittent a fait l’objet de plusieurs travaux dans la stéatose hépatique non alcoolique. Une méta-analyse de six études regroupant plusieurs travaux a été conduite, mais différentes formes de régimes étaient regroupées et le comparateur était soit un autre régime, soit une absence d’intervention, ce qui en réduisait fortement l’intérêt [24]. Outre la perte de poids, une diminution significative des transaminases a été observée.

Antécédents de diabète gestationnel

Cent vingt et une femmes (IMC 32,6 kg/m2) ayant des antécédents de diabète gestationnel ont été randomisées en deux groupes : le premier suivait un régime intermittent classique 5:2 (deux jours à 500 kcal) et le second observait une restriction chronique à 1 500 kcal [25]. Moins de la moitié (49 %) n’ont pas terminé l’essai (12 mois) dans les deux bras. Les auteurs n’ont pas relevé de différence au niveau de nombreux critères : perte de poids, HbA1c, glycémie à jeun, insulinémie à jeun, homeostatic model assessment for insulin resistance et tolérance au glucose à deux heures. Malgré ces résultats, certains médias ont titré sur son intérêt !

Cancer

L’équipe de Valter D. Longo a mené des essais qui comparaient des sujets sous fasting mimicking diet (FMD) (cinq jours de jeûne consécutifs chaque mois pendant trois mois) et d’autres ne suivant aucun régime restrictif. Elle n’a pas mis en évidence d’inconvénient sur trois cycles, et a observé une perte de poids et une réduction de l’IGF-1 [26]. Dans une autre publication, un régime FMD a été appliqué en ouvert chez des patients ayant un cancer (du sein dans 55 % des cas), alors que le traitement anticancéreux étant maintenu [27]. Des modifications du système immunitaire considérées comme favorables ont été mises en évidence sans qu’aucune donnée clinique sur l’évolution de la maladie ne soit disponible.Dans un modèle de souris obèses non ménopausées et atteintes d’un cancer mammaire, le régime TRF a normalisé l’hyperinsulinémie, restauré l’expression des gènes liés aux rythmes circadiens, ralenti la croissance tumorale en l’absence de perte de poids et réduit les métastases pulmonaires [28]. Ces résultats sont prometteurs mais nécessitent d’être corroborés chez l’homme.

Chez les sportifs

Une étude a cherché à mesurer les effets du TRF associé à un entraînement contre résistance chez des femmes actives [29]. Quarante pratiquantes ont été randomisées en trois groupes, le premier suivant un régime TRF, le deuxième un régime TRF associé à la prise d’acide β-hydroxy-β-méthylbutyrique et le troisième un régime contrôle. Le groupe TRF consommait toutes ses calories entre douze et vingt heures, tandis que le groupe contrôle étalait ses prises alimentaires du matin au soir. Tous consommaient un supplément protéique (lactosérum) et avaient un apport protidique total semblable (1,6 g/kg/jour). En intention de traiter, aucune différence n’a été observée entre les trois groupes en ce qui concerne l’augmentation de la masse maigre, la perte de masse grasse et la performance physique.

Conclusion

Les régimes, ou jeûnes, intermittents ont le vent en poupe. Dans la gestion du poids, ils sont séduisants car ils promettent de meilleurs résultats avec moins de contraintes que les diètes restrictives. L’objectivité n’est toutefois pas toujours au rendez-vous ni dans les études ni dans certains médias. En outre, les résultats des travaux de qualité ne sont pas à la hauteur des attentes, quel que soit le type de régime intermittent, avec peu ou pas de différence par rapport à la restriction continue en termes de perte de poids, de changement de composition corporelle et de comportement. De surcroît, l’adhésion est modeste, voire médiocre. Certes, beaucoup d’études sont de qualité insuffisante mais on y observe, comme avec toute démarche de restriction, une reprise de poids au-delà de six mois. Il est aussi possible de considérer que le résultat n’est pas inférieur, de sorte que l’on pourrait accorder le choix aux patients qui le souhaiteraient. Cependant, il faut se poser la question du bien-fondé, en 2022, de la mise en place de régimes restrictifs continus ou intermittents, comme mesure clé en cas de surpoids ou d’obésité. Il y a sans doute beaucoup d’autres actions à mener pour faire évoluer les comportements. La question de l’intérêt du TRF dans le cancer mériterait d’être approfondie, mais en l’absence d’étude clinique probante, il convient de rester extrêmement prudent.Le jeûne intermittent sur la journée, qui prévoit huit heures de prise alimentaire et seize heures de jeûne complet, est devenu très populaire.

Déclaration de liens d’intérêts

L’auteur est membre du conseil scientifique de l’Ocha, du Gemo, de la Fict, de BEL, d’Holder, d’Aprifel et de l’IOT, au titre de l’Institut Pasteur de Lille.© 2022  Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Vous venez de découvrir l'article de J.-M. Lecerf  qui vient de paraître dans Pratiques en Nutrition S’ouvre dans une nouvelle fenêtre de juillet 2022

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Références

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1  La méta-analyse est basée sur une comptabilité complexe car toutes les études qu’elle regroupe n’ont pas mesuré l’ensemble des paramètres (poids, tour de taille, masse grasse, etc.).