L'édito de Julien - Maltraitance, passage obligé?
France | 10 octobre 2018
“De toute façon dans ton cursus, il y aura au moins un stage qui se passera mal”.
Cette phrase, je l’ai souvent entendue lors de mes études en IFSI.Comme une fatalité.Tu pourras bosser tant que ce tu veux, essayer d’évoluer au fur et à mesure des stages, tu auras toujours cette menace qui plane au dessus de toi : tomber sur un lieu d’apprentissage “maudit”, celui où bon nombre d’étudiant.e.s échoueront.
Mais un lieu de stage n’est pas en soit maltraitant. C’est l’équipe qu’il l’est. On peut toujours chercher à comprendre… un soignant qui souffre, c’est un soignant qui fait souffrir pourrait-on dire.Et alors ? Quelle qu’en soit la raison, vous ne devez JAMAIS accepter de souffrir dans un lieu de stage. Je lis encore trop de témoignages d’étudiant.e.s sur les réseaux sociaux : insultes, menaces d’invalidation de stage, pressions, moqueries : les actes sont légion.J’ai donc décidé de vous proposer un petit manuel d’autodéfense en 5 points pour vous aider dans votre parcours :
#1 : vous êtes en stage pour APPRENDRE : donc si la première semaine de votre premier stage vous n’avez pas la dextérité, c’est normal.
#2 : “Tu ne seras jamais une bonne infirmière, blablabla” : cela ne veut rien dire. La personne qui vous dit ça n’est pas pédagogue, et l’accompagnement des stagiaires est justement une des compétences propres à l’infirmier. Cette personne n’est donc pas non plus une bonne infirmière… Il est possible que vous ne soyez pas au niveau, et que ces études ne soient pas adaptées pour vous. La remise en question est difficile mais nécessaire. Elle doit être co-construite avec votre tuteur de stage et vos cadres formateurs. Si vous n’y arrivez pas, les équipes vous aideront à le comprendre avec des événements factuels, pas des insultes ou des éléments subjectifs. Il faut savoir les entendre.
#3 : Prenez de la distance : Quoi qu’il se passe, avertissez votre IFSI au plus vite, votre cadre formateur de référence saura vous aider. Vous pouvez aussi en parler à votre tuteur de stage, au cadre du service.
#4 : Prenez un peu plus de distance : Parlez-en à votre représentant des étudiants, à vos ami.e.s de promotion, mais surtout...
#5 : NE RESTEZ PAS SEUL.E : Celles et ceux qui insultent et humilient continuent car il n’y a aucune conséquence à leurs actes. N’oubliez pas que la parole libère et que même après le stage, il ne faut pas hésiter à faire remonter les défaillances. Ils ne pourront rien contre vous. La peur doit changer de camp.
Il est parfois difficile de sortir la tête de l’eau, nos études sont prenantes et nous avons tous à cœur de bien faire. Mais maltraiter un.e étudiant.e pour qu’il ou elle apprenne mieux n’a jamais été une méthode pédagogique enseignée…
Ce genre d’évènement peut arriver à tout le monde.
Quand j’étais étudiant, j’ai eu un bon parcours de stage, avec de bonnes appréciations. Puis, en 3e année, j’ai fait un stage de 8 semaines dans un service lourd. J’ai vécu 6 semaines de cauchemar avec des IDE que je considère comme incompétentes, et fières de casser de l’étudiant tout au long de l’année. Croyez-moi cela n’a pas été facile, et je ne pensais pas pleurer dans un service à plus de 30 ans. J’ai demandé à la cadre de me changer de tutrice au bout de 6 semaines. Bizarrement je suis passé de “danger public” à “bon stage et étudiant intéressé”.
Aujourd’hui, je suis exigeant avec les étudiant.e.s que j’encadre et je leur demande des connaissances et un minimum de travail. Mais jamais il ne me viendrait à l’idée de les insulter ou de me moquer d’eux.
Je vous laisse quelques ressources :
Il y a d’abord le livre coup de poing du Dr Valérie Auslender, qui décrit bien les violences faites aux étudiants en santé. “Omerta à l'hôpital S’ouvre dans une nouvelle fenêtre” éditions Michalon | Littérature encore avec l’ouvrage de Raphaëlle Jean-Louis : "Diplôme délivré(e), parole affranchie d'une étudiante infirmière S’ouvre dans une nouvelle fenêtre" éditions Michalon |
Et puis que faire si l’on subit ?
Il existe une organisation que vous connaissez sûrement, la FNESI (Fédération Nationale des Etudiant.e.s en Soins Infirmiers), qui sera là pour vous accompagner si vous en ressentez le besoin. http://fnesi.org/ S’ouvre dans une nouvelle fenêtre
Il existe aussi d’autres associations, je ne les connais pas toutes, mais je sais que ESIOP existe : étudiant.e.s en soins infirmiers Osons en Parler
https://esiop.jimdo.com/ S’ouvre dans une nouvelle fenêtre
Voilà, c’est fini pour ce mois-ci. Je reprends les éditos avec vous pour une saison. Je suis très heureux de vous retrouver pour ma part.
A bientôt et prenez soin de vous !
Julien
31 ans, IDE - Master II en gestion et management créateur du site www.thérapeutiqueactive.wordpress.com S’ouvre dans une nouvelle fenêtre - Twitter @Martinez_J_ S’ouvre dans une nouvelle fenêtre Toujours là pour t’agaçer, mais jamais pour penser à ta place 😉