L'infirmier en service d'urgence
20 février 2025
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L'infirmier(e) en service d'urgence S’ouvre dans une nouvelle fenêtreest un guide complet pour faciliter la prise de poste aux urgences.
I. Approche médico-légale et législation professionnelle II. Techniques de soins transverses et principaux examens III. Unité d'hospitalisation de courte durée IV Filière courte V. Filière longue VI. Déchocage VII. Infirmier(e) d'orientation et d'accueil VIII. Service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) IX. Pédiatrie X. Psychiatrie XI Prises en charge spécifiques
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Découvrez le chapitre 10 de la première partie de l'ouvrage, Approche médico-légale et législation professionnelle.
Sortie contre avis médical
Définition
La sortie contre avis médical est la possibilité donnée au patient de quitter l’établissement de santé, alors que l’équipe soignante voit une contre-indication pour sa santé ou sa vie.
Cette prérogative est fondée sur le principe du consentement du patient aux soins, prévu par le Code de la santé publique (CSP)
Causes
La sortie contre avis médical doit permettre de respecter le consentement du patient. Elle permet aussi de donner une alternative à la fugue du patient du service, qui, contrairement à la sortie contre avis médical, ne donne pas la possibilité au personnel soignant d’exposer les risques encourus par le patient.
Cependant, la sortie contre avis médical doit remplir certaines conditions :
le refus du patient doit être éclairé. Par conséquent, le patient doit être impérativement informé par le médecin des risques qu’il encourt en cas de départ ;
l’état du patient doit permettre de prendre ce type de décision avec discernement (par exemple pas de trouble cognitif, pas sous l’effet de stupéfiant, etc.).
Un délai de réflexion doit être donné au patient une fois que le soignant a exposé les risques encourus afin de déterminer s’il maintient sa décision de partir dans contre avis médical.
Si toutes les conditions sont remplies, le personnel soignant donne une feuille de décharge au patient qui doit dûment la compléter. Celle-ci est archivée dans le dossier patient et une copie est donnée au patient. Ce dernier peut revenir à tout moment sur sa décision.
Néanmoins, l’attestation de sortie contre avis médical ne protège ni le patient, ni le soignant. Elle ne suffit pas à prouver que l’information a été comprise par le patient.
La sortie contre avis médical est légiférée par le décret 90-1000 du 6 septembre 1995 du Code de déontologie médicale avec notamment deux articles :
l’article L. 1111-4 du CSP indique : « Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. Le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin […]. Le médecin a l’obligation de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité. Si, par sa volonté de refuser ou d’interrompre tout traitement, la personne met sa vie en danger, elle doit réitérer sa décision dans un délai raisonnable. Elle peut faire appel à un autre membre du corps médical. L’ensemble de la procédure est inscrit dans le dossier médical du patient […]. Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment » ;
’article R. 1112-62 du CSP stipule : « Si le médecin estime que cette sortie est prématurée et présente un danger pour leur santé, les intéressés ne sont autorisés à quitter l’établissement qu’après avoir rempli une attestation établissant qu’ils ont eu connaissance des dangers que cette sortie présente pour eux ».
Dans le cas d’un patient mineur ou d’un majeur protégé, l’attestation doit être remplie par le représentant légal (parent, tuteur, etc.).
Dans tous les cas, il est du devoir du médecin de fournir une possibilité de suivi et de traitement par ordonnance au patient partant contre avis, afin qu’il puisse poursuivre sa prise en soin s’il le souhaite.
Facteurs de risque
Il est important que les informations données sur l’état de santé du patient et les risques encourus soient parfaitement claires et sans ambiguïté. Le vocabulaire utilisé doit donc être adapté et une confirmation de ce qu’a compris le patient peut être nécessaire afin de s’assurer que le message ait bien été compris. Le délai de réflexion laissé au patient permet aussi qu’il réfléchisse aux conséquences d’une sortie.
Enfin, il est possible que le patient change d’avis et souhaite être soigné. Dans ce cas, il est important que ce changement soit tracé dans le dossier médical du patient afin qu’on ne puisse pas reprocher au personnel soignant d’avoir été à l’encontre du consentement du patient. Dans le cas où le patient revient au sein du service, mais n’est plus en capacité de donner son accord sur la prise en charge médicale et paramédicale, il doit également être soigné, car il n’est plus en mesure de donner son avis.
Risques
Le principal risque est l’aggravation de l’état de santé du patient a posteriori de sa sortie. C’est la raison pour laquelle l’attestation de sortie médicale doit être parfaitement remplie, car la responsabilité du soignant pourrait, dans certains cas, être engagée. Il faut par ailleurs prendre en compte le sentiment de frustration ou d’échec que le soignant peut ressentir dans le cas d’un patient qui refuse la prise en charge et quitte le circuit de prise en charge, malgré la nécessité de poursuivre des soins.
Dans ce cas précis, l’équipe soignante peut essayer de trouver deux témoins afin de leur faire remplir une attestation confirmant que le patient concerné a bien reçu les informations nécessaires. Cette attestation est insérée dans le dossier médical du patient et une copie lui est adressée.
Il est possible qu’un patient fugue avant que le médecin soit averti ou ait le temps de venir informer le patient des risques qu’il encourt pour sa santé. La fugue, contrairement à la sortie contre avis médical, ne décharge pas le personnel soignant de sa responsabilité de surveillance envers le patient. Il est donc important de suivre la procédure de déclaration de fugue propre à son établissement.
La déclaration d’attestation de sortie médicale doit impérativement être parfaitement remplie et conservée. Dans le cas contraire, en cas de dépôt de plainte du patient, le médecin peut voir sa responsabilité civile ou pénale engagée. Par ailleurs, s’il y a eu une négligence dans la prise en charge du patient, une attestation de déclaration de sortie contre avis médical ne permet pas de couvrir l’infirmier(e) de ces responsabilités.
Dans ce cas, le risque est que l’attestation de sortie contre avis médical n’ait aucune valeur légale. Il peut y avoir des conséquences civiles ou pénales, suite à un dépôt de plainte du patient, de ses proches ou de son représentant légal, qu’il y ait des répercussions pour sa santé ou non.
Conduite à tenir
Il faut dans un premier temps écouter la demande de patient de sortir de l’établissement, malgré une prise en charge non terminée. L’infirmier(e) peut essayer de comprendre la motivation du patient de partir et, si possible, le persuader de rester hospitalisé.
Dans le cas où le patient maintient son envie de sortir contre avis médical, l’infirmier(e) doit avertir le médecin pour qu’il puisse venir expliquer au patient la raison de son hospitalisation et, surtout, le risque qu’il encourt à sortir, avec la fin de prise en soin.
Après un délai de réflexion laissé au patient, si sa détermination est toujours de quitter contre avis, on demande au patient de remplir un document attestant de son désir. Une fois rempli, le document est ajouté au dossier patient et une copie lui est remise. Le médecin doit donner au patient des ordonnances ou des suivis afin qu’il puisse continuer sa prise en charge et sa surveillance.
Dans le cas où le patient refuse de signer l’attestation de sortie contre avis médical, deux témoins doivent compléter un procès-verbal permettant de justifier que toute la procédure a été réalisée dans les règles (patient informé et en capacité d’entendre et de comprendre la situation). Cette attestation de procès-verbal est consignée dans le dossier patient et une copie lui est adressé.
Logigrammes (figures 10.1 et 10.2)
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Figure 10.1. Sortie contre avis médical d’un patient majeur.
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Figure 10.2. Sortie contre avis médical d’un patient mineur.
Rôle infirmier
Situation
Monsieur B. (20 ans) est venu lui-même aux urgences pour des douleurs abdominales fébriles présentes depuis 6 jours. Ce jour-là, les urgences sont surchargées devant un nombre d’entrées important. Cependant, il a déjà vu un médecin qui lui a prescrit une prise de sang, dont les résultats ne sont pas encore tombés, afin d’adapter la suite de la prise en soin. Le patient demande le temps d’attente pour la suite de la prise en soin à l’infirmier et l’estime trop long. Il souhaite donc partir.
Rôle infirmier
Devant cette situation, l’infirmier agit en conséquence :
il essaie d’expliquer la situation au patient, aussi bien concernant la suite de sa prise en charge que l’attente ;
il alerte le médecin du souhait du patient de partir et qu’il reste hermétique à ses explications ;
il attend le passage du médecin qui explique aux patients les risques encourus ;
il donne l’attestation de sortie contre avis médical devant la persistance du choix du patient ;
il veille à la conformité du remplissage du document du patient ;
il archive l’attestation de sortie contre avis médical dans le dossier médical de Monsieur B. et lui donner une copie.
Le chiffre
Selon le site Internet Statista, en 2013, seul 0,5 % des patients sont sortis contre avis médical et 2 % sont partis sans avis médical1.
L'infirmier(e) en service d'urgence Faciliter la prise de poste aux urgences Aymeric Lapp, Jean-Christophe Beauchet, Marine Chapon, Frédéric Delagrée, Romuald Edeyer, Maxime Fradin, Antoine Gaudet, Laure Gloanec, Eric Gorrex, Océane Sergent, Marion Verdaguer ISBN 9782294782886 2025
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