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Maladie de Kawasaki

12 janvier 2022

Par Anne-Claire Nonnotte

Maladie de Kawasaki

Maladie de Kawasaki

Nous vous proposons de découvrir un extrait de l'ouvrage Cardiologie de l'enfant : du fœtus à l'adulte S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

Cardiologie de l'enfant : du fœtus à l'adulte

Cardiologie de l'enfant : du fœtus à l'adulte

Maladie de Kawasaki

Mathilde Méot, Fanny Bajolle

Points clés

  • Il s’agit de la vascularite la plus fréquente chez l’enfant, mais sa cause exacte reste inconnue (prédisposition génétique potentielle et facteur déclenchant infectieux).

  • La maladie de Kawasaki peut concerner tous les âges pédiatriques avec une particulière gravité des atteintes coronaires chez le nourrisson.

  • Les complications coronaires surviennent chez 25 % des patients non traités. Leur évolution peut être responsable de thromboses et/ou de sténoses coronaires tout au long de la vie.

  • Son suivi à long terme est stratifié selon le risque coronaire initial.

  • La survenue de la maladie de Kawasaki avec atteinte coronaire initiale impose une surveillance cardiologique à vie associée à la prévention des facteurs de risque cardiovasculaire

Généralités

Rapportée pour la première fois dans la littérature en 1967, la maladie de Kawasaki a donc un peu plus de 50 ans. Son tropisme lésionnel électif pour les artères coronaires fait d’elle la première cause de cardiopathie acquise chez l’enfant. L’optimisation et la précocité de la prise en charge initiale grâce à l’administration d’immunoglobulines intraveineuses (IgIV) ont bouleversé le pronostic de cette vascularite infantile. L’utilisation raisonnée, en fonction du risque coronaire, d’un traitement anticoagulant au long cours devrait contribuer à améliorer le devenir cardiologique des patients les plus sévèrement atteints. Enfin, pour tous, une attention très particulière doit être portée à vie à la prévention des facteurs de risque cardiovasculaire [1].

Épidémiologie

  • Depuis sa première description au Japon par Tomisaku Kawasaki [1], l’incidence de cette vascularite multisystémique continue d’augmenter à travers le monde, bien qu’elle reste toujours plus élevée en Asie (incidence 30 fois plus importante au Japon qu’en France) [2].

  • Elle est désormais décrite dans tous les groupes ethniques et toucherait 9 pour 100 000 enfants français de moins de 5 ans pour 260 au Japon.

  • Des formes de l’adulte ont été rapportées pour la première fois en 1977. Les symptômes principaux étant les mêmes que chez l’enfant.

Physiopathologie

  • La maladie de Kawasaki est une panvascularite qui atteint les artères de moyen calibre, avec un tropisme particulier pour les artères coronaires.

  • Son étiologie demeure très incertaine [3].

  • Elle est probablement due à l’exposition à un agent environnemental ou infectieux combinée à une prédisposition génétique [3]. Ainsi, dans la littérature japonaise, le taux de récurrence individuelle est de 3 % et le risque relatif de survenue de la maladie est multiplié par 10 dans la fratrie d’un enfant atteint par rapport à la population générale dans l’année qui suit [2]. Plusieurs gènes de prédisposition ont été identifiés, dont FCGR2A, CASP3, HLA de classe II, BLK, IPTKC et CD40

  • En  outre,  la  physiopathologie  de  la  maladie  de Kawasaki fait intervenir des perturbations immunologiques majeures et une réaction inflammatoire aberrante [3], raisons pour lesquelles de nouvelles cibles thérapeutiques sont en cours d’évaluation (ciclosporine, abciximab, plasmaphérèse).

Pronostic

  • Le pronostic de la maladie de Kawasaki est corrélé  à  la  survenue  de  lésions coronaires qui peuvent apparaître après plusieurs jours d’évolution et être repérées à l’échocardiographie.

  • Le taux de mortalité calculé au Japon est actuellement de 0,015  %. Le pic de mortalité de la maladie se situe entre le 15e et le 45e jour suivant le début de la fièvre, en raison de la thrombocytose et de l’hypercoagulabilité. Il est donc crucial de surveiller les enfants avec atteintes coronaires initiales durant cette période.

  • De  nouveaux outils d’imagerie se sont développés  afin  d’aider  à l’évaluation  à long  terme de la maladie de Kawasaki  (anatomie et  répercussion sur la fonction cardiaque) de manière non  invasive  (coroscanner,  PET-scan)  et/ou non  irradiante  (IRM  de  stress)  [4].  Enfin,  de larges  études  ont  permis  d’évaluer  les  techniques  interventionnelles  et  chirurgicales  pour la réparation des coronaropathies les plus sévères [ 1 , 5 ].

Diagnostic

Clinique

La maladie de Kawasaki, depuis qu’elle est traitée de manière précoce et efficace par les IgIV, est devenue exceptionnellement grave. Il est donc impératif d’en faire le diagnostic le plus tôt possible.

  • Elle  survient  préférentiellement  en  hiver  et  au début  du  printemps.  Elle  touche  avec  prédilection les enfants âgés de  1 à 5 ans (plus fréquemment les garçons que les filles) mais peut également  survenir  chez  le  nourrisson de moins de 6 mois pour qui le risque coronaire est plus grand [6] . Il faut donc savoir y penser à tous les âges.

  • Son diagnostic est clinique [ 1 , 2].

  • Le tableau « classique » est aigu, dominé par une fièvre prolongée de plus de 5 jours associée à une irritabilité constante

    apparaissant brutalement, une conjonctivite bilatérale, un exanthème polymorphe, une chéilite, des œdèmes des extrémités et des adénopathies cervicales ( figure 10.1 ).

  • Des formes incomplètes existent également. Leur gravité n’en est pas moindre. Pour ces dernières, un arbre décisionnel proposé par l’ American Academy of Pediatrics permet de guider le pédiatre à l’aide d’outils cliniques et biologiques simples ( figure 10.1 ).

  • L’échographie cardiaque peut aussi orienter le diagnostic ( figure 10.2 ).

  • Enfin, certains diagnostics différentiels égarent parfois le clinicien et retardent la prise en charge ( figure 10.1 ).

  • Une co-infection virale ne permet pas d’exclure une maladie de Kawasaki.

Fig10 1

Fig10 1

Fig10 2

Fig10 2

Complications coronaires

  • Les complications coronaires font toute la gravité de la maladie de Kawasaki ( encadrés 10.1 à 10.3 ), notamment la survenue d’ anévrysmes géants susceptibles de provoquer une ischémie myocardique par thrombose coronaire. Ces complications sont particulièrement fréquentes en l’absence de traitement (25 % versus 4 % en cas de traitement précoce).

  • Atteintes coronaires ( encadré 10.2 , figure 10.2 ) : – elles sont désormais définies en fonction du Z-score coronaire déterminé par l’ échocardiographie; – 20 % des patients ont une dilatation coronaire et 5 % ont un anévrysme (géant dans 1 % des cas).

  • La réalisation d’une échocardiographie par un cardiopédiatre est donc indispensable mais elle ne doit pas retarder l’initiation du traitement par IgIV.

  • Le bilan cardiologique doit aussi comprendre un ECG à la recherche de troubles de conduction, de troubles du rythme (atteinte inflammatoire du système conductif) ou de tout argument électrique en faveur d’une ischémie, d’une myocardite ou d’une péricardite.

Encadré 10.1

Critères de gravité de la maladie de Kawasaki

Ils justifient l’initiation d’une corticothérapie dès la première dose d’IgIV.

  • État de choc (Kawasaki Shock Syndrom).

  • Enfants de moins d’un an.

  • Inflammation majeure (CRP, dysfonction hépatique, hypoalbuminémie).

  • Stigmates d’activation macrophagique.

  • Anévrismes coronaires ou périphériques initiaux.

  • Score de risque élevé, tel qu’un score de Kobayashi ≥ 5 (encadré 10.2).

Encadré 10.2

Score de Kobayashi

Risque coronaire élevé siscore total ≥ 5.

  • Âge ≤ 1 an → 1 point.

  • Traitement dans les 4 premiers jours de fièvre → 2 points.

  • Natrémie ≤ 130 mmol/l → 2 points.

  • ≥  80  % polynucléaires neutrophiles → 2 points.

  • Plaquettes ≤ 300 ∙ 109/l → 1 point.

  • ASAT ≥ 100 UI/l → 2 points.

  • CRP ≥ 100 mg/l → 1 point.

Encadré 10.3

Description coronaire

  • Aucune atteinte coronaire :  Z-score < 2.

  • Dilatation coronaire :2≤  Z-score < 2,5.

  • Anévrysme  coronaire  de  petite  taille  : 2,5 ≤  Z-score < 5.

  • Anévrysme  coronaire  de  taille  moyenne  : 5≤  Z-score < 10etvaleurabsolue< 8 mm.

  • Anévrysme  coronaire  géant :  Z-score ≥  10 ou valeur absolue≥ 8 mm.

Suivi :

– pour les patients sans complication coronaire , l’échographie cardiaque doit être répétée à 1 à 2 semaines puis 5 à 6 semaines après le traitement par IgIV. – pour les patients avec anomalies coronaires importantes et évolutives, un suivi échographique plus rapproché est nécessaire, afin de rechercher la présence de thrombus intracoronaire et de déterminer le risque coronaire ; –  au  moins  deux  échographies  par  semaine jusqu’à  ce  que  les  mesures  des  dimensions luminales arrêtent de progresser, puis au moins une par semaine durant les 45 premiers jours, puis une par mois jusqu’au 3e mois.

Prise en charge

Traitement initial

La prise en charge initiale de la maladie de Kawasaki est urgente et repose sur l’association d’ IgIV et d’ aspirine à dose anti-inflammatoire ( figure 10.3 ) [7] . Une corticothérapie doit désormais être associée à la première dose d’IgIV dans les formes graves d’emblée (cf. encadré 10.1 et 10.2 ) et à la deuxième dose d’IgIV dans les formes réfractaires. Les autres anti-inflammatoires sont proscrits en raison du risque de syndrome de Reye.

  • On parle de Kawasaki réfractaire lorsque la fièvre, l’inflammation ou les signes cliniques persistent au-delà de 48 heures après un traitement bien conduit : – cette réponse insatisfaisante au traitement est associée à un risque plus élevé d’atteinte coronaire ;  – une deuxième dose d’IgIV doit alors être administrée (2 g/kg).

  • Après obtention de l’apyrexie et selon la sévérité de la maladie, une antiagrégation plaquettaire par aspirine (3–5 mg/kg par jour) doit être maintenue au moins 8 semaines et à vie en cas de lésions coronaires persistantes.

  • En cas d’anévrysmes géants ( encadré 10.3 ), une anticoagulation curative doit être commencée au plus vite par héparine, relayée par un traitement anticoagulant par antivitamine K (AVK) ( figure 10.2 ). L’INR cible est de 2,5 et une éducation aux AVK est indispensable.

Place de la corticothérapie

Selon les recommandations européennes (SHARE initiative [2] ), une corticothérapie doit être associée :

  • à la première dose d’IgIV dans les populations à risque (cf. encadré 10.1 et 10.2 ) ;

et  :

  • à la deuxième dose d’IgIV en cas de résistance à la première dose.

Les différents schémas thérapeutiques proposés sont :

  • méhylprednisolone 1 mg/kg/12 heures IVSE (Solumedrol®) pendant 5 à 7 jours ou jusqu’à normalisation de la CRP, puis relaisper ospar prednisone ou prednisolone (Cortancyl® ou Solupred®) à la dose de 2 mg/kg/jour avec décroissance sur la 2 e et 3 e  semaine puis arrêt ; ou  :

  • méthylprednisolone 10 à 30  mg/kg/24  heures IV (bolus Solumedrol®) pendant 3 jours (maximum 1 g/ jour), puis relais par prednisone ou prednisolone per os (Cortancyl® ou Solupred®) à la dose de 2 mg/kg/ jour pendant 4  jours (ou normalisation de la CRP), puis décroissance sur la 2 e et 3 e semaine puis arrêt. Dans tous les cas, il faut informer sur les effets secondaires des corticoïdes et associer une protection gastrique efficace par Inexium®per os à 2 mg/kg/jour.

  • En  cas  de  formes  coronaires  sévères  ou  de fièvre rebelle, des traitements complémentaires peuvent être discutés au cas par cas , tels que :antagonistedel’IL-1(anakinra),bolus de corticoïdes, anti-TNFα(infliximab)  [8],ciclosporine, double anti agrégation plaquettaire(clopidogrel).

  • On  rappelle  qu’il  est  préférable  de  différer  la vaccinationRORetvaricellede11 mois après une perfusion d’IgIV.

Traitement à long terme, suivi

  • Si le tableau initial de la maladie de Kawasaki est aigu et mime une maladie pédiatrique, son évolution est, elle, chronique, en particulier en cas de lésions coronaires non régressives. Des complications tardives, telles que des thromboses et/ou des sténoses coronaires, peuvent apparaître tout au long de la vie.

  • En cas d’anévrysmes géants, les patients ont un risque majoré d’infarctus et de mort subite dans les 2 premières années qui suivent le diagnostic mais ils sont également plus à risque de syndrome coronarien aigu à l’âge adulte [9] . Ils ne doivent donc pas être perdus de vue et un suivi à long terme par un cardiopédiatre doit être organisé, à l’image de celui proposé par le Committee On Rheumatic Fever, Endocarditis, and Kawasaki Disease et adapté par le Centre de référence M3C-Necker ( figure 10.3 ). Ce dernier est stratifié en fonction de la gravité des lésions coronaires initiales selon un arbre décisionnel précis [2] .

  • Enfin, la transition vers l’âge adulte est indispensable et peut faire l’objet d’un programme d’éducation thérapeutique [10] . Les femmes avec des anévrysmes coronaires séquellaires devront discuter de tout projet conceptionnel avec leur cardiologue.

  • En cas de lésions coronaires persistantes (anévrysmes ou sténoses), les patients sont considérés à haut risque cardiovasculaire. Ils doivent donc être éduqués à la prévention des principaux autres facteurs de risque, tels que le tabac et les dyslipidémies. La consommation de cocaïne doit aussi être redoutée. L’ activité sportive doit être encouragée.

Fig10 3

Conclusion

La maladie de Kawasaki est une vascularite fréquente désormais bien connue des pédiatres. L’existence d’arbres décisionnels stratifiés en permet une prise en charge uniformisée et optimisée, notamment pour limiter la survenue de graves complications coronaires. Pour autant, la vigilance diagnostique doit continuer d’être maximale pour les formes les plus atypiques, telles que celles du jeune nourrisson dont l’expression clinique est souvent limitée à une fièvre nue prolongée sans cause retrouvée. La prise en charge des patients doit se poursuivre à long terme et inclure, au moins pour tous, la prévention des facteurs de risque cardiovasculaires.

Les auteurs

Dr Mathilde Méot, hôpital Necker-Enfants Malades, Paris Dr Fanny Bajolle, hôpital Necker-Enfants Malades, Paris.

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Cardiologie de l’enfant : du fœtus à l’adulte S’ouvre dans une nouvelle fenêtre © 2022, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

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En savoir plus

[1]  McCrindle BW, Rowley AH, Newburger JW, Burns JC, Bolger AF, Gewitz M, et  al. Diagnosis,treatment, and long-term management of Kawasaki disease: A scientific statement for health professionals from the American Heart Association. Circulation 2017;135(17):e927–99. [2]  De Graeff N, Groot N, Ozen S, Eleftheriou D, Avcin T, Bader-Meunier B, et  al. European consensusbased recommendations for the diagnosis and treatment of Kawasaki disease –The SHARE initiative. Rheumatology (Oxford) 2019;58(4):672– 82. [3]  Galeotti C, Kaveri SV, Cimaz R, Koné-Paut I, Bayry J. Predisposing factors, pathogenesis and therapeutic intervention of Kawasaki disease. Drug Discov Today 2016;21(11):1850–7. [4]  Vijarnsorn C, Noga M, Schantz D, Pepelassis D, Tham EB. Stress perfusion magnetic resonance imaging to detect coronary artery lesions in children. Int J Cardiovasc Imaging 2017;33(5):699–709. [5]  Ochi M. Review: surgical treatment of giant coronary aneurysms in pediatric patients with Kawasaki disease. Gen Thorac Cardiovasc Surg 2018;66(3):121–9. [6]  Salgado AP, Ashouri N, Berry EK, Sun X, Jain S, Burns JC, et  al. High risk of coronary artery aneurysms in infants younger than 6 months of age with Kawasaki disease. J Pediatr 2017;185:112– 6 e1. [7]  Lo MS, Newburger JW. Role of intravenous immunoglobulin in the treatment of Kawasaki disease. Int J Rheum Dis 2018;21(1):64–9. [8]  Masuda H, Kobayashi T, Hachiya A, Nakashima Y, Shimizu H, Nozawa T, et  al. Infliximab for the treatment ofrefractory Kawasaki disease:Anationwide survey in Japan. J Pediatr 2018;195:115–20 e3. [9]  Newburger JW, Takahashi M, Burns JC. Kawasaki Disease. J Am Coll Cardiol 2016;67(14):1738–49. [10]  Kamiyama H, Ayusawa M, Ogawa S, Saji T, Hamaoka K. Health-care transition after Kawasaki disease in patients with coronary artery lesion. Pediatr Int 2018;60(3):232–9