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MEDECINE INTENSIVE REANIMATION Hyperthermie et coup de chaleur

France | 21 juin 2023

Par Monique R

Hyperthermie et coup de chaleur

Hyperthermie et coup de chaleur

Diagnostic et prise en charge du coup de chaleur

Nous vous invitons à découvrir le chapitre 60 du Référentiel des Collèges Médecine intensive – réanimation, urgences et défaillances viscérales aiguë sous l'égide du Collège des enseignants de médecine intensive-réanimation

Les modifications climatiques actuelles sont telles qu'il est devenu incontournable de bien connaître l'hyperthermie et le coup de chaleur, la probabilité de devoir les prendre en charge ou les prévenir étant devenu importantes en période estivale, y compris en France.

Médecine intensive – réanimation, urgences et défaillances viscérales aiguë

Médecine intensive – réanimation, urgences et défaillances viscérales aiguë

extrait de l'introduction

Chapitre 60

Hyperthermie et coup de chaleur Focus MÉDECINE INTENSIVE-RÉANIMATION

Situation de départ 45 Hyperthermie, fièvre

Objectifs pédagogiques Cet item est hors ECN, mais compte tenu de la fréquence de cette pathologie (qui augmentera, par le réchauffement climatique), le Collège des enseignants de médecine intensive-réanimation a souhaité vous présenter ce chapitre.

Introduction I. Comment faire le diagnostic d'une hyperthermie et d'un coup de chaleur ? II. Quels sont les critères de gravité ? III. Quelle est la prise en charge thérapeutique à adopter ?

Introduction

(connaissances de rang A)L'hyperthermie est à différencier de la fièvre. Toute élévation de la température corporelle≥ 37,5 °C doit faire rechercher une infection (bactérienne, virale, fongique ou parasitaire). Dans le cadre d'une infection, il s'agit d'une fièvre. D'un point de vue physiopathologique, la fièvre correspond à une élévation de la température centrale sous l'influence de substances biologiques pyrogènes. L'augmentation de la température dans le contexte d'une fièvre est adaptée et répond à un besoin de l'organisme, au moins au départ. L'hyperthermie est liée à une augmentation non régulée de la thermogenèse et/ou à un échec de la thermolyse (normalement assurée par le couple sudation/évaporation). Elle peut être d'origine endogène (augmentation de la thermogenèse comme au cours d'un exercice physique), d'origine exogène (augmentation de la température extérieure) ou mixte.Il s'agit principalement d'une cause environnementale (on parlera alors de coup de chaleur classique dans les formes les plus sévères) ou d'une exposition médicamenteuse ou toxique (syndrome malin des neuroleptiques, syndrome sérotoninergique, intoxication aux amphétamines ou à la cocaïne…). Les modifications climatiques actuelles sont telles qu'il est devenu incontournable de bien connaître l'hyperthermie et le coup de chaleur, la probabilité de devoir les prendre en charge ou les prévenir étant devenu importantes en période estivale, y compris en France.

Médecine intensive – réanimation, urgences et défaillances viscérales aiguës © 2021, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Vignette clinique

Madame G., 23 ans, est amenée aux urgences par les pompiers pour un malaise et des vomissements au décours d'un marathon en pleine journée chaude et pluvieuse au mois de juin. Elle a présenté un épisode de crise tonico-clonique généralisée spontanément résolutive au cours du transport.

Elle ne présente pas d'antécédent et ne prend pas de traitement. Elle est allergique à l'azithromycine. Les paramètres vitaux sont : PA 95/66 mmHg, FC 129 bpm, température 41 °C, FR 28 cycles/min, SpO99 % sous 4 litres/min d'oxygène.

Votre examen physique retrouve des frissons diffus, des marbrures des genoux, une peau sèche et un score de Glasgow à 13 (réponse verbale incohérente). Le reste de l'examen est sans particularité. Vous n'avez pas d'argument pour un traumatisme.

L'ECG retrouve une tachycardie sinusale à 129 bpm.

Vous mettez en place immédiatement un refroidissement par une couverture réfrigérée et des vessies de glace et débutez un remplissage vasculaire par NaCl 0,9 %.

Vous demandez également un bilan biologique sanguin qui retrouve : potassium = 5,5 mmol/l, CRP < 1 mg/l, sodium = 147 mmol/l, urée = 25 mmol/l, créatinine = 195 μmol/l, CPK = 967 UI/l, TP 45 %, protides = 90 g/l, Hb = 18 g/dl, plaquettes = 135 G/l. Le reste du ionogramme sanguin et de la numération est normal.

Devant l'épisode de convulsion, les troubles neurologiques avec propos incohérents et l'hyperthermie, vous souhaitez éliminer une méningoencéphalite. Il n'y a cliniquement aucun signe de focalisation et pas de raideur méningée. Vous décidez donc de réaliser une ponction lombaire. L'examen biochimique et cytologique est normal et l'examen direct est négatif en bactériologie. Vous excluez donc l'hypothèse d'une méningoencéphalite. La patiente se dégrade alors sur le plan neurologique avec l'installation d'un coma Glasgow 3 et sur le plan hémodynamique avec une pression artérielle à 85/32 mmHg. Vous appelez la réanimatrice de garde devant ce tableau de coup de chaleur. La patiente est intubée et mise sous ventilation mécanique ; un remplissage par NaCl 0,9 % est poursuivi et la noradrénaline est introduite. La patiente est transférée en réanimation.

Un refroidissement externe est réalisé à l'aide d'un ventilateur et d'un drap humidifié.

Le bilan biologique est complété : ASAT = 455 UI/l, ALAT = 522 UI/l, TP = 25 %, facteur V = 32 %, pH = 7,01, HCO3 = 10 mEq/l, PaCO2 = 50 mmHg, lactate = 25 mg/l.

Vous complétez le refroidissement externe à l'aide d'un dispositif dédié et débutez une épuration extrarénale.

La patiente présente donc une défaillance multiviscérale : hémodynamique, neurologique, hématologique (CIVD), rénale, métabolique (acidose lactique) et hépatique.

L'évolution sera progressivement favorable après 10 jours de prise en charge en réanimation.

I. Comment faire le diagnostic d'une hyperthermie et d'un coup de chaleur ?

La définition du coup de chaleur repose sur l'association des éléments suivants :

  • une hyperthermie avec une température centrale supérieure à 40 °C ;

  • un syndrome neurologique central pouvant être polymorphe : troubles de la vigilance, de la confusion jusqu'au coma en passant par un délire et des troubles du comportement. Il existe fréquemment des convulsions. Un déficit focal peut exister, de mécanisme variable (ischémie, hémorragie, œdème…) ;

  • absence d'argument en faveur d'une origine infectieuse ;

  • présence d'un contexte évocateur (canicule, exposition à la chaleur, exercice physique intense).

Le début peut être brutal ou précédé d'une altération de l'état général avec présence de prodromes aspécifiques tels que : asthénie, douleurs abdominales, vertiges, vomissements, crampes musculaires, sueurs profuses. À la phase d'état, contrastant avec le niveau d'hyperthermie, la présence d'une peau sèche (témoin du dépassement des capacités sudoripares) est un signe évocateur du diagnostic.

On distingue deux entités nosologiques en fonction du facteur favorisant en cause :

  • le coup de chaleur classique, d'origine « climatique », à l'occasion des vagues de chaleur, lié à une exposition prolongée à des températures ambiantes élevées. Il touche, sous nos latitudes, préférentiellement les sujets âgés ou vulnérables en période caniculaire ;

  • le coup de chaleur d'exercice, conséquence d'un effort physique intense et prolongé, pouvant être favorisé par une atmosphère chaude et humide. Trois situations sont particulièrement à risque, y compris chez un sujet jeune en bonne santé : les théâtres d'opérations militaires en situations extrêmes, les compétitions de sports de fond (marathon), les travaux de force en ambiance chaude et/ou enceinte close (travaux publics, sidérurgie).

Certains terrains sont particulièrement à risque : âges extrêmes de la vie, isolement social, prise de médicaments ou de toxiques favorisant l'hyperthermie (neuroleptiques, antidopaminergiques). On retrouve fréquemment des situations mixtes où coexistent à la fois des facteurs comportementaux (effort physique) et environnementaux (vague de chaleur ± humidité) ainsi qu'une grande variabilité de la susceptibilité individuelle face à ces conditions.

Devant un tableau d'hyperthermie maligne avec signes neurologiques, il faudra savoir évoquer d'autres diagnostics. On pensera notamment, en fonction de la présentation clinique et du contexte, à éliminer la méningoencéphalite infectieuse et les causes toxiques ou médicamenteuses (encadré 60.1). Néanmoins, en situation climatique à risque (vague de chaleur) ou de contexte particulier (activité physique majeure), il faut aussi savoir limiter les examens complémentaires à la recherche de diagnostics alternatifs.

Encadré 60.1

Étiologies médicamenteuses et toxiques

Le syndrome sérotoninergique doit être évoqué chez un patient récemment traité ou intoxiqué par un inhibiteur sélectif de la sérotonine.

Syndrome malin des neuroleptiques C'est une complication rare, consécutive à l'utilisation de phénothiazines ou de butyrophénones. Une latence de 2 à 15 jours après le début du traitement est habituelle. Cependant, l'apparition de symptômes après l'arrêt du traitement (en particulier avec les formes galéniques « retard ») ou précocement en cas de surdosage, n'élimine pas le diagnostic. L'hyperthermie est sévère, parfois supérieure à 40 °C, associée à des sueurs profuses, une rigidité musculaire extrapyramidale. La survenue d'une telle complication contre-indique de manière définitive cette classe thérapeutique.

Hyperthermie maligne peranesthésique C'est une complication peropératoire rare mais grave, consécutive à l'anesthésie générale. Elle est liée aux gaz halogénés ou aux curares dépolarisants. Le diagnostic et la prise en charge sont du domaine de la spécialité. En plus des causes médicamenteuses, de nombreuses drogues sont susceptibles d'induire ou de participer à une hyperthermie.

Un prélèvement de tubes sanguins et urinaires conservatoires à visée toxicologique est recommandé devant toute hyperthermie !

Quiz

L'étiologie facile ! Madame B., 29 ans, est amenée aux urgences pour altération de l'état général. Antécédent : bouffée délirante aiguë apparue suite à son licenciement il y a un mois, actuellement sous neuroleptiques depuis 10 jours. Histoire clinique : asthénie, anorexie depuis 48 heures, avec frissons motivant la consultation aux urgences accompagnée de son conjoint. Cliniquement : PA 95/66 mmHg, FC 129 bpm, température 41 °C, FR 28 cycles/min, SpO99 % en air ambiant. Votre examen physique retrouve des frissons diffus, des marbrures des genoux et une patiente Glasgow 13 (réponse verbale incohérente). Le reste de l'examen est sans particularité hormis une rigidité musculaire. Vous n'avez pas d'arguments pour un traumatisme. Le bilan biologique sanguin retrouve : potassium = 5,5 mmol/l, CRP = 11 mg/l, sodium = 147 mmol/l, urée = 23 mmol/l, créatinine = 132 μmol/l, CPK = 967 UI/l, protides = 70 g/l, Hb = 15 g/dl, plaquettes = 147 G/l, Leucocytes = 12 000/mm3, ASAT = 98 UI/l, ALAT = 95 UI/l ; le reste du ionogramme sanguin et de la numération-formule sanguine est normal. Quel diagnostic étiologique évoquez-vous pouvant être à l'origine de l'hyperthermie ? Quels examens réalisez-vous pour le confirmer ou l'infirmer ?

Réponse au quiz

Vous évoquez un syndrome malin des neuroleptiques. En effet, on retrouve la prise de neuroleptiques, le délai est compatible (2 à 15 jours), le tableau clinique également avec notamment la rigidité musculaire extrapyramidale. En cas de prise d'un inhibiteur sélectif de la sérotonine (comme en cas de dépression), il aurait fallu évoquer le syndrome sérotoninergique.

Examens pour le confirmer : aucun pour le diagnostic de syndrome malin des neuroleptiques mais il faut avant tout éliminer une origine infectieuse, notamment une méningite devant les troubles neurologiques et l'hyperthermie. En l'absence de contre-indication, une ponction lombaire est à réaliser.

II. Quels sont les critères de gravité ?

En l'absence de prise en charge, le tableau peut aboutir à une défaillance multiviscérale :

  • signes de gravité neurologiques : troubles de la vigilance, convulsions, déficits focaux ;

  • état de choc de mécanisme distributif justifiant une expansion volémique et le recours aux catécholamines ;

  • signes de gravité respiratoires : insuffisance respiratoire aiguë pouvant évoluer vers un SDRA et justifier le recours à la ventilation mécanique ;

  • insuffisance rénale aiguë pouvant justifier une épuration extrarénale ;

  • atteinte hématologique avec coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) ;

  • rhabdomyolyse ;

  • hépatite aiguë grave, parfois fulminante, pouvant conduire à la transplantation hépatique.

L'évolution du coup de chaleur peut être rapidement défavorable en l'absence de traitement. La mortalité, toutes causes confondues, survient dans environ 30 à 50 % des cas. Le pronostic fonctionnel est également un enjeu du traitement. En effet, en fonction de la durée d'hyperthermie et de l'importance des lésions cérébrales, des séquelles neurologiques définitives sont observées dans 20 à 30 % des cas (ataxie, troubles sensoriels, vertiges, syndrome cérébelleux, troubles des fonctions supérieures…).

III. Quelle est la prise en charge thérapeutique à adopter ?

A. Prise en charge initiale

S'agissant d'une pathologie à risque évolutif, les patients atteints de coup de chaleur doivent être hospitalisés. Devant la gravité et le risque évolutif, les patients doivent être admis en unité de surveillance continue ou en réanimation.

B. Traitement spécifique

La base du traitement repose sur le refroidissement. L'objectif à atteindre est de ramener la température corporelle centrale en dessous de 39 °C dans les meilleurs délais (idéalement dans la première heure de prise en charge). Ce refroidissement nécessite une surveillance continue et fiable de la température. Il existe différents systèmes pour cela : sonde thermique œsophagienne, sonde thermique sur sonde vésicale. Ils ont tous en commun de monitorer une température interne.

Plusieurs techniques de refroidissement sont disponibles ; seules les méthodes conductives externes sont présentées ici.

La technique la plus simple est le « tunnel », associant convection et conduction. On couvre le malade d'un drap mouillé, posé sur des arceaux, et complété de blocs de glace, dans l'idéal posés à proximité des axes vasculaires. Un ventilateur est ajouté au pied du lit. Le refroidissement est cependant difficile à gérer avec cette technique en raison d'une inertie importante. Des techniques avancées plus fiables sont disponibles en réanimation : système automatisé asservi à la température, avec par exemple des dispositifs dans lesquels circulent de l'eau refroidie dont la température s'adapte à la température cible en fonction de celle du patient.

C. Prise en charge des défaillances d'organes

La prise en charge symptomatique des défaillances d'organes constitue également une priorité du traitement. Elle repose, en milieu de réanimation, sur les différents supports d'organes adaptés au niveau de gravité des patients.

D. Traitement préventif

Le meilleur traitement du coup de chaleur demeure la prévention. Compte tenu des évolutions climatiques, avec comme conséquence la récurrence probable de futures vagues de chaleur intense en Europe, ces mesures doivent être largement diffusées. La prévention des coups de chaleur repose en effet sur l'application de deux mesures simples :

  • limiter les facteurs favorisants chez les sujets à risque : vaincre autant que faire se peut l'isolement, limiter l'exposition à la chaleur, protéger du soleil, porter des vêtements légers, favoriser l'accès aux espaces climatisés, limiter l'exercice physique en période caniculaire, hydrater et contrôler les apports hydrosodés, limiter l'usage des diurétiques, des antihypertenseurs, des psychotropes… ;

  • appliquer un système de veille sanitaire en « temps réel » : plan national Canicule mis en place en France depuis 2004 pour prévenir l'impact sanitaire des vagues de chaleur ; coordonné par les préfets, le plan Canicule comporte trois niveaux reposant sur l'évaluation concertée des risques météorologiques et sanitaires et permettant de déployer des actions de prévention et des mesures de gestion de crise avec mobilisation des parties prenantes  au niveau national et au niveau local.

On pensera aussi à ces mesures de prévention chez les malades hospitalisés fragilisés : adaptation de l'hydratation, contrôle de la température, etc.

Tic-tac…

<5 min

  • Évoquer le diagnostic d'hyperthermie et évaluer sa gravité

  • Avoir évoqué les diagnostics alternatifs et programmé les éventuels examens nécessaires pour les infirmer

< 30 min

  • Mettre en place les mesures de refroidissement adaptées

  • Orienter le patient vers une unité de soins critiques selon la gravité

  • Débuter le traitement des défaillances et complications

< 60 min

  • Prise en charge thérapeutique adaptée à l'étiologie

  • Surveillance/traitement des complications

Médecine Intensive, réanimation, urgences et défaillances viscérales aiguës CEMIR ISBN  9782294769580 7édition, 2023 en savoir plus

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