Nouvelle édition du Référentiel de Pédiatrie
France | 20 novembre 2023
Découvrez la nouvelle édition 2023 de Pédiatrie S’ouvre dans une nouvelle fenêtre, dans la collection des Référentiels des Collèges S’ouvre dans une nouvelle fenêtre à travers le chapitre 18.
CHAPITRE 18
Items 274, 355 –Vomissements
I. Pour bien comprendre II. Conduite diagnostique générale III. Prise en charge thérapeutique IV. Points clés sur l’hématémèse
Items, objectifs pédagogiques
Item 274 – Vomissements du nourrisson, de l’enfant et de l’adulte
Connaître les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
Connaître les principes de la prise en charge médicamenteuse (indication/non indication) et non médicamenteuse.
Item 355 – Hémorragie digestive
Diagnostiquer une hémorragie digestive.
Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge pré-hospitalière et hospitalière.
Avant de commencer…
Les vomissements sont un motif fréquent de consultation, souvent en urgence.
Les deux questions principales auxquelles il faut répondre sont : • celle de leur origine, dont dépend le traitement étiologique, souvent le seul à considérer ; • celle de leur retentissement : volémie, déséquilibre ionique, état nutritionnel.
Il faut retenir la grande diversité des causes et n’en négliger aucune. L’orientation sémiologique est essentielle, en écartant avant tout les urgences chirurgicales (voir chapitre 17), neurologiques et métaboliques. La sténose hypertrophique du pylore est une cause très particulière au nourrisson âgé de quelques semaines, à toujours évoquer devant des vomissements progressifs.
I. Pour bien comprendre
A Les vomissements se définissent comme des rejets actifs de tout ou d’une partie du contenu gastrique ou intestinal par la bouche. Ils associent une contraction du diaphragme et des muscles de la paroi abdominale. Ils sont souvent précédés de nausées, de pâleur, d’hypersalivation et de sueurs diffuses.
Ils doivent être distingués des régurgitations qui correspondent à une remontée passive du contenu gastrique, sans effort, fréquentes chez le nourrisson (voir chapitre 18) ; ainsi que du rare mérycisme, équivalent d’une rumination volontairement régurgitée, remâchée puis à nouveau déglutie, qui nécessite une prise en charge spécifique médicamenteuse et souvent psychiatrique.
II. Conduite diagnostique générale
A. Démarche en cas de vomissements
Elle est résumée dans la figure 18.1.
B. Principales causes à connaître
1. Vomissements aigus ou occasionnels
Syndrome infectieux évident Avant tout : • gastroentérite (les vomissements peuvent précéder la diarrhée de plusieurs heures) ; • infections ORL : angine, otite, stomatite ; • efforts de toux (rhinopharyngite, coqueluche).
Autres : • appendicite, péritonite ; • pyélonéphrite ; • méningite ; • hépatite.
Absence de syndrome infectieux Chez le nouveau-né : • causes mécaniques et fonctionnelles : – atrésie duodénale ou du grêle, iléus méconial (mucoviscidose), volvulus sur malrotation intestinale (voir chapitre 17) ; – maladie de Hirschsprung ; • entérocolite ulcéronécrosante (en particulier chez le prématuré). Chez le nourrisson et l’enfant plus âgé : • causes chirurgicales : – hernie inguinale étranglée, volvulus ; – invagination intestinale, torsion du cordon spermatique ou d’annexe ; – occlusion intestinale sur bride ; • causes neurologiques (hypertension intracrânienne) : – hématome sous-dural ou extradural ; – tumeur cérébrale ; • autres causes : – hypoglycémie, acidocétose diabétique ; – toxiques : intoxication médicamenteuse ou au CO, hypervitaminoses A et D ; – allergies alimentaires (forme IgE-médiée, SEIPA aigu).
2. Vomissements chroniques ou récurrents
Causes digestives et alimentaires À évoquer en priorité : • sténose du pylore : urgence chirurgicale (voir infra) ; • RGO (voir chapitre 19) ; Autres causes possibles : • allergie : SEIPA chronique, œsophagite à éosinophiles ; • maladie cœliaque.
Affections extradigestives Pathologies chroniques : • hypertension intracrânienne ; • insuffisance cardiaque ; • tubulopathies ; • hépatopathies ; • chimiothérapies anticancéreuses. Maladies métaboliques : • acidocétose diabétique ; • hyperplasie congénitale des surrénales ; • galactosémie et fructosémie, anomalies du cycle de l’urée. Autres : • vomissements cycliques : – équivalent de migraines ; – survenue d’épisodes répétés, espacés de plusieurs semaines, très intenses ; – durée de quelques heures à quelques jours ; – aucun symptôme entre les crises ; • vomissements d’origine psychogène (une des causes principales de vomissements inexpliqués chez l’enfant), vomissements provoqués (troubles du comportement alimentaire, voir chapitre 42)
C. Points clés sur la sténose du pylore
La sténose du pylore est une urgence diagnostique et thérapeutique. Elle est liée à l’hypertrophie des fibres musculaires du muscle pylore.
Circonstances : • jeune nourrisson, souvent un garçon, +/- antécédents familiaux de sténose du pylore ; • survenue avec un intervalle libre de 3 à 5 semaines après la naissance ; • vomissements : – explosifs, en jet, abondants ; – toujours de lait caillé blanc non teinté de bile ; – généralement à distance du repas (30 à 60 minutes) ; • appétit conservé contrastant avec la cassure de la courbe de poids ; • aggravation progressive. Examen physique : • dénutrition avec déshydratation variable ; • palpation d’une olive pylorique et visualisation d’ondulations péristaltiques de l’estomac.
B Enquête paraclinique : • ionogramme sanguin et gaz du sang : alcalose hypochlorémique ; • échographie abdominale pour confirmation du diagnostic (aspect en cocarde, épaississement du muscle, allongement du canal pylorique et stase gastrique, fig. 18.2).
Prise en charge : • urgence symptomatique : corriger la déshydratation et les troubles ioniques ; • traitement étiologique chirurgical : pyloro-myotomie longitudinale extramuqueuse.
III. Prise en charge thérapeutique
A. Traitement étiologique
Aucun traitement symptomatique d’« épreuve » ne doit faire négliger l’approche étiologique, principal guide de la conduite thérapeutique.
B. Traitement symptomatique
A En l’absence de cause justifiant un traitement spécifique (médical ou chirurgical), un traitement symptomatique peut être proposé (en plus de la réhydratation éventuelle). Très peu d’études randomisées ont cependant mesuré l’efficacité des molécules disponibles chez l’enfant. Seul l’ondansétron a clairement démontré son efficacité ; son AMM est toutefois actuellement réservée aux vomissements induits par les chimiothérapies cytotoxiques et aux vomissements postopératoires. Pour rappel, le métoclopramide est contre-indiqué chez l’enfant.
IV. Points clés sur l’hématémèse
A. Diagnostic
B L’hématémèse se définit par un rejet de sang rouge ou noirâtre au cours d’un effort de vomissements et d’origine digestive (différent du sang dégluti d’un saignement ORL et vomi, ou d’une hémoptysie). Les trois principales causes sont, en fonction de l’âge de survenue : • chez le nouveau-né : œsogastrite néonatale (rapportée au stress maternel, prise de médicaments au dernier trimestre, aspiration traumatique…) ; • chez le nourrisson : sang d’origine maternelle dégluti chez un enfant allaité, rarement œsophagite peptique par reflux ; • chez l’enfant : ulcère duodénal et gastrite le plus souvent médicamenteuse. Peuvent être également à l’origine d’une hématémèse : fréquemment un syndrome de MalloryWeiss (ulcération œsophagienne dans un contexte de vomissements répétés et prolongés), plus rarement la rupture de varices œsophagiennes dans le cadre d’une hypertension portale (notamment un cavernome portal suite à un cathétérisme ombilical à la naissance). Le diagnostic d’hématémèse est souvent évident cliniquement et peut être aidé par la mise en place d’une sonde gastrique (devant un collapsus inexpliqué ou une rectorragie abondante pour affirmer l’origine haute). Il justifie la réalisation d’une endoscopie digestive haute pour déterminer la cause du saignement. Celle-ci est réalisée en urgence uniquement lorsque l’hémorragie n’est pas contrôlée et permet alors de réaliser un geste hémostatique. Elle n’est pas nécessaire en cas de syndrome de Mallory-Weiss.
B. Prise en charge thérapeutique
A La prise en charge en urgence dépend de l’importance du saignement et de son retentissement hémodynamique. Les hématémèses sont rarement sévères en pédiatrie.
B En cas d’hémorragie importante, les principes de prise en charge sont non spécifiques : voie veineuse de bon calibre, monitorage cardiorespiratoire, remplissage vasculaire, voire transfusion. Le traitement dépend de la cause du saignement
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Pédiatrie Coordonnée pour le Collège National des Pédiatres Universitaires par Grégoire Benoist Praticien hospitalier Christophe Delacourt Professeur de Pédiatrie Vincent Gajdos Professeur de Pédiatrie Christèle Gras-Le Guen Professeure de Pédiatrie Et pour le Collège National Hospitalier et Universitaire de Chirurgie Pédiatrique par Éric Dobremez Professeur de Pédiatrie Bruno Dohin Professeur de Pédiatrie Dans la continuité du travail effectué par Antoine Bourrillon Professeur de Pédiatrie
Pédiatrie ISBN 9782294779831 2023, 9e édition