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Obésité et syndrome d'apnées du sommeil (SAOS)

26 janvier 2021

Par Anne-Claire Nonnotte

Obésité et syndrome d'apnées du sommeil (SAOS)

Obésité et syndrome d'apnées du sommeil (SAOS)

Nous vous proposons de découvrir un extrait de l'ouvrage Manuel pratique d'anesthésieS’ouvre dans une nouvelle fenêtre

Manuel pratique d'anesthésie

Manuel pratique d'anesthésie

Obésité et syndrome d'apnées du sommeil (SAOS)

C. Courbon, E. Albrecht

Eric Albrecht, Privat docent, Université de Lausanne, médecin adjoint, service d'anesthésiologie, Centre hospitalier universitaire vaudois, Lausanne, Suisse. Cécile Courbon, Médecin associé, service d'anesthésiologie, Centre hospitalier universitaire vaudois, Lausanne, Suisse

Obésité

Généralités

  • Le surpoids et l'obésité sont définis selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme « une accumulation anormale ou excessive de graisses qui peut nuire à la santé »

  • L'obésité humaine est reconnue comme une maladie par l'OMS depuis 1997 ; elle concerne entre 13 et 15 % de la population. Chaque année, près de 3 millions de personnes meurent de ses conséquences.

  • L'indice de masse corporelle (IMC) est le rapport du poids (kg) sur la taille au carré (m2) ; cet indice permet de catégoriser les différents stades de l'obésité :

    • surcharge pondérale : IMC 25–29,9 kg/m2 ;

    • obésité modérée : IMC 30–34,9 kg/m2 ;

    • obésité sévère : IMC 35–39,9 kg/m2 ; * obésité morbide : IMC >40 kg/m2 ;

    • super obésité : IMC >50 kg/m2.

  • Le poids idéal théorique (PIT) peut être évalué de la manière suivante :

    • homme : taille (en cm) – 100 ;

    • femme : taille (en cm) – 110.

  • Différentes formules permettent de calculer le poids corrigé sur la base de laquelle sont ajustées les doses des médicaments :

    • poids corrigé : PIT + 0,4 (excédent de poids) = PIT + 0,4 (poids réel - PIT) ;

    • poids corrigé : poids réel – 30 % = poids réel - 0,3 × poids réel.

Effets systémiques et pathologies associées à l'obésité

  • Ces différentes modifications et maladies ont une fréquence augmentée chez l'obèse mais ne sont pas systématiquement présentes.

Cardiovasculaires

  • Augmentation du volume circulant, responsable d'une augmentation de la précharge et du débit cardiaque.

  • Augmentation de la postcharge liée à l'hypertension artérielle.

  • Altération de la fonction systolo-diastolique en raison de l'atteinte du myocarde et des coronaires.

  • Hypertension artérielle, cardiomyopathie, insuffisance cardiaque et coronopathie sont les pathologies cardiovasculaires associées à l'obésité. Le risque de décompensation cardiaque gauche est plus élevé chez le patient obèse. Le risque de mort subite est multiplié par 40 chez l'insuffisant cardiaque obèse.

Pulmonaires

  • Diminution des compliances thoracique et pulmonaire.

  • Syndrome restrictif :

    • diminution du volume de réserve inspiratoire, du volume de réserve expiratoire, de la capacité pulmonaire totale, de la capacité vitale ;

    • diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle qui, sous anesthésie générale, devient inférieure au volume de fermeture, avec apparition de troubles du rapport V/Q (atélectasies) ;

    • diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle qui provoque également des désaturations rapides lors des périodes d'apnée en raison des faibles réserves d'O2 ;

    • diminution du volume expiré maximal en 1 seconde (VEMS).

  • ± Hypoxémie chronique et hypertension pulmonaire, par :

    • augmentation de la consommation d'O2 et augmentation de la production de CO2 ;

    • augmentation du travail respiratoire.

  • Syndrome d'apnées obstructives du sommeil.

Digestifs

  • Hernie diaphragmatique.

  • Reflux gastro-oesophagien :

    • l'obèse ne présente pas plus de risque d'inhalation bronchique qu'un sujet mince s'il n'a pas de reflux gastro-oesophagien ni d'antécédent de chirurgie bariatrique ; la vidange gastrique n'est pas retardée.

  • Stéatose hépatique.

Métaboliques

  • Hyperglycémie avec hyperinsulinisme dans la phase initiale, puis résistance à l'insuline.

  • Dyslipidémie.

  • Troubles électrolytiques sur abus de diurétiques et de laxatifs.

  • Hyperuricémie.

  • Syndrome métabolique et diabète.

Pharmacologiques

  • Augmentation du volume de distribution des médicaments lipophiles (thiopental, benzodiazépines) secondaire à l'augmentation de la masse maigre, de la masse adipeuse et du volume circulant.

  • Pas de modification du volume de distribution des médicaments hydrophiles.

  • Pas de modification de la pharmacocinétique des halogénés.

Stratégie anesthésique

Prémédication

  • Éviter les benzodiazépines ; l'effet sédatif augmente le risque d'apnée.

Équipement

  • Brassard à tension adapté.

  • En cas de nécessité, pression artérielle invasive avec gazométries itératives.

  • En cas de nécessité, voie veineuse centrale en cas de capital veineux périphérique diminué.

Induction

  • Risque de ventilation et d'intubation difficiles (envisager éventuellement une intubation vigile) :

  • cou court, surcharge graisseuse de la face, petite ouverture de bouche, augmentation de la taille des seins, mobilité limitée du rachis cervical ;

  • les facteurs prédictifs d'une intubation difficile spécifiques à l'obèse sont les suivants : présence d'un SAOS (15–40 % d'intubation difficile), circonférence du cou (>60 cm : 35 % d'intubation difficile ; 5 % d'intubation difficile si circonférence du cou <40 cm) ;

  • il est très important de savoir si le patient a déjà présenté des difficultés d'intubation, et de tenir compte de l'évolution du poids ;

    • le positionnement du patient est capital : l'élévation de la tête et des épaules avec un coussin ou des alèzes facilite généralement l'intubation ;

    • disposer d'un matériel d'intubation difficile.

  • Préoxygénation : en position proclive ou semi-assise avec application d'une PEP pendant 5 min (éventuellement aide inspiratoire).

  • Induction à séquence rapide en cas de reflux gastro-oesophagien symptomatique ou de malpositionnement d'un anneau gastrique.

  • Induction standard dans les autres cas :

    • éviter le thiopental, très lipophile, dont l'élimination sera retardée, entraînant un risque de somnolence résiduelle, susceptible d'aggraver une hypoxémie postopératoire ;

    • utiliser de préférence le propofol avec une dose d'induction selon le poids corrigé.

  • Curarisation :

    • succinylcholine : dose de 1 mg/kg en fonction du poids réel, sans dépasser une dose de 150 mg ;

    • vécuronium, rocuronium : la dose administrée est calculée en fonction du poids idéal théorique ;

    • atracurium et cisatracurium : la dose administrée est calculée par rapport au poids réel (métabolisme par la voie de Hofmann et les estérases non spécifiques).

Entretien

  • Entretien aux halogénés : le desflurane (Suprane

    ®

    ) est l'halogéné de choix (le moins liposoluble) ; le sévoflurane (Sevorane

    ®

    ) peut également être utilisé.

  • Le propofol en entretien confère un réveil rapide et de bonne qualité aux dépens d'une consommation importante. La dose d'entretien est ajustée en fonction du poids réel.

  • Le sufentanil (Sufenta

    ®

    ), l'alfentanil (Rapifen

    ®

    ), le rémifentanil (Ultiva

    ®

    ) sont privilégiés ; l'utilisation de rémifentanil est intéressante en raison de l'absence de dépression respiratoire résiduelle en cas de SAOS associé.

Ventilation

  • Ventilation en pression ou en volume contrôlé.

  • Volume courant de 8 à 10 ml/kg de poids idéal théorique associé à une PEP d'environ 8 à 10 cmH

    2

    O.

  • F

    I

    O

    2

    standard de 50–80 %.

  • Manœuvres de recrutement : elles doivent être faites de manière systématique après l'intubation, après l'insufflation d'un pneumopéritoine et en cas d'épisodes de désaturation, après élimination d'autres causes d'hypoxémie

Réveil

  • Le réveil se fait en position semi-assise avec application d'une PEP de 5 à 10 mmHg.

  • L'antagonisation de la curarisation est recommandée.

Phase postopératoire

  • Les complications postopératoires suivantes peuvent survenir : atélectasies, pneumonie, thrombo-embolies, infections, déhiscence de la cicatrice opératoire.

  • L'analgésie suit une approche multimodale qui comprend du paracétamol, des anti-inflammatoires non stéroïdiens, des anesthésiques locaux (blocs périphériques, infiltrations locales, cathéter épidural).

  • L'admission en unité de soins continus d'un patient SAOS n'est pas obligatoire. Elle dépend des antécédents cardiorespiratoires, des besoins en opioïdes et de la possibilité d'utiliser la ventilation nocturne à pression positive continue dans la phase postopératoire ; par exemple, un patient appareillé peut directement aller en service d'hospitalisation.

Syndrome d'apnées du sommeil

Généralités

  • La nomenclature distingue les syndromes d'apnées obstructives du sommeil (SAOS), central (SAS central) et mixte :

    • le SAOS est secondaire à une obstruction totale et passagère des voies respiratoires hautes. L'effort inspiratoire existe, mais n'entraîne aucun débit d'air, en raison du collapsus du pharynx secondaire à la diminution du tonus des muscles du pharynx, dont le génioglosse ;

    • dans le SAS central, l'effort inspiratoire n'existe pas, car il est provoqué par une dysrégulation des centres respiratoires dont les causes ne sont pas entièrement élucidées ; il ne représente que 10 % des syndromes d'apnées. Le reste du chapitre sera consacré à la forme obstructive.

  • Un SAOS accompagne souvent l'obésité, mais peut également se développer chez un patient avec un IMC normal. La prévalence du SAOS est d'environ 10 % dans la population non obèse, peut atteindre 50 % dans une population masculine au-delà de 40 ans, et jusqu'à 80 % dans la population obèse. Le diagnostic est le plus souvent méconnu puisqu'on estime à 80 % la proportion des patients dont le SAOS n'est pas connu. Le syndrome de Pickwick est l'association d'un SAOS, d'une obésité et d'une insuffisance cardiaque.

  • Les facteurs prédisposants au SAOS sont le sexe masculin, l'obésité, l'alcool, le tabac et les sédatifs

Diagnostic et manifestations cliniques

  • Le SAOS est défini par plus de 5 apnées et hypopnées par heure de sommeil chez un patient présentant des symptômes diurnes (exemple : somnolence) et nocturnes (exemple : ronflements) :

    • symptômes diurnes : somnolence ; troubles neuropsychologiques (difficultés de concentration, troubles de la mémoire, baisse des performances intellectuelles), dépression, céphalées matinales ; dysfonctionnement sexuel.

    • symptômes nocturnes : ronflement fort et irrégulier ; pauses respiratoires nocturnes ; réveils nocturnes, étouffement nocturnes.

  • L'association de ronflements, d'apnées nocturnes et de somnolence lors de l'anamnèse doit faire suspecter un SAOS. Le questionnaire STOP-BANG est un outil de dépistage utile lors de la consultation d'anesthésie. Il repose sur 8 critères cliniques ; la présence de 3 critères positifs rend le diagnostic de SAOS probable.

    • Snoring

      : présence de ronflements ;

    • Tiredness

      : somnolence diurne, fatigue ;

    • Observed

      : pauses respiratoires observées par le conjoint ;

    • Pressure

      : présence d'une hypertension artérielle ;

    • BMI

      : IMC supérieur à 35 kg/m2 ; * Age : âge supérieur à 50 ans ;

    • Neck

       

      : circonférence du cou supérieure à 40 cm ;

    • Gender

       

      : sexe masculin.

  • La sensibilité du STOP-BANG pour détecter un SAOS modéré à sévère est élevée (93 %), mais sa valeur prédictive est basse (52 %). Formulé autrement, un patient souffrant d'un SAOS sera mis en évidence par le questionnaire, mais un résultat de 3 signifie qu'il n'y a qu'une seule chance sur deux que le patient souffre d'un SAOS. À noter que plus le STOP-BANG est élevé, plus le patient est à risque de souffrir d'un SAOS modéré à sévère.

  • La polysomnographie nocturne est l'examen de référence pour confirmer le diagnostic. Différents paramètres sont examinés durant le sommeil du sujet : saturation artérielle en O2, nombre et durée des apnées, activité électro-encéphalographique et hypnogramme (enregistrement des phases de sommeil). Le diagnostic est confirmé en présence de plus de 5 apnées ou hypopnées par heure de sommeil ; on parle d'index apnée-hypopnée (IAH), qui représente le nombre d'apnées et d'hypopnées par heure de sommeil :

    • une apnée est un arrêt de la respiration supérieur à 10 s ;

    • une hypopnée est une diminution de plus de 50 % de l'amplitude du volume courant, associée à une désaturation de plus de 3 % ou à un réveil.

  • Le SAOS est qualifié de :

    • léger (IAH 5–15) ;

    • modéré (IAH 16–30)

    • sévère (IAH >30).

  • Les complications générales du SAOS sont nombreuses : problèmes cardiovasculaires (hypertension artérielle, hypertension artérielle pulmonaire, infarctus myocardique, accident vasculaire cérébral), problèmes psychosociaux, et accidents du travail et de la circulation liés à la somnolence diurne.

À lire aussi : L'anesthésie au temps du COVID un extrait en accès libre de la revue Le Praticien en Anesthésie RéanimationS’ouvre dans une nouvelle fenêtre Traitement

  • Suppression des facteurs de risque (perte de poids, arrêt de la consommation d'alcool, de tabac et des sédatifs).

  • Mise en place d'une ventilation à pression positive nocturne (ou CPAP) prescrite si le patient présente plus de 30 apnées par heure, ou plus de 15 apnées par heure associées à une somnolence diurne ou des antécédents de complications cardiovasculaires (infarctus myocardique, AVC).

  • Traitement chirurgical en cas d'intolérance ou d'échec à la CPAP. Le taux de succès est faible.

Implications anesthésiques

  • Le SAOS est associé à :

    • une ventilation et une intubation difficiles (incidence de 15 à 40 %) ;

    • une augmentation de l'obstruction des voies aériennes supérieures dans la période postopératoire ; cette obstruction est maximale lors de la 3

      e

       

      nuit postopératoire ;

    • des complications pulmonaires (pneumonies ; réintubation) ;

    • des complications cardiaques (arythmies, syndrome coronarien aigu).

Stratégie anesthésique

  • Éviter les benzodiazépines ; l'effet sédatif augmente le risque d'apnée.

  • L'anesthésie locorégionale doit être privilégiée chaque fois qu'elle est possible.

  • En cas d'anesthésie générale, des agents à courte demi-vie doivent être privilégiés ; attention au risque de ventilation et d'intubation difficiles.

  • L'analgésie suit une approche multimodale qui comprend du paracétamol, des anti-inflammatoires non stéroïdiens, des anesthésiques locaux (blocs périphériques, infiltrations locales, cathéter épidural).

  • L'admission en unité de soins continus d'un patient SAOS n'est pas obligatoire. Elle dépend des antécédents cardiorespiratoires, des besoins en opioïdes et de la possibilité d'utiliser la ventilation nocturne à pression positive continue dans la phase postopératoire ; par exemple, un patient appareillé peut directement aller en service d'hospitalisation.

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