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Traitements médicaux du cancer du sein de la femme âgée

12 octobre 2023

Par Monique Remillieux

Traitements médicaux du cancer du sein de la femme âgée

Nous vous invitons à découvrir un article du dossier Le cancer du sein chez la personne âgée de la revue SOINS Gérontologie S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

Le traitement oncologique médical

Bien que les patientes de plus de 65 ans représentent la majorité des malades du cancer du sein, nous disposons de données limitées sur la tolérance et l’efficacité des traitements oncologiques médicaux dans cette population z Leurs indications reposent avant tout sur des accords d’expert z Cette revue de la littérature aborde les données connues sur la tolérance et l’efficacité des principaux traitements médicaux du cancer du sein : chimiothérapie, inhibiteurs de kinases dépendants des cytokines 4/6, agents ciblant human epidermal growth factor receptor -2, nouveaux anticorps conjugués et immunothérapie.

Mots clés cancer du sein, sujet âgé, traitement oncologique médical

Medical oncology treatment

Although patients over 65 years of age represent the majority of breast cancer patients, we have limited data on the safety and efficacy of medical oncology treatments in this population. Their indications are based primarily on expert agreement. This literature review discusses the known data on the safety and efficacy of the main medical treatments for breast cancer: chemotherapy, cytokine-dependent kinase inhibitors 4/6, agents targeting human epidermal growth factor receptor-2, novel antibody conjugates, and immunotherapy.

Keywords : breast cancer, elderly, medical oncology treatment

Céline Chedevillea : Interne, Hortense Reynes: Interne, Katia Nobreb : Infirmière en pratique avancée, Marc-Antoine Benderra a, ⁎, b, c  : Médecin oncologue a Département d’oncologie médicale, Hôpital Tenon, AP-HP, 4 rue de la Chine, 75020 Paris, France b Département d’oncologie médicale, clinique Hartmann, 26 bd Victor-Hugo, 92200 Neuilly-sur-Seine, France IUC, AP-HP Sorbonne Université, 75000 Paris, France

*Auteur correspondant.

Plan  Traitements  Les cancers localisés Les cancers triple négatif Les cancers HER2+ Le cancer métastatique Les thérapies innovantes  Traitement antihormonal associé à un inhibiteur de CDK 4/6 Étude l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer De nouveaux standards Conclusion Déclaration de liens d’intérêts

Ces dernières années, les patientes avec cancer du sein ont pu bénéficier du développement de nouvelles thérapies innovantes : anticorps conjugués (cancers du sein human epidermal growth factor receptor -2 [HER2] et triple négatif), inhibiteurs de kinases dépendants des cytokines (CDK) 4/6 (cancers du sein hormonodépendants), immunothérapie (cancers du sein triple négatif). Les données d’efficacité et de tolérance de ces nouveaux traitements chez les malades âgées sont peu nombreuses. Nous disposons de plus de données sur les chimiothérapies traditionnelles.

Traitements

Nous abordons ici les différents traitements médicaux possibles en situation néoadjuvante ou adjuvante et en cas de métastases chez la femme âgée avec cancer du sein.

Les cancers localisés

Les cancers du sein localisés RH+ sont peu sensibles à la chimiothérapie, indépendamment de l’âge. La place des traitements néoadjuvants est donc limitée pour ceux-ci avec peu de réponses histologiques complètes (pCR), à l’inverse des cancers RH-[1]. Une approche néoadjuvante avec un traitement antihormonal peut se discuter dans un objectif de conservation mammaire ou pour les cancers très hormonosensibles.

La chimiothérapie adjuvante doit être discutée en cas de facteurs de mauvais pronostics (grades III, N+, T3 ou T4). Une étude de cohorte rétrospective publiée en 2020 [2], menée chez des patientes âgées (moyenne d’âge 77,5 ans) avec plusieurs comorbidités présentant un cancer du sein localement avancé RH+, a montré un bénéfice de la chimiothérapie adjuvante sur la survie globale. Les résultats restaient significatifs après ajustements sur l’âge, les comorbidités, le stade T et N, la réalisation ou non d’un traitement antihormonal adjuvant et d’une radiothérapie adjuvante.

Les schémas standards de chimiothérapie chez la femme âgée pour lesquels nous avons le plus de données sont les protocoles avec anthracyclines (quatre cycles d’AC60 ou EC100 ou quatre cycles de docetaxel-cyclophosphamide) [3].

Pour les malades avec cancer du sein RH+ avec atteinte ganglionnaire non éligibles à une chimiothérapie adjuvante, peut se discuter un traitement adjuvant par bisphosphonates [4]. Il consiste en l’administration de zolédronate tous les six mois pendant deux à trois ans.

Les cancers triple négatif

Pour les cancers triple négatif, il existe un bénéfice en survie sans rechute et en survie globale à l’administration d’un traitement complémentaire en cas de maladie résiduelle, après chimiothérapie néoadjuvante [5].

Le standard actuel des patientes avec cancers du sein triple négatif de stade II ou III est une chimiothérapie néoadjuvante incluant le carboplatine associée au paclitaxel hebdomadaire, les anthracyclines et le pembrolizumab (étude Keynote 522) [6]. Seuls 10 % des malades incluses avaient plus de 65 ans, avec un âge médian de 49 ans, ce qui ne permet pas pour le moment de recommander ce schéma chez la femme âgée.

Chez les patientes avec maladie résiduelle, l’utilisation de la capécitabine a montré son intérêt sur la survie globale [7], mais celles incluses dans l’étude avaient entre 25 et 74 ans. Les résultats dans le sous-groupe des plus de 50 ans n’étaient pas significatifs (hazard ratio [HR] 0,68 ; intervalle de confiance [IC] 95 % 0,45-1,04).

Une étude parue dans The Lancet en 2020 [8] a évalué l’impact de la chimiothérapie adjuvante sur la survie globale des cancers triple négatif chez les femmes de plus de 70 ans et a montré une meilleure survie globale, estimée à cinq ans, avec la chimiothérapie (68 %) comparativement à celle des femmes n’ayant pas reçu de chimiothérapie adjuvante (53 %). Ce bénéfice en survie de la chimiothérapie adjuvante persistait après utilisation d’un score de propension (en ajustant sur l’âge, les comorbidités, le grade et la taille de la tumeur, le statut N et la réalisation d’une radiothérapie).

L’essai randomisé du Cancer and Leukemia Group B (CALGB) 49907 [9], qui s’est intéressé à la survie sans récidive chez les plus de 65 ans en comparant une chimiothérapie adjuvante par anthracycline-cyclophosphamide sans taxane (AC) ou cyclophosphamide, methotrexate, 5-fluorouracil (CMF) versus capécitabine, a confirmé que le meilleur schéma était celui par AC/CMF, avec une survie sans récidive à 56 contre 50 % dans le groupe capécitabine (HR 0,80 ; p = 0,03), en particulier pour les malades avec des cancers triple négatif.

Les cancers HER2+

Concernant les cancers HER2+, l’essai NeoSphere [10] a inclus des patientes jusqu’à 80 ans et a montré que le pertuzumab associé au trastuzumab, en l’absence de chimiothérapie, permettait d’obtenir jusqu’à 27 % de pCR pour les cancers HER2+/RH-, avec une toxicité très limitée. Avec un suivi de onze ans, l’étude Hera [11] a confirmé qu’il existait un bénéfice sur la survie sans récidive avec l’ajout du trastuzumab à la chimiothérapie adjuvante, et ce, indépendamment de l’âge. Le principal effet indésirable du trastuzumab est une toxicité cardiaque.

Dans une vaste et récente méta-analyse incluant 29 000 femmes, la cardiotoxicité est passée de 2,3 % chez les personnes de moins de 50 ans à 3,5 % et 4,9 % chez les personnes de 50 à 59 ans et de plus de 60 ans [12]. La cardiotoxicité doit être soigneusement prise en compte chez les femmes âgées, notamment si elles présentent des comorbidités cardio-vasculaires.

Le cancer métastatique

La cohorte française épidémio-stratégie médico-économique (ESMÉ) annonce une survie globale de 39,5 mois au moment d’un diagnostic d’un cancer du sein. Cependant, ce pronostic diffère selon les sous-types de cancer, l’accès et la tolérance de certains traitements. Il est important de prendre ces paramètres en compte lors du choix du traitement chez une personne âgée.

Chimiothérapies

La chimiothérapie classique doit être considérée pour les cancers triple négatif et pour les cancers RH+ résistants au traitement antihormonal. Les dernières recommandations de 2021 de l’European Society of Breast Cancer Specialists et de l’International Society of Geriatric Oncology [13] privilégient les monothérapies – avec des ajustements de doses pouvant être effectués pour réduire les toxicités – sur des données limitées de la littérature. Toutes les chimiothérapies utilisées chez les patients jeunes peuvent en théorie l’être chez les sujets âgés.

Plusieurs chimiothérapies peuvent être choisies en phase métastatique, même chez des patientes âgées de plus de 80 ans [14]. Dans cette sous-population plus âgée, les chimiothérapies sont associées à davantage d’hospitalisations non programmées (32 %), de transfusions (18 %), d’ajustements de dose, voire d’arrêts de traitement (68 %) [15]. Les études spécifiques chez le sujet âgé sont encore peu nombreuses, et le plus souvent non randomisées. Nous aborderons dans cette partie les chimiothérapies pour lesquelles l’on dispose de données suffisantes : taxanes, anthracyclines, vinorelbine, capécitabine et éribuline.

L’analyse combinée des études CALGB 9342 et 9840 [16] a montré que les patientes âgées de plus de 65 ans traitées par paclitaxel avaient un bénéfice similaire en termes de survie globale et de survie sans progression par rapport aux malades plus jeunes. Les effets secondaires de grade 3 ou plus étaient tout de même plus fréquents chez les plus de 65 ans : leuco-neutropénie (44 %), anorexie (3 %), neuropathie sensitive (28 %) ou motrice (14 %).

Plusieurs schémas de vinorelbine métronomique ont été étudiés, mais les études comportaient de petits effectifs. Celui 50 mg trois jours par semaine semble bien toléré, avec une efficacité correcte [17]. Celui 30 mg par jour en continu n’est pas à retenir, car trop toxique sur le plan hématologique. Dans une population de patientes âgées de 70 à 84 ans, Raffaele Addeo et al. [18] ont testé le schéma 70 mg/m2 fractionné aux jours 1, 3 et 5, avec trois semaines de prise puis une semaine de pause. Ce schéma de dose était bien toléré avec une efficacité correcte et un taux de réponse objective de 38 %. Il a été relevé 9 % de neutropénies grade 3, 9 % d’anémies grade 3 et 41 % de nausées grades 1-2.

L’étude Omega [19] a randomisé un traitement de première ligne métastatique par doxorubicine liposomale pégylée (DLP) ou capécitabine, chez des patientes avec un cancer du sein métastatique âgées de plus de 65 ans. L’étude a été arrêtée précocement du fait de la lenteur des inclusions dans cette population de sujets âgés. Sur les 78 malades incluses, 54 % avaient plus de 75 ans. La DLP était administrée à la dose de 45 mg/m2 toutes les quatre semaines et la capécitabine à la dose de 1 000 mg/m2 matin et soir, deux semaines sur trois. Il n’y avait pas de différence significative en termes de survie sans progression ou de survie globale (13,8 mois pour la DLP et 16,8 mois pour la capécitabine). Les toxicités étaient acceptables dans les deux groupes. Concernant celles de grade 3, on notait 13 % de fatigue dans les deux groupes, 10 % de syndrome mains-pieds pour la DLP et 16 % pour la capécitabine, 10 % de mucite pour la DLP, 3 % pour la capécitabine et 3 % de diarrhée pour la DLP contre 5 % pour la capécitabine. Parmi les 10 patientes de plus de 80 ans, 3 ont arrêté la chimiothérapie pour cause de toxicité.

La toxicité principale des anthracyclines est la cardiotoxicité. Cette cardiotoxicité augmente de 40 % à chaque augmentation de 100 mg/m2 en dose cumulée, et de 30 % pour chaque décennie supplémentaire

La Société internationale d’oncologie gériatrique [20] rappelle les options disponibles pour réduire cette cardiotoxicité chez les sujets âgés : utilisation de la DLP, prolongation de la durée de perfusion des anthracyclines classiques, mesures de cardioprotection (dexrazoxane, bêtabloquants ou inhibiteurs de l’enzyme de conversion).

L’éribuline, poison du fuseau, est également bien tolérée à la dose 1,23 mg/m2 J1 et J8, J1 = J21 et est efficace chez des patients âgés sélectionnés, mais il faut faire attention à la neurotoxicité [21]. Dans l’étude de Silvana Leo et al. [21] menée sur cinquante patientes, avec un âge moyen de 72 ans, les effets secondaires les plus fréquents, de grades 3-4, étaient la fatigue (35 %) et les mucites (15 %). Les réductions de dose (32 %) étaient principalement dues aux neutropénies (23 %).

Pour le cancer du sein triple négatif, de nombreuses nouveautés sont intervenues fin 2021, comme l’immunothérapie associée à une chimiothérapie ou le sacituzumab-govitecan.

Les thérapies innovantes

Traitement antihormonal associé à un inhibiteur de CDK 4/6

Selon les dernières recommandations européennes de la Société européenne d’oncologie médicale sur la prise en charge du cancer du sein métastatique [22], la première ligne de traitement du cancer du sein métastatique RH+/HER2- est la combinaison d’un traitement antihormonal et d’un inhibiteur de CDK 4/6 (palbociclib, ribociclib ou abemaciclib). Cette association, en plus d’améliorer la survie sans progression et la survie globale par rapport à un traitement par chimiothérapie, a l’avantage d’être bien tolérée et de se prendre per os . Le traitement antihormonal seul en première ligne doit être réservé à des malades souffrant de comorbidités, ou présentant un état général contre-indiquant l’utilisation d’un inhibiteur de CDK 4/6 (ce qui reste rare).

L’âge ne peut pas être le seul argument pour préférer cette option. En effet, plusieurs études ont démontré son efficacité et sa sûreté d’utilisation chez les personnes âgées. Récemment, l’étude de cohorte prospective française Palomage [23], dite de vraie vie, menée chez 807 patientes âgées de plus de 70 ans, s’est intéressée à la tolérance du palbociclib en phase d’hormonosensibilité et d’hormonorésistance. L’analyse de la tolérance avec un recueil précis des facteurs de fragilités, montre que ceux-ci n’ont pas d’impact sur la survenue d’une toxicité de grades 3 ou 4. Il y avait 43 % de neutropénies, dont 1 % de neutropénies fébriles. Seules 6 % des patientes ont dû arrêter la prise de palbociclib pour toxicité. Toujours pour le palbociclib, une étude anglaise [24] et une étude américaine [25] sont arrivées à la même conclusion, avec des chiffres de tolérance similaires dans des populations âgées.

La tolérance et l’efficacité du ribociclib ont aussi été étudiées chez les patientes âgées de plus de 65 ans [26], incluses dans l’étude Mammary Oncology Assessment of LEE011’s (Ribociclib’s) Efficacy and Safety-2. Le profil de tolérance semble comparable chez les malades âgées et celles plus jeunes.

Concernant l’abemaciclib [27], une étude sur 133 patientes semble montrer qu’il faut porter une attention particulière sur la tolérance digestive, notamment la diarrhée, et ce traitement semble donc difficilement envisageable chez les plus de 80 ans.

L’utilisation de l’évérolimus (inhibiteur de mTOR) avec l’exémestane est déconseillée chez les malades très âgées [28]. En effet, cette association entraîne d’importantes mucites, et ce, malgré la prescription systématique de bains de bouche en association à des corticoïdes. Ces mucites peuvent se révéler fatales chez des patientes âgées avec un terrain fragile.

Concernant les thérapies ciblant HER2+ [29], en l’absence de dysfonction du ventricule gauche préexistante, et selon l’état général, l’utilisation du trastuzumab en association au pertuzumab reste possible chez les personnes âgées. Une surveillance par échographie avec évaluation de la fraction d’éjection du ventricule gauche reste primordiale, puisque l’âge est associé à une augmentation du taux de cardiotoxicité [12].

Étude l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer

La toxicité spécifique des chimiothérapies est détaillée dans le chapitre précédent. On peut tout de même rapporter les résultats de l’étude de l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer (EORTC) 75111-10114 [30] qui s’est intéressée, chez des patientes âgées de plus de 70 ans ou de plus de 60 ans avec comorbidités, à un traitement métronomique par cyclophosphamide oral, à la dose de 50 mg par jour, en association à un double blocage par trastuzumab et pertuzumab. Le bras contrôle consistait en un double blocage sans chimiothérapie associée, puisque l’adjonction du paclitaxel était jugée trop néfaste dans cette population à risque. La survie sans progression à six mois était de 73,4 % (contre 46,2 % dans le bras contrôle).

Les principaux effets secondaires étaient une hypertension (12 % de grades 3-4), de la diarrhée (12 % de grades 3-4), une dyspnée (10 % de grades 3-4) et de l’asthénie (5 % de grades 3-4). Toujours dans cette étude de l’EORTC, parmi les 29 patientes ayant reçu du trastuzumab-emtansine (TDM-1) en deuxième ligne, au moins un effet secondaire de grade supérieur à 3 a été signalé chez 14 d’entre elles (38 %). Une malade est décédée d’une pneumonie et une autre de cachexie. Le rapport bénéfices-risques du trastuzumab-emtansine chez les personnes âgées semble en faveur de son utilisation, mais des études complémentaires sont nécessaires.

De nouveaux standards

De nouveaux traitements ont fait leur apparition depuis 2019, parmi lesquels le trastuzumab-deruxtecan [31], un anticorps conjugué à un inhibiteur de topoisomérase I qui est maintenant le nouveau standard en deuxième ligne métastatique ; et le tucatinib, un inhibiteur de tyrosine kinase ciblant HER2. Le trastuzumab-deruxtecan dans l’étude Destiny-Breast 03 [31] a montré des durées de survie sans progression impressionnantes de 25,1 versus 7,2 mois pour le TDM-1 (HR 0,26 ; p = 6,5 × 10−24). Les principales toxicités sont digestives (nausées, vomissements, diarrhées et constipation), hématologiques (neutropénie, thrombopénie et anémie), une alopécie, de la fatigue et, dans 10 à 15 % des cas, l’apparition d’une pneumopathie interstitielle diffuse. Il n’existe pas de données spécifiques chez les sujets âgés.

Concernant le tucatinib, il s’utilise en association avec le trastuzumab et la capécitabine, et présente une activité sur les métastases cérébrales. Dans l’étude HER2CLIMB [32], 82 malades traitées par tucatinib avaient plus de 65 ans et, parmi elles, 8 avaient plus de 75 ans. L’incidence d’effets secondaires graves était de 34 % chez les plus de 65 ans (contre 28 % chez les moins de 65 ans). Il est nécessaire d’avoir davantage de données sur l’utilisation dans une population âgée car, du fait de son association avec la capécitabine, le profil de tolérance ne semble pas adapté (syndrome mains-pieds et diarrhée).

Pour le cancer du sein triple négatif, de nombreuses nouveautés sont intervenues fin 2021, avec l’arrivée de l’immunothérapie associée à une chimiothérapie en première ligne métastatique pour les patientes ayant un score positif combiné > 10 % [33], et celle du sacituzumab-govitecan en deuxième ligne [34]. L’étude Keynote-355 [33] s’est intéressée à l’association du pembrolizumab (anti-PD-1) et d’une chimiothérapie (nab-paclitaxel, paclitaxel ou gemcitabine et carboplatine). Seules 123 patientes (22 %) étaient âgées de plus de 65 ans dans le groupe comportant de l’immunothérapie et 57 (20 %) dans le groupe sans immunothérapie. La survie médiane sans progression était de 7,5 mois dans le groupe pembrolizumab + chimiothérapie, versus 5,6 mois dans le groupe chimiothérapie seule (HR 0,82 ; IC 95 % 0,69-0,97).

Les principales toxicités dans le groupe pembrolizumab + chimiothérapie étaient : neutropénie (30 % grades 3-4), anémie (16 % grades 3-4) et les nausées (9 % grades 3-4). Le sacituzumab-govitecan est un anticorps monoclonal ciblant la protéine Trop-2 conjugué à un inhibiteur de topoisomérase I. Il est actuellement recommandé chez les patientes ayant reçu préalablement deux lignes de traitement systémiques ou plus, dont une ligne à la phase avancée avec un gain en survie sans progression médiane de quatre mois (5,6 contre 1,7 mois, HR 0,41 ; IC 95 % 0,32-0,52) [34].

Une analyse post-hoc [35] a étudié l’efficacité et la tolérance du sacituzumab-govitecan chez les patientes âgées de plus de 65 ans. Sur 235 malades dans le bras sacituzumab-govitecan, 44 (19 %) avaient plus de 65 ans et seules 7 dépassaient les 75 ans. La survie sans progression était améliorée dans cette population des plus de 65 ans (7,1 versus 2,4 mois ; HR 0,22 ; IC 95 %, 0,12-0,40), avec un plus haut taux de réponse et de bénéfice clinique, comparativement à une chimiothérapie standard.

On a noté une élévation du nombre de réduction de dose (35  % versus 19 % chez les moins de 65 ans). Les principales causes étaient : neutropénie, asthénie, diarrhée et nausées. Cependant dans la plupart des cas, il n’a pas été nécessaire d’interrompre le traitement (2 % versus 5 %).L’utilisation du granulocyte-colony-stimulating factor (G-CSF) en prévention primaire semble indispensable chez les femmes âgées malades. Ces données de tolérance offrent une perspective intéressante sur l’utilisation du sacituzumab-govitecan dans cette population. Il faut toutefois garder à l’esprit qu’il s’agit de malades sélectionnées pour rentrer dans un essai thérapeutique et qu’elles ne reflètent donc pas forcément les malades âgées que l’on voit en pratique quotidienne.

Chez les malades porteuses d’une mutation germinale BRCA , un inhibiteur de poly(ADP-ribose) polymérase (PARP), tel que l’olaparib [36] ou le talazoparib [37], est à privilégier en première ligne métastatique [22]. L’olaparib a été étudié chez les patientes de plus de 65 ans suivies pour un cancer ovarien [38]. Le profil de tolérance ne semblait pas différer des malades de moins de 65 ans. Il faut cependant porter une attention particulière à la toxicité hématologique, notamment l’anémie. Il y a très peu de données sur l’utilisation de l’olaparib chez des patientes âgées avec cancer du sein.

Conclusion

Ces dernières années, les femmes âgées avec cancer du sein ont pu bénéficier de nouveaux traitements avec des efficacités rarement constatées jusque-là (inhibiteurs de CDK 4/6, anticorps conjugués et immunothérapie). Le traitement des patientes de moins de 70-75 ans reste le même que celui des malades plus jeunes. La difficulté réside dans le traitement des plus de 75 ans, pour lesquelles les données de la littérature manquent. Une évaluation gériatrique approfondie est indispensable dans cette population afin d’adapter aux mieux les traitements.

De nouveaux traitements existent depuis 2019,parmi lesquels le trastuzumab-deruxtecan

Déclaration de liens d’intérêts

Marc-Antoine Benderra fait partie de l’advisory boards de Pfizer, Novartis, Lilly, Gilead, AstraZeneca et Daiichi Sankyo.

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Soins Gérontologie Volume 27, numéro 157 pages 13-17 (septembre 2022)Doi : 10.1016/j.sger.2022.09.004© 2022  Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Vous venez de découvrir un des articles du dossier thématique Le cancer du sein chez la personne âgée de Soins Gérontologie S’ouvre dans une nouvelle fenêtre

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