Le syndrome de l’X fragile et maladies associées
France | 7 février 2023
Par Anne-Claire N.
Nous vous proposons de découvrir un article de la revue L'Aide-Soignante S’ouvre dans une nouvelle fenêtre sur le syndrome de l'X fragile
Le syndrome de l’X fragile et maladies associées
Fanny Maraque : Présidente de l’Association X Fragile France Fragile X France, 33 rue Saint- Jean-de-Dieu, 69007 Lyon, France
Résumé
Le syndrome de l’X fragile est une pathologie génétique, qui peut se traduire chez les personnes par une déficience intellectuelle, un retard de développement psychomoteur, des troubles du comportement d’apparence autistique et des dysmorphies.
Mots clés : déficience intellectuelle, handicap, syndrome de l’X fragile, trouble du comportement
Le syndrome de l’X fragile (syndrome de Martin et Bell) est une maladie rare, génétique et héréditaire, qui se caractérise par une déficience intellectuelle de légère à sévère, associée à des troubles comportementaux et de la morphologie (dysmorphies). Il a été initialement décrit par James Purdon Martin et Julia Bell [1] en 1943. Le gène FMR1 , pour Fragile X Messenger Ribonucleoprotein 1 , en cause dans cette pathologie a été identifié par l’équipe de Jean-Louis Mandel [2].
Épidémiologie
Le syndrome de l’X fragile est plus fréquent chez les garçons (1/5 000) que chez les filles (1/9 000) mais comme les manifestations sont parfois moins marquées chez ces dernières, la prévalence pourrait être sous-estimée [3]. En France, environ 10 000 personnes seraient porteuses de cette anomalie génétique.
C’est la première cause de déficience intellectuelle héréditaire et la deuxième cause après la trisomie 21 [4].
Transmission
Chaque humain possède dans ses cellules 23 paires de chromosomes, dont une paire de chromosomes sexuels qui déterminent le sexe de la personne : XX pour la fille et XY pour le garçon. Les chromosomes sont constitués de gènes qui codent pour une protéine. Le gène FMR1 est situé sur le chromosome X et code pour la protéine FMRP (Fragile X Messenger Ribonucleoprotein) . Dans le cas de cette pathologie, une séquence de trois bases (le triplet CGG) de l’acide désoxyribonucléique est répétée de façon anormale ; il s’agit soit de prémutation (quand le nombre est compris entre 55 et 200 fois) soit d’une mutation complète (quand le nombre dépasse 200 fois).
Une femme sur 250 et un homme sur 800 sont porteurs de la prémutation [3] et donc susceptibles de la transmettre à leurs enfants.
L’homme porteur d’une prémutation ne transmet que la prémutation à toutes ses filles. Ses fils ne seront pas concernés car le père leur transmet son chromosome Y, non concerné.
La femme transmet uniquement un chromosome X. Lorsqu’elle est porteuse de la prémutation, le risque de la transmettre à ses enfants est de 50 %, quel que soit leur sexe. Au moment de la formation des ovules, la prémutation peut devenir mutation complète.
Dépistage
La prémutation peut ne donner aucune manifestation et être transmise “silencieusement”, de génération en génération [3]. Devant un développement retardé chez le nourrisson, un test génétique à partir d’un prélèvement sanguin peut être prescrit pour l’étude du gène FMR1 muté (encadré 1).
Il est recommandé d’effectuer un dépistage chez les parents, puis dans la famille élargie de la personne porteuse de la prémutation. Cela est d’autant plus important s’il existe des projets de grossesse. Un conseil génétique avant la grossesse permet d’obtenir un maximum d’information sur le mode de transmission et la maladie. Un diagnostic préimplantatoire1 est possible, ainsi qu’un dépistage prénatal à partir d’un prélèvement du placenta (choriocentèse) ou du liquide amniotique (amniocentèse).
Il est recommandé d’effectuer un dépistage chez les parents, puis dans la famille élargie de la personne porteuse de la prémutation. Cela est d’autant plus important s’il existe des projets de grossesse. Un conseil génétique avant la grossesse permet d’obtenir un maximum d’information sur le mode de transmission et la maladie. Un diagnostic préimplantatoire1 est possible, ainsi qu’un dépistage prénatal à partir d’un prélèvement du placenta (choriocentèse) ou du liquide amniotique (amniocentèse).
Signes
Manifestations spécifiques de la prémutation
La prémutation du gène FMR1 développe une symptomatologie différente de la mutation complète [4].
Le terme FXPAC pour Fragile X Premutation Associated Conditions regroupe les problèmes de santé spécifiques liés à la prémutation. Des études sont encore en cours mais plusieurs symptômes communs ont été observés chez les personnes porteuses de la prémutation, à côté du syndrome FXTAS et de l’insuffisance ovarienne précoce (IOP) : de la fatigue chronique, des douleurs généralisées, de l’anxiété et des angoisses, des épisodes de déprime et de dépression, etc. Les maladies auto-immunes et des troubles du sommeil ont également été plus souvent diagnostiqués chez les porteurs de la prémutation. Certains de ces symptômes sont fréquents dans la population générale mais les recherches en cours suggèrent que les porteurs de la prémutation ont un risque plus élevé de les manifester.
Le FXTAS, pour Fragile X Tremor Ataxia Syndrome (syndrome de tremblement-ataxie) concerne 60 % des personnes porteuses. Il apparaît à partir de 50 ans, essentiellement chez les hommes mais également chez environ 16 % des femmes. Outre les tremblements et problèmes d’équilibre, la personne connaît une perte de sensibilité aux extrémités, l’humeur labile et des troubles de la mémoire à court terme.
Par ailleurs, près d’un quart des femmes peuvent développer une IOP suscitant des troubles de la fertilité, une absence de règles ou des règles irrégulières, voire une ménopause précoce [4].
Manifestations du syndrome de l’X fragile
En raison des mutations du gène FMR1 , la protéine FMRP est absente. Or celle-ci aurait un rôle dans la transmission de l’influx nerveux et dans la capacité à faire ou défaire des connexions entre neurones, d’où les déficiences intellectuelles, les difficultés d’apprentissage, comportementales, émotionnelles et sensorielles. Elle interviendrait également dans les propriétés des tissus conjonctifs, qui soutiennent le corps et protègent les organes [3].
Les symptômes sont peu spécifiques et très variables d’une personne à l’autre. Chez les filles, le spectre des manifestations est plus large et les symptômes peuvent être plus discrets mais une partie d’entre elles peut exprimer les mêmes difficultés que les garçons avec des troubles du comportement et une déficience intellectuelle sévère. Le syndrome peut se manifester chez elles par de la timidité, de l’anxiété, un retard scolaire surtout en mathématiques, des difficultés de communication.
Le premier signe d’alerte est le retard de développement psychomoteur (position assise, marche, propreté) et intellectuel de léger à sévère. Le langage est acquis plus tardivement, avec une élocution rapide voire saccadée, des répétitions de mots ou de phrases entendus (écholalies). Les difficultés d’apprentissage et de raisonnement sont présentes à des degrés divers : problèmes de compréhension et de mémorisation, difficultés à lire, à compter et à raisonner. La mémoire visuelle est à privilégier. Les mathématiques sont particulièrement difficiles car trop abstraites. Les fonctions exécutives peuvent aussi être atteintes. L’intensité du déficit intellectuel a des conséquences sur l’autonomie de la personne.
Les troubles du comportement sont multiples et évoluent avec l’âge : troubles déficitaires de l’attention et de l’hyperactivité, envahissement émotionnel (mouvements stéréotypés), manifestations d’anxiété proches de l’autisme (accès de colère, mâchouillement des vêtements, morsures des mains, soliloquie3) et évitement des interactions sociales. Les personnes porteuses de l’X fragile sont hypersensibles à leur environnement : intolérance aux bruits aigus, à certaines matières en contact avec la peau, aux aliments. Les changements et périodes de transition peuvent provoquer des angoisses.
Certaines caractéristiques morphologiques sont plus ou moins présentes [4] : macrocéphalie (visage allongé au front proéminent), grandes oreilles, hyperlaxité ligamentaire au niveau des articulations, une faiblesse musculaire (hypotonie), un affaissement plantaire (pieds plats), une scoliose, une augmentation anormale du volume des testicules (macro-orchidie) à la puberté.
Le nourrisson est sujet à des difficultés de déglutition, des otites à répétition ainsi qu’un reflux gastro-œsophagien ; des convulsions épileptiques peuvent se manifester après 5 ans.
Les troubles de la vision (strabisme, nystagmus3) doivent être dépistés précocement.
Prise en charge
La prise en charge de l’enfant est pluridisciplinaire médicale et paramédicale. Elle doit être instaurée au plus tôt pour stimuler le développement. Elle combine, en fonction des besoins de l’enfant, l’orthophonie, la psychomotricité, l’ergothérapie, la kinésithérapie (posture, douleur en cas de scoliose prononcée), l’orthoptie. Sont travaillés entre autres le langage, la communication, l’expérience sensorielle, les troubles du comportement et le sentiment de sécurité.
Le suivi pluridisciplinaire est indispensable tout au long de la vie. Autant que possible, l’inclusion scolaire des plus jeunes et l’inclusion sociale des adultes par le logement et le travail, en participant à des activités, sera favorisée. L’enfant scolarisé bénéficie de différentes adaptations par le biais d’un projet personnalisé de scolarisation [5] : accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH), intégration d’une unité localisée d’inclusion scolaire, ou orientation vers un établissement spécialisé. Un projet d’accueil individualisé peut être nécessaire.
Les traitements médicamenteux peuvent être prescrits afin d’atténuer certaines manifestations telles que l’hyperactivité, l’anxiété, l’épilepsie.
Les aidants naturels ont un rôle fondamental dans la mise en place d’un cadre sécurisant, visant à prévenir et à réduire l’anxiété. Un accompagnement psychologique de la famille peut être bénéfique.
Déclaration de liens d’intérêts
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références
[1] Martin J.P., Bell J. A pedigree of mental defect showing sex linkage J Neurol Psychiatry 1943 ; 6 (3–4) : 154-157 [cross-ref] [2] Rousseau F., Heitz D., Oberlé I., et al. Le syndrome de l’X fragile: des mutations étonnamment ciblées et instables, et un gène à la recherche d’une fonction Med Sci (Paris) 1991 ; 7 (6) : 637-639 [cross-ref] [3] Le syndrome de l’X fragile. Syndrome de Martin et Bell. Encyclopédie Orphanet grand public. 2012. www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/XFragile-FRfrPub120.pdf . [4] Enfant différent. Comprendre et connaître le syndrome X Fragile. 2022. www.enfant-different.org/handicaps-et-maladies/connaitr e-le-syndrome-x-fragile. [5] Tous à l’école. X fragile (Syndrome de l’). 2 juin 2015. www.tousalecole.fr/content/x-fragile-syndrome-de-l.
Pour en savoir plus
Hospices civils de Lyon. Qu’est-ce que le syndrome de l’X Fragile ? 28 janvier 2022. www.chu-lyon.fr/syndrome-de-lx-fragile. 1 Détection d’éventuelles anomalies génétiques ou chromosomiques dans les embryons issus d’une fécondation in vitro avant de les implanter dans l’utérus. 3 Fait de se parler à soi-même. 3 Mouvements involontaires saccadés des deux yeux.
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